Après plusieurs années de relations fructueuses, la Banque Commerciale du Sahel S.A. (BCS) et l’Entreprise Nouvelle de Bâtiments et de Travaux Publics (ENB/TP) dirigée par Monsieur Issaka Traoré ne parlent plus le même langage. Aux dernières informations, il est question d’une mise en demeure / recouvrement de créance pour la BCS-SA auprès de Monsieur Traoré qui, par contre, estime que c’est la BCS qui lui doit. De procès en procès, c’est la guerre ouverte entre la banque et son client. Qu’est-ce qui cloche entre ces deux désormais anciens partenaires ?
En effet, le 28 juin 2013 à 16 h 46 mn, à la requête de Me Idrissa Bacar Maïga, Avocat à la Cour, la Société civile professionnelle Bamory Kané et Madina Sanogo a transmis à Issaka Traoré une correspondance de mise en demeure / recouvrement de créance pour la BCS-SA d’un montant de dix huit millions trois cent quatre vingt seize mille cinq cent vingt trois (18 396 523) F CFA soit en principal 14 717 219 F CFA et en indemnité conventionnelle 3 619 304 F CFA suivant la convention de compte courant du 05 janvier 2001 pour un solde arrêté au 12 mai 2013. Il est demandé à Monsieur Traoré de couvrir sous huitaine la BCS de sa créance, le cas échéant il sera fait usage des voies de droits pour la recouvrer, notamment par la réalisation de la garantie qui n’est autre que l’hypothèque d’un immeuble d’une valeur de 70 millions F CFA. Mais seulement voilà !
Pour Issaka Traoré, la BCS lui réclame des sommes injustifiées. D’abord il lui est réclamé une somme qui a été versée dans son compte sans l’avertir, et qui a été enlevée par des voleurs également sans l’avertir d’une quelconque opération sur son compte. Sur la correspondance, il est marqué 10 818 258 F CFA. Et une autre somme de 5 585 371 dont il ne sait ni l’origine, ni la signification. De ce total, il a été tout simplement retranché un crédit de 1 686 410 F CFA qui existait dans le compte du client. C’est pourquoi Issaka Traoré décide de faire appel de cette décision. Mais revenons aux faits.
Dans le cadre de relations d’affaires, l’Entreprise Nouvelle de Bâtiments et de Travaux Publics (ENB/TP) dirigée par Monsieur Issaka Traoré a bénéficié depuis 2004 de concours de la BCS pour un montant annuel plafonné à dix millions de FCFA en découvert, vingt millions en avance sur marchés et vingt millions en ce qui concerne les cautions. Comme il est d’usage, la BCS a pris les précautions suivantes : ” Nous nous réservons le droit d’annuler les dits plafonds si les échéances de règlements des utilisations ne sont pas respectées. Par ailleurs, nous vous demandons de noter qu’à l’échéance, le renouvellement ou l’augmentation de ces concours sera subordonné à leur dénouement correct… “.
A l’approche de l’échéance du dernier contrat, M. Traoré a mis dix millions dans le compte le 11/08/2010, soldant son déficit assorti d’un crédit de cinquante mille trois quarante huit (50 348) FCFA en vue du renouvellement du plafond de concours dont il a fait la demande plus tard. Curieusement, ce jour même 11/08/2010, un chèque porteur de trois millions de FCFA est encaissé par ” un voleur ” sans le moindre avertissement à l’endroit de M. Traoré de la part de la BCS. Ce n’est pas tout, un deuxième chèque porteur de quatre millions de FCFA a été payé à la même personne le 23/03/2010, encore pas le moindre avertissement de la part de la BCS. Et l’appétit venant en mangeant, un troisième chèque porteur de quatre millions de FCFA a été présenté, toujours par la même personne, et payé le 30/08/2010 par la BCS, toujours sans le moindre avertissement.
Donc il s’agit d’un retrait total de onze millions de FCFA, dépassant du coup le plafond autorisé de découvert de dix millions, et sans jamais avertir M. Traoré le titulaire du compte comme il est d’usage dans les banques de la place. Pis, ce chèque a passé pendant que le délai pour le plafond de concours avait déjà expiré. Du jamais vu dans les relations de ENB/TP avec la BCS !
Mais ce qui étonne davantage dans le comportement de la BCS, c’est que les trois chèques présentés dans la même période (une vingtaine de jours) et pour un montant plus élevé que celui accordé par le contrat, comportent tous plutôt une imitation de signature et surtout un faux caché. En effet, les deux chèques de quatre millions comportent des cachets avec des caractères minuscules, contrairement au spécimen de signature déposé à la BCS. Celui de trois millions a un cachet également différent du spécimen déposé car il y est écrit E.N.B./T.P. au lieu de E.N.B.T.P.
La même personne s’est présentée le 29/10/2010, donc deux mois plus tard, avec un chèque porteur de cinq millions de FCFA dans une autre banque, la Banque pour le Commerce et l’Industrie – MALI – S.A (BCI) qui a alerté, ce qui a permis, seulement à la première tentative dans cette banque, l’arrestation de la bande de malfaiteurs, notamment le voleur et ses complices.
Par ailleurs, ignorant complètement ce qui se passait sur son compte à la BCS, M. Traoré a demandé par téléphone à M. Diawoye Diarra, agent de ladite banque, si son compte n’avait pas subi de retrait frauduleux et si un virement de un million sept cent cinquante mille FCFA était arrivé. Il aurait répondu que le compte n’avait pas de problème et que les sous étaient bien arrivés. M. Traoré se précipite à la BCS pour récupérer le million sept cent cinquante mille FCFA et là, il a été stupéfait en découvrant la triste réalité. Pourquoi l’agent lui a-t-il caché la réalité de son propre compte qui est pourtant facilement mis à la disposition des malfrats pour des retraits frauduleux ? s’interroge le client.
Accompagné des policiers ayant arrêté la bande de malfaiteurs, M. Traoré a rencontré M. Assane Magnan Diarra, un des responsables de la BCS pour lui exposer les faits. Ce dernier a affirmé qu’une solution allait être trouvée au problème et que M. Traoré va recouvrer le million sept cent cinquante mille FCFA. Contre toute attente, la banque refuse de payer cette somme tout en se déclarant non responsable de ce qui s’est passé. Alors, parallèlement à ceux interpellés par la police, M. Traoré a porté plainte contre la BCS au tribunal de commerce.
Les voleurs à la barre
Les sieurs Abdoulaye Diarra, Amadou Sissoko, Souleymane Sanogo, Seydou Maïga et Chaka Kané sont appelés à répondre des faits de vol, faux et usage de faux, complicité devant le Tribunal de Première Instance de la Commune II du District de Bamako à l’audience publique ordinaire du 08 mars 2011, présidée par M. Maki Sidibé, assisté de Me Traoré Aminata Boubacar Dicko, Greffier, en présence de M. Ousmane Samaké, Substitut du Procureur de la République. Et pour causes ?
Courant 2010, Abdoulaye Diarra, agent de Issiaka Traoré, chipe le chéquier de son patron avant de couper quelques chèques. Ainsi il se rend chez son ami Seydou Maïga pour lui expliquer ses intentions de toucher lesdits chèques et qu’il a besoin de son aide. Ce dernier remplissait lesdits chèques pour les remettre à Amadou Sissoko pour signature et prenait alors contact avec l’adjudant de police Souleymane Sanogo en service à l’immigration qui confectionnait une carte d’identité civile pour Chaka Kané, coursier à ce même service, afin de toucher lesdits chèques. Ainsi Chaka Kané retira successivement les sommes de 3.000.000, 4.000.000 et 4.000.000 FCFA à la BCS pour les remettre à Souleymane Sanogo qui se chargea de la répartition du butin en fonction du rôle joué par chacun d’eux.
Interpellés, les prévenus ont reconnu les faits à eux reprochés même si l’adjudant de police Souleymane Sanogo qui a pourtant partagé l’argent, tenta de les nier au motif qu’il n’a jamais vu lesdits chèques de ses yeux, à fortiori les montants retirés. Et d’ailleurs, il établissait une carte d’identité nationale pour Chaka Kané à Nionsombougou, sachant bien qu’il est domicilié à Banconi.
Ainsi, le Tribunal a condamné Abdoulaye Diarra, Souleymane Sanogo, Seydou Maïga et Chaka Kané à trois mois d’emprisonnement ferme et Amadou Sissoko à un an d’emprisonnement avec sursis. Ils ont été en outre condamnés solidairement à payer à M. Traoré la somme de onze millions de FCFA à titre principal et celle de cinq cent mille FCFA à titre de dommages et intérêts.
La BCS dos au mur
Pour le Tribunal de Commerce de Bamako, il est constant que M. Issiaka Traoré a noué des rapports de collaboration avec la BCS qui lui apportait son concours financier pour l’exécution de ses marchés. Mais courant août 2010, il a constaté que des retraits, d’un montant total de 11.000.000 de FCFA avaient été effectués sur son compte ouvert à la BCS alors qu’il n’avait émis aucun chèque au nom du bénéficiaire. C’est après vérification qu’il s’est rendu compte que trois chèques d’un montant respectivement de 3.000.000, 4.000.000 FCFA et 4.000.000 FCFA avaient été présentés et payés au guichet de la banque sous une fausse signature et un faux cachet totalement différents des spécimens déposés par lui. Pour le tribunal, en payant ces trois chèques sans vérifier au préalable la conformité de leurs signatures et cachets, la BCS a commis une faute professionnelle qui lui a été préjudiciable. En outre, le refus inexpliqué de la banque de créditer son compte de la somme de 11.000.000 FCFA lui a causé un préjudice qui doit être réparé. Alors le Tribunal, en son audience publique ordinaire du 23 mars 2011 présidée par Faradji Baba avec à ses côtés les juges consulaires Aly Ould Raïs et Cheick Hamala Simpara, le greffier Mme Diarra Aminata Sanogo, a condamné la BCS à payer à M. Issiaka Traoré la somme de 13 millions FCFA, tous préjudices confondus.
La Cour d’Appel pince le client
Pour 13 millions de réparation de préjudices causés à son client, la BCS n’a pas daigné s’exécuter, ni rembourser ce qu’elle a pris sur le compte de M. Traoré, mais l’a plutôt trainé devant les tribunaux. Ainsi la Cour d’Appel de Bamako, en son audience publique ordinaire du 28 décembre 2011, présidée par M. Moussa Sara Diallo, avec à ses côtés les Conseillers à la Cour d’Appel M. Sidi Kéïta et M. Moussa Diarra, en présence du Substitut Général près la Cour d’Appel de Bamako M. Hamet SAM (Ministère public), avec l’assistance de Me Kodio Minata Kamanguilé, Greffier, a infirmé le jugement entrepris au Tribunal du Commerce. Et pour causes ?
Pour la Cour, M. Traoré ayant poursuivi les auteurs de faux et usage de faux qui ont été condamnés à lui payer 11.000.000 FCFA au principal et 500.000 FCFA de dommages intérêts, le Tribunal de Commerce en condamnant la BCS pour les mêmes faits a ordonné une seconde réparation du même préjudice. Aussi, pour la Cour, l’exécution de ces deux titres exécutoires aboutit à un enrichissement illicite de M. Issaka Traoré.
A voir dans ce retournement de situation, la Cour d’Appel de Bamako a penché vers l’enrichissement illicite et l’impunité pour la BCS d’une part et d’autre part l’appauvrissement de M. Issaka Traoré. Et depuis le 11/08/2010 le calvaire continue pour M. Traoré. En plus de l’attitude machiavélique à offrir ses millions à des malfrats, la banque s’approprie toute somme d’argent transitée sur son compte, notamment 1.750.000 FCFA le 28/10/2010, 185.000 FCFA le24/01/2011, 804.201 FCFA le 09/05/2011. Pis, la banque prélève des intérêts s’élevant à plus de 150.000 FCFA/mois, soit plusieurs millions au bout de 2 ans.
Après tout, la BCS va jusqu’à vouloir hypothéquer ses biens. Il y a pourtant lieu de trouver des réponses aux questions en suspens dans cette affaire.
La BCS a-t-elle commis oui ou non une faute professionnelle en payant les trois faux chèques sans vérifier au préalable la conformité de leurs signatures et cachés ?
Autrement, la BCS, à travers son agent de caisse, en s’abstenant de prendre toutes les précautions qui seraient nécessaires pour que son activité ne cause pas de dommage à autrui, ne manque-t-elle pas à son obligation de vigilance ?
Le refus inexpliqué de créditer le compte de M. Traoré lui a causé oui ou non des préjudices ?
En tout cas la loi N°87/31 ANRM du 29 août 1987 est claire là-dessus dans son article 125 : ” Toute personne qui, par sa faute, même d’imprudence, de maladresse ou de négligence cause à autrui un dommage est obligée de le réparer “. Et l’article 129 de la même loi précise la voie à suivre par le juge : ” Le juge apprécie le fait et qualifie la faute par rapport à la conduite d’un homme prudent et diligent, en tenant compte des circonstances de l’espèce “.
Pourtant, dans cette affaire, c’est la BCS qui s’en tirait à bon compte, et puisque les voleurs n’ont pas remboursé les sous qui seraient destinés au client, ce dernier demeure la victime commune de la BCS et des voleurs. Et il lui était demandé de rembourser ce qu’il n’a jamais perçu de la part de la banque, en plus de prélèvements alors injustifiés.
C’est pourquoi M. Issaka Traoré s’est pourvu en cassation le 09 mars 2012. Et la Chambre commerciale de la Cour suprême, dans son audience du 18 juin 2013, présidée par son Président M. Dramane Coulibaly, a rendu l’arrêt dont la teneur suit :
” En se déterminant ainsi, sans constater l’indemnisation effective de Issaka Traoré, encore que la condamnation des délinquants à réparer le préjudice par eux causé à la victime n’exonère pas la banque dont la responsabilité est à rechercher dans l’exécution de la convention qui la lie à Issaka Traoré à travers les agissements de certains de ses agents qui, du reste n’ont pas fait l’objet de poursuites pénales, les juges d’appel ont insuffisamment motivé leur décision qui, pour ainsi dire, viole les dispositions des articles 113et 125 du Régime Général des Obligations.
Par ces motifs, la Cour casse et annule l’arrêt querellé, renvoie la cause et les parties devant la Cour d’Appel autrement composée “.
Ainsi se poursuit le regrettable accrochage entre la BCS en panne de responsabilité et alors de crédibilité et sa victime qu’elle a livrée (jusqu’ici impunément) aux délinquants. Malheureusement pour la BCS, Kadhafi est mort, Att est en exil à Dakar, les temps ont vraiment changé, Ibk ne blague pas, les juges ont l’information selon laquelle nul n’est et ne sera au-dessus de la loi. Qui vivra verra.
Affaire à suivre !
Mamadou DABO
Ici quand les voleurs prenent de l’argent sur ton compte bancaire avec des cheques falsifies ou avec de signature falsifiee du titulaire c’est la banque qui te rembourse sur le champ parce que c’est leur travail de verifier la signature du titulaire et l’identite de la personne qui encaisse le cheque.
C’est ce que j’appelle corruption en chaine parce que quelque part la banque aussi est victime a causse du policier qui a fait la carte d’identite illegale. Mais cela n’empeche la banque porte plainte contre la police et rembourse Mr. Traore.
C’est ce qui arrive souvent au lieu de former les personnes appropriees avec la qualification, au contraire on embouche des jeunes filles qui donnent de la bonne chose (le petite zero) au boss et meme souvent le boss et le manageur se cassent la gueuele pour ce Free Zero facile avoir alors qu’ils sont maries.
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