Depuis l’accession du Mali à l’indépendance, le secteur des infrastructures a été régi par différents plans quinquennaux, projets et politiques pour booster et promouvoir son développement. Quels résultats 60 ans après.
“Bien avant l’indépendance en 1960, le Mali disposait d’un patrimoine routier, géré par une administration routière assurant son développement et son entretien. Ce patrimoine comprenait des routes, revêtues ou non, et des pistes améliorées ou rurales”, précise Mary Traoré, ingénieur de construction et ancien directeur général adjoint de l’Ageroute à la retraite.
En 1960, le Mali ne disposait, que d’un réseau routier d’environ 4 000 km dont 370 km de routes bitumées et 3 630 km de pistes mal entretenues et difficilement praticables en toutes saisons.
En 1971, suivant la loi n°05-041 du 22 juillet 2005, le réseau routier du Mali a été classifié en : routes d’intérêt national (RN), Routes d’intérêt régional (RR), Routes d’intérêt local (RL), Routes d’intérêt communal (RC).
De 1960 à 1992, le Mali a réalisé de vastes programmes, avec le Fonds européen de développements, Fed, et l’Usaid.
À la fin du 5e projet routier, le réseau du Mali comprenait 2 500 km de routes bitumées, 1 500 km de routes en terre moderne, 3 000 km de pistes améliorées pour un montant de 500 milliards de FCFA.
“Depuis 1994, le gouvernement du Mali a entrepris de nombreux projets de réformes dans le secteur des transports, et ce, selon une approche sectorielle mise en œuvre dans le cadre du Projet sectoriel des transports (PST). L’élément de base des réformes entreprises dans le secteur des transports est la déclaration de politique générale dans le secteur des transports, adoptée en 1993”, explique Mary Traoré.
Sa mise en œuvre a débouché sur la conception et la réalisation du PST dont les principaux objectifs dans le sous/secteur routier étaient : “entretien courant d’un réseau prioritaire de 9 000 km pour 24,66 milliards de F CFA, entretien périodique et réhabilitation de 4 011 km pour 102,384 milliards de F CFA, pistes rurales et bacs (185 km et 4 bacs) pour 4,07 milliards de F CFA, voirie urbaine de Bamako (10 km) pour 10,33 milliards de CFA, études et supervision (848 km) pour 945 millions de F CFA, achat de matériel d’entretien courant pour 3,00 milliards de F CFA”.
En 2002, le Mali a mis un cachet particulier sur son désenclavement intérieur et surtout extérieur vers les ports (Abidjan, Conakry, Dakar, Nouakchott, Alger, Tema et Accra, San-Pedro). La Direction nationale des travaux publics (DNTP) qui devient la Direction nationale des routes (DNR), a procédé à la création d’une société de location de matériels des TP, d’un fonds d’entretien routier dénommé Autorité routière (AR), d’une Agence d’exécution des travaux d’’entretien routier pour assurer la maîtrise d’ouvrage déléguée (Ageroute), la mise en place d’une banque de données routières avec la création d’une structure rattachée à la DNR, appelée Service des données routières (SDR).
Après la relecture de l’ordonnance n°13 du CMLN sur les réformes de 1973, la gestion du réseau routier fut dévolue à 3 entités qui sont la DNR, l’AR et l’Ageroute et ces réformes ont été réalisées, excepté la création d’une société de location de matériels des TP.
La DNR fait la planification et la réalisation des travaux d’aménagement, de réhabilitation, d’entretien périodique et de construction des routes et elle assure également, à travers le SDR, la programmation des travaux d’entretien courant des routes et la supervision de leur mise en œuvre. L’AR est l’organe de financement des travaux d’entretien routier et l’Ageroute est chargée de la mise en œuvre des travaux d’entretien routier.
Le réseau routier est caractérisé aujourd’hui par un vieillissement nécessitant une réhabilitation intégrale, excepté les routes nouvellement reconstruites. Il dépasse le niveau de l’entretien courant.
Aussi des besoins de désenclavement de nombreuses zones de productions agricoles et minières où vivent de nombreuses populations sont vivement demandés.
“La mise en place d’une nouvelle stratégie pour la réhabilitation, l’entretien périodique et la construction des routes, de façon progressive, peut être faite. L’instauration d’un système sans corruption, l’adoption d’une attitude de rigueur, l’inventaire effectif des besoins, la planification efficiente des interventions, la mobilisation des ressources financières nécessaires, l’application rigoureuse de la réglementation, l’exploitation du réseau de façon normale” sont entre autres des actions qui peuvent être menées, conclut Mary Traoré.
Aminata Agaly Yattara*
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MALI, 60 ANS APRES
L’envers du décor au niveau des infrastructures
Les infrastructures jouent un rôle crucial dans le développement et comprennent tout le matériel d’équipement durable, nécessaire à l’économie du travail. Au Mali, les équipements répondent-ils aux besoins des populations ?
La question de la qualité des infrastructures a été une problématique véritable au niveau du ministère de tutelle. “Il faut avouer la pression des partenaires techniques et financiers qui nous exigeaient des normes liées à des questions de rentabilité. La qualité de nos infrastructures était bonne mais, les standards n’étaient pas appropriés, ce qui a créé beaucoup de problèmes. Cela n’assurait pas la durabilité des infrastructures”, confie Kéita Nama Mamadou, directeur national des routes.
Par la suite, des réflexions ont été faites pour engager des campagnes d’explications aux partenaires qui seront notamment pris en compte si des routes doivent être réalisées. La nécessité de réaliser des infrastructures qui répondent aux besoins réels des usagers et qui puissent assurer leur durabilité, restent au cœur des échanges surtout à chaque fois qu’il s’agit de constructions d’infrastructures routières. C’est ainsi qu’une politique sectorielle a été élaborée et adoptée en février 2016. Ladite politique en matière de transport a donné une orientation claire et nette sur les questions de la qualité des infrastructures routières qui doivent être réalisées et rendues aux populations maliennes. Et c’est ainsi que les standards de constructions de routes ont été relevées pour ramener aux normes qui peuvent faire face aux besoins réels.
Pour le directeur national des routes, les mutations dans les standards des routes ont fait couler beaucoup d’encres parce qu’avant, les gens ne comprenaient pas les montants aussi élevés.
Selon le directeur des routes, les proportions sont entre 100 000 000 F CFA et 150 000 000 F CFA le kilomètre de route. “Tout dépend encore de la nature et de la morphologie du terrain”, précise-t-il.
Le Mali a un réseau routier de 89 000 kilomètres, reparti entre l’Etat central représenté par la DNR à travers le ministère en charge des routes qui s’occupe de 14 000 kilomètres.
Chaque entité étatique, que ce soit l’Etat central ou les collectivités, chacun a son patrimoine routier avec les cartes d’identités bien claires et nettes de chaque route. Mais sur ce patrimoine routier, le problème est que plus de 4000 kilomètres de ces routes ont été réalisés avant et doivent être obligatoirement reprises par ce que leur durée de vie est écoulée.
Pour notre interlocuteur, rien que pour le district de Bamako, un programme routier de 700 milliards de F CFA pour le renouvellement des routes est en projet. Pour les programmes de routes, cette somme est à portée de main, s’il n’y avait pas la crise sociopolitique, qui impacte les décisions techniques, les partenaires sont disposés.
“Les visions politiques, les stratégies et les plans d’actions sont déjà réfléchis pour mettre un terme à tout ça. Mais, il est important que le Mali retrouve sa stabilité afin que ces actions véritables de développement de notre pays puissent être entamées”, affirme M. Kéita.
Aminata Agaly Yattara