Après les heures chaudes de la médiation : Le retour à la case raison

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La diplomatie possède, dans ses cartons, des trésors « de sémantique signifiante » où se révèlent les rapports de forces entre groupes, entre nations. La médiation burkinabé n’était pas des plus aisées, et si tout était codé, avec la semaine qui commence, rien ne sera plus indéchiffrable.

La médiation (mais toutes les médiations le sont- elles ?) est un chemin vers quelque chose qu’on ne connaît pas. Si rien n’était donc gelé entre la CEDEAO et nous, s’agissait-il tout au plus d’un petit coup de froid, comme l’on dit ? Le week- end dernier, Les rues de Bamako nous ont fait remonter à d’autres souvenirs. Nous étions encore des tout-petits, et les anciens nous rappelaient que lors du vote au référendum sur la communauté française (1958) de De Gaulle, les rues de Bamako se sont retrouvées un moment aussi avec des tracts appelant à voter non. A la vielle de l’arrivée, dans notre capitale, des émissaires de la CEDEAO, partout, on retrouve, comme au piquet, des affiches « Dioncounda, dégage ! ». Tout ça pour nous dire quoi ? Que le retour à l’ordre constitutionnel pouvait attendre, que la satisfaction des Bamakois ne pouvait survivre à la nuit des atermoiements de la médiation CEDEAO, de nos politiciens et enfin devant les promesses non tenues (mais lesquelles donc ?). On attendait les députés ; Bagadadji vient de voter la loi d’amnistie qui rend cette fois-ci (n’en déplaise) les putschistes et associés orphelins du reste de leurs ambitions. Cela mettra de l’huile dans les rouages des prochaines négociations. Or cela manquera aussi à leur biographie. Rien n’étant jamais acquis, les militaires ont vécu des semaines à partager leur confiance entre plusieurs parce qu’ils n’arrivaient pas, on s’en doute, à lire clairement dans le jeu ouvert des autres. Que n’avons- nous pas perdu du temps avant le vote de cette amnistie où cette loi est allée encore plus loin en listant ? Avant d’en arriver là, ceci avait débouché, depuis leur irruption sur la scène nationale, sur ce formidable marché d’anormalités, la tension vécue au quotidien.

La situation actuelle est difficile pour renoncer aux fonctions d’autorité

L’Art est-il avant tout une question de virgules ? Les jeunes militaires de Kati allaient devoir s’en souvenir car dans leur recherche de ne pas s’en laisser conter dans les négociations avec nos amis de la CEDEAO, ils allaient en imposer avec ce « passage clivant » actuel de la convention nationale à venir. Or, si tout le monde ne se ralliait pas à l’idée, tous étaient cependant attirés par le miel de la « solution malienne » qu’on pouvait en attendre. Le Capitaine Sanogo ne nous a pas toujours fait la même impression, mais on avait fini par comprendre qu’ici, il tricotait des confusions. Un appel à une Convention hors de l’Accord-cadre, n’était-ce pas la réponse du berger à la bergère communautaire ? Une attitude qui peut nous rappeler l’intransigeance des gens modestes quand ils font parler leur orgueil. La politique, ainsi comprenait-il le Capitaine du CNRDRE, n’est ni une logique, ni une morale, mais bien une dynamique que les adversaires du CNRDRE devaient mesurer à leurs dépens. A son tour, pouvait-il en attendre de ce marketing politique de la convention pour devenir « présidentiel » ou présidentiable à la tête de la transition ? Au moins, il aura personnellement résolu un problème que de ne pas s’enfermer dans une seule tactique quand il devait en mener deux de conserve. Sanogo s’était déjà montré assez sonore et spontané pour détester les prévenances doucereuses de certains de nos Chefs d’Etat si attentifs à nous apporter des soins. Kati s’était montrée dure à la manœuvre : le Général Bassolé et les autres médiateurs s’en sont rendu compte lors des entretiens passés. Cet exemple où une fois cela a pris plus de trois heures d’horloge, et le Capitaine Sanogo, derrière la porte de la salle des entretiens, a dû lui-même venir parler aux siens piaffant d’impatience et sûrs de leur bon droit. Le ministre d’Etat ivoirien, Kablan Dunkan,  en savait quelque chose en revenant sur les échecs passés de la médiation après tous les actes de défiance posés par le CNRDRE. Après deux jours de réunion à Abidjan, après avoir rejeté l’idée de la convention, la médiation CEDEAO reviendra sur de nouvelles conditions de médiation en nous rendant visite ce samedi 19 Mai en attendant l’imprimatur de la conférence des Chefs d’Etat. Jusqu’ici, la CEDEAO restait sur ses lignes et ne baissait pas la garde pour ne rien entamer de sa crédibilité et de son audience sous-régionale. On apprend les multiples démarches de part et d’autre pour faire aboutir les points de convergence. Ainsi, les récentes visites de l’ancien ministre Soumeylou B. Maïga à Paris, puis à Ouagadougou. On apprend que Compaoré a déjà pris langue avec les trois composantes de l’occupation nordiste au Mali. La situation actuelle, avons-nous dit plus haut, et comme disait Shakespeare, « il y a peu de choix à faire parmi les pommes pourries ». Pour le reste, on a des décisions à prendre qui ne devront point fâcher par ces côtés : leur élaboration confidentielle, la décision et l’imposition arbitraire. On a tout deviné et de nos militaires, et de nos politiciens, à travers des chuchotements. C’est alors qu’il nous a été facile de les reconnaître. Certains avaient un passé, et toujours pas de destin. Le passage du Chérif Haïdara, venu de ses terres de Nioro du Sahel à Kati, a été un de ces moments où l’espoir retrempait. Moins vu qu’un adoubement mais plus qu’une marque de considération, l’hôte des lieux lui retournera la politesse en lui faisant cadeau d’un superbe cheval tout blanc. Les bénédictions faites à l’endroit de tout le peuple malien auront terminé la procédure. Non sans qu’on y ajoute ici que la sagesse est tout sauf un remède que l’on peut avaler.

S. Koné

 

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