Rokia Traoré, star de la musique malienne : Africaine influente et engagée au service de l’humanité

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Rokia Traoré
Rokia Traoré

Chanteuse malienne auréolée de nombreux prix, militante permanente et probablement l’une des artistes africaines les plus médiatiques dans le monde ! C’est ainsi que Jeune Afrique l’hebdomadaire panafricain a élu Rokia Traoré parmi les «Les 50 Africaines les plus influentes au monde» en 2014.  Une juste reconnaissance de l’engagement d’une artiste qu’on a vue récemment aux côtés du chanteur irlandais Bono lors d’un gala de soutien pour l’Africa Center de New York lancé par Hadeel Ibrahim. Mieux, avec son dernier album, «Beautiful Africa» (2013), Rokia Traoré consolide son attachement à ses racines, à l’Afrique et au pays qu’elle aime tant. Le titre «Beautiful Africa» de cet opus est aussi le vœu d’une nouvelle gouvernance sur le continent. Ainsi, quelques mois avant la révolution burkinabè, Rokia ne cachait pas son espoir qu’une «partie de la société civile prenne les choses en main» en Afrique. C’est dire que le départ du président du Faso, Blaise Compaoré «sous la pression d’un peuple en manque d’alternance», ne peut que la conforter. Cette reconnaissance est un tournant dans le combat d’une star qui, à 40 ans, ne cesse de s’engager davantage en faveur de bonnes causes comme l’émancipation des femmes, l’éducation des enfants, la paix et l’unité nationale, l’intégration africaine. Ce n’est pas fortuit si elle est sollicitée par des organisations internationales qui ont besoin de son image pour soutenir leurs campagnes de plaidoyer et de lobbying.

Star et Ambassadrice

À cause de son engagement pour les femmes et les enfants, disons de la cause humaine, Rokia Traoré est maintenant «Ambassadrice» du Haut Commissariat des Nations unies chargé des Réfugiés (UNHCR). C’est ainsi qu’elle a effectué une visite émouvante et mémorable aux réfugiés maliens du Camp de Goudoubo, au Burkina Faso. Le camp accueille quelque 10 000 réfugiés maliens qui ont fui le pays au début de la rébellion en janvier 2012. «Ce qui rend cette situation particulière, c’est que le Mali est ma maison et j’ai également ressenti les effets de cette crise qui m’a forcée à changer aussi ma vie», a déclaré Rokia Traoré à son arrivée, accueillie par Marie-Louise Kabré, responsable du bureau HCR de Dori. «Je veux entendre ce que les gens ont à dire et en apprendre davantage sur ce qui leur est arrivé et essayer de montrer que nous sommes tous un. Je veux essayer d’apporter leurs voix aux décideurs qui peuvent changer leur vie», avait ajouté la jeune star. Elle a rappelé que, en Afrique, «nous avons une tradition que lorsque quelqu’un de votre famille est malade ou a besoin de vous, vous lui rendez visite. Je suis venue ici rendre visite à mon peuple, des Maliens comme moi, et d’essayer de les soutenir dans cette épreuve douloureuse».

Très émue, Rokia avait ensuite déclaré, «j’ai pris le temps de réfléchir. Je suis venue pour entendre et comprendre les histoires des réfugiés. Je suis venue demander la paix. Je suis venue demander aux gouvernements, organismes d’aide et aux bonnes volontés de ne pas oublier les réfugiés maliens. Il y a encore 167 000 d’entre eux entre le Burkina Faso, la Mauritanie et le Niger. Je suis venue voir si je peux aider à soutenir les réfugiés».

Une carrière en pleine ascension

Un cri de compassion suivi d’un véritable coup de gueule. «Dans un monde où nous dépensons de vastes sommes d’argent pour les produits cosmétiques, les jouets, l’électronique, alors que, ici, les gens n’ont rien. Je trouve difficile à croire que le reste de l’humanité ait vu leur situation et qu’on permette à cette situation de continuer». Aussi, être engagée aux côtés de l’Agence des Nations unies pour les réfugiés, est-il tout simplement «la bonne chose à faire» pour attirer l’attention sur le calvaire de ces réfugiés. «Braquer les projecteurs et mobiliser l’aide de quelle que manière que je peux est une réaction naturelle que tout humain doit avoir pour l’autre», assure Rokia. Malgré cette omniprésence sur le terrain humanitaire, Rokia Traoré continue aussi de sillonner le monde pour donner une autre image du Mali et de l’Afrique à travers son immense talent artistique. Un domaine où les reconnaissances ne manquent pas non plus pour la Rossignole du Bélédougou.

En effet, en novembre dernier, Rokia Traoré a reçu le «Grand prix SACEM 2014» en France pour son 5e album intitulé «Beautiful Africa». La cérémonie de remise de cette distinction a eu lieu le 24 novembre à l’Olympia, à Paris (France). Une nouvelle récompense qui couronnait la maturité d’une artiste engagée. Décernée par la société des auteurs, compositeurs et éditeurs de musique (SACEM), ce «Grand prix» est l’une des plus prestigieuses distinctions du showbiz international. Elle couronne le succès planétaire d’une œuvre, «Beautiful Africa» ! Un titre qui traduit aussi l’engagement panafricaniste de la star du Bélédougou. Réalisé par l’Anglais John Parish, Beautiful Africa a été bien accueilli par les critiques qui le considèrent comme «le cinquième jalon discographique d’une trajectoire unique en son genre et tracée sous le double signe de l’exigence et du plaisir». Il est vrai que Rokia y réaffirme son inébranlable volonté d’échapper aux carcans des genres. Et cela avec «toute la spontanéité qui fonde son inspiration».

La perpétuelle quête de liberté et d’indépendance

«De ce disque épuré de tout superflu jaillit cette évidence : la musique est bel et bien pour Rokia Traoré ce bain naturel dont nulle force contraire ne saurait l’extraire ni la priver», admirait un critique français à la sortie de l’album le 1er avril 2013. Il ajoute, «cette certitude chèrement acquise, cette enfant de la noblesse bambara l’exprime avec une joie toute féroce dans le texte de Sikey, où elle semble rugir sa passion éperdue pour son art». Tout son parcours musical semble faire donc écho à cette expérience, qui lui a permis d’éprouver à la fois «la solidité des racines et la beauté du mouvement, la valeur inaltérable de l’inné et la richesse toujours recomposée de l’acquis». Il faut aussi dire que toute la carrière de l’artiste a jusque-là été une quête perpétuelle de liberté, d’indépendance dans sa création artistique afin d’échapper aux préjugés. «Dès mon premier disque, j’ai compris que dans le milieu de la musique il y avait des cases et qu’il fallait y entrer. Depuis, je lutte contre ça, parce que c’est une vision des choses qui, tout simplement, ne m’arrange pas», nous disait-elle lors de nos nombreux entretiens. Elle avait poursuivi, «si je devais m’y plier, j’aurais intérêt à arrêter immédiatement la musique. Je ne sais pas la jouer comme ça. Cela ne fait tout simplement pas partie de ma formation».

Rokia Traoré est par ailleurs très investie dans la Fondation Passerelle, qu’elle a créée en 2009 et dont le but est de «soutenir le processus d’organisation et de développement de l’économie de la musique et des arts de la scène au Mali». Avec autant de cordes à son arc, Rokia Traoré est sans doute la meilleure référence pour la jeune malienne et africaine en quête de repères pour assumer sa partition dans le développement équitable du Mali et de l’Afrique !

Moussa BOLLY

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