‘’Jusque-là, la musique ne m’a rien apporté. Peut-être que j’y suis prédestinée. Sinon, j’ai envie d’arrêter. Je n’ai pas l’intention de faire une autre cassette’’. Celle qui tient ces propos s’appelle Sata Kouyaté. Pour ceux qui ne la connaissent pas, il suffit de rappeler ‘’Niéba’’, le titre de son premier album qui a été une réussite ou même ‘’Guèlèya ‘’ qui, présentement, fait son petit bonhomme de chemin. Elle s’est confiée à ‘’mœurs’’.
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Qui est Sata Kouyaté ?
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Je suis originaire du Wassoulou parce que mes ancêtres viennent de là-bas. Cependant, ils se sont installés il y’a longtemps à Banankoro, derrière Sénou où ils avaient leur plantation. Je n’étais pas encore née.
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C’est dire que vous ne connaissez pas le Wassoulou ?
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Pas tellement. Je suis née à Banankoro et j’y ai grandi.
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Qui sont vos parents ?
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Mes parents sont Souleymane et Djénéba Kouyaté. Ils sont tous les deux des griots, mais qui ne savent pas chanter, car ils ne sont pas des artistes. Cependant ils savent faire l’éloge des gens et c’est ce qu’ils font.
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Qui vous a donc appris à chanter ?
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Je peux dire que tout est question de destin. J’ai été élevée par ma tante paternelle, Salimata Kouyaté, qui est la coépouse de la mère de Mah Kouyaté n°2, Fanta Kamissoko. Puisque, chez nous, il n’y a pas de rivalité, je dirai qu’elle est ma mère. C’est elle qui faisait des tournées et je partais avec elle généralement pour m’occuper de son bébé.
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Alors, comment vous y êtes- vous pris ?
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Rien de particulier. Ce qui doit arriver arrive forcement. Je peux même dire que la musique est un peu mon destin. Ma tante chez qui j’étais m’empêchait même de fredonner les chansons, bien que son mari jouât les instruments. Elle ne savait pas chanter.
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Quand j’étais aussi avec la mère de Mah, c’était uniquement pour prendre son bébé. C’est quand je partais voir mes parents à Banankoro que j’animais des petites soirées et beaucoup de gens m’appréciaient.
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C’est ainsi qu’après mon mariage, je continuais à animer les cérémonies mais, jusque-là, l’idée de sortir une cassette ne m’était pas venue à l’esprit. A l’époque même, quand je rentrais un peu tard après une cérémonie, mon mari se mettait en colère.
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Je suis plus axée sur les chansons du Wassoulou et j’accompagne aussi Oumou Sangaré dans ses chansons. Les habitants de Banankoro aiment la musique du Wassoulou.
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Qui vous a donc encouragée ?
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C’est Mady Diallo, paix à son âme ! Il était un grand joueur du « n’goni », instrument traditionnel de chez nous. C’est à l’occasion d’un « soumou » qu’il ma remarquée et est allé voir une de mes connaissances pour pouvoir m’approcher.
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Un jour, lors d’une causerie, il m’a demandé si je pouvais chanter quelque chose qui illustre le comportement de ‘’Djèman’’ et de ‘’Fiman’’. J’ai dit oui. ‘’Djèman’’ est extravertie contrairement à ‘’Fiman’’ effacée, ce qui lui permettait de s’accaparer de tout ce que leur mari apportait au détriment de l’autre. C’est ainsi qu’est né mon premier album intitulé ‘’Nièba’’ – entendez celle qui n’a pas froid aux yeux
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A cette époque, ceux qui m’écoutaient pensaient que je chantais pour moi-même alors que je n’avais pas de rivale. C’était en 2004. La cassette comportait 8 titres.
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Et le second, c’est-à-dire celle qui est présentement sur le marché ‘’Guèlèya ‘’?
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J’ai chanté ‘’Guèlèya’’ j’ai vécu trop de difficultés et je suis toujours dedans d’ailleurs. Je chante ma propre histoire. J’ai remarqué que la vie devenait de plus en plus difficile pour moi et que tout ce que j’entreprends est, si je peux le dire ainsi, vouéà l’échec. Je ne vois pas les retombées de tout ce que je fais. C’est vraiment dur.
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J’étais donc assise chez-moi en train de réfléchir et je parlais à mon instrumentiste, des problèmes que je vis. Il a aussitôt commencé à jouer et je me suis mise à chanter. Ça a été la dernière chanson de l’album que je venais de composer, pourtant c’est elle qui a plu.
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Je dis dans cette chanson que tout ce qui arrive à l’homme, il faut le confier à Dieu parce que lui seul a la solution. Sinon, si tu veux faire autrement, tu risques d’avoir des ennuis plus graves. Donc la meilleure solution, c’est d’avoir la foi.
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Cette cassette aussi comporte 8 titres et j’ai composé mes chansons toute seules
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‘’Guèlèya’’ pour vous donc,… ?
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C’est beaucoup trop de choses. Tu vas trouver que certaines personnes ont beaucoup d’argent. Mais les problèmes qu’ils ont, l’argent n’y peut rien. D’autres aussi ont des problèmes, mais n’ont pas d’argent pour les résoudre. C’est très mauvais. J’ai chanté par rapport à mes problèmes personnels mais en réalité chacun plus ou moins s’y retrouve.
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Un soulagement ?
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Oui, beaucoup. C’est comme si je suis libérée.
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Vos deux chansons sont un peu tristes…
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Oui, parce que j’ai vécu trop de difficultés et ça continue.
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Quel âge avez-vous aujourd’hui?
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J’ai 32 ans.
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Vous êtes mariée ?
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J’étais mariée mais j’ai divorcé. Aujourd’hui je suis fiancée à une autre personne dont je préfère taire le nom.
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Des enfants ?
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Oui, j’ai deux enfants.
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Qu’est-ce que vous aimez le plus?
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La droiture. Parce que, de nos jours, les gens ne disent plus la vérité. On passe le temps à se tromper.
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Ce que vous n’aimez pas ?
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La trahison
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Est-ce que vous avez des regrets aujourd’hui ?
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Oui. Jusque-là je ne sais pas où j’en suis. Je ne vois pas les retombées de tout ce que je fais. On te voit chanter, tu sors des cassettes. Tout le monde pense que tu as l’argent alors que tu n’as rien.
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Même pas un moyen de déplacement. Quand on te voit aussi prendre la Sotrama, on se moque de toi.
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Je regrette de m’être lancée sur ce chemin. Je ne sais même pas si je peux continuer en tout cas je n’ai pas envie.
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Binta Gadiaga
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