Pour consolider sa renommée grandissante, aussi bien au Mali que sur la scène internationale, Samba Touré peut compter sur Crocodile Blues. Le nouvel album du chanteur et guitariste songhaï, qui fut l’élève d’Ali Farka Touré, séduit en étant sobre mais jamais austère.
samba Touré a commencé à travailler à Crocodile Blues en 2010. Il participait alors à la tournée Ali Farka Touré Variations, sur laquelle il avait été embauché par son compatriote koriste Toumani Diabaté, afin d’y apporter "l’esprit du maître". Cela lui a permis de se sortir d’un environnement musical marqué par l’identité mandingue pour se replonger dans sa culture songhaï, tout en célébrant la diversité malienne qui est – en filigrane – le thème de ce nouvel album.
Le contexte du cinquantenaire de l’indépendance du Mali a marqué la plupart des chansons, nées à cette période. Ici, l’artiste évoque les Peuls (Pullo) ; là, il salue le courage de ces Soninkés qui vont à l’étranger au péril de leur vie (Khadagole) ; là encore, il fait part de ses espoirs de paix et de stabilité pour la région septentrionale du territoire, où se situent Tombouctou et Kidal (Jingarr Hinné).
Le natif de Dabi, village situé sur les bords du Niger, à quelques kilomètres de Niafunké (dont le nom reste associé à celui d’Ali Farka), convie aussi la "sudiste" Oumou Sangaré. La présence de celle qu’on surnomme "la reine du Wassoulou" s’impose quasiment sur Moussoya, titre qui rend hommage aux femmes et à leur action pour le développement du Mali.
La maturité artistique de Samba Touré, 43 ans, s’exprime encore davantage que sur son précédent CD, Songhäi Blues – Homage to Ali Farka Touré, signalant son arrivée sur le marché international. Son expérience passée, dans des groupes dont le répertoire avait une dimension moins culturelle, se devine entre autres dans sa façon de structurer ces morceaux en vraies chansons.
Alabina, en ouverture de Crocodile Blues, est une invite idéale à aller plus loin. Avec ses complices de longue date, à la basse et aux percussions, le chanteur guitariste sait éviter le piège de l’aridité qui guette les bluesmen traditionnels. Le travail soigné sur le son y contribue. Il crée une sensation de relief, donnant à entendre chaque nuance des instruments, chaque voix. Tout est si proche, le décor semble si réel qu’il n’est même pas nécessaire de fermer les yeux pour se laisser transporter !
Source RFI