Longtemps éloignée des scènes et des studios d’enregistrement par la maladie, Kandia Kouyaté fait un brillant come-back avec un somptueux album : Renaissance ! Le titre est évocateur pour une grande cantatrice qu’on annonçait perdue pour la musique.
Renaissance ! Tout un symbole pour baptiser un album qui ramène une cantatrice sur scène, donc à la vie. Etre éloignée de la scène équivaut presqu’à la mort pour une Ngara, gardienne des traditions et des valeurs ancestrales. Et Kandia Kouyaté est l’une de ses rares artiste-cantatrices extraordinaires qui possèdent encore une aura de «majesté paranormale». Victime d’un accident vasculaire cérébral (AVC), il y a 11 ans, elle ne pensait pas rechanter. Pis, les mauvaises langues avaient annoncé sa «mort» à plusieurs reprises dans la capitale malienne.
Mais, soutenue par le producteur Ibrahima Sylla (Syllart Production), l’artiste/cantatrice ne s’est pas laissé abattre. C’est donc un immense plaisir et un profond soulagement d’entendre Kandia Kouyaté, d’assister à son retour dans les bacs et sur scène, d’être témoins de sa Renaissance. Koala Boumba, Maliba, Kassi Doundo (le coq), Mogoya Douman (humanisme), Dakolo (hommage à Mamadou Lah dit Madou Dakolo), Konoba Doundo (gros oiseau), Tiéfaring (hymne à la bravoure), Sadjougoulé (la santé est un trésor), et Mandjala (foulard) sont les magnifiques souffles de vie de cette renaissance.
C’est surtout avec une grande émotion que les fans vont savourer Sadjougoulé dont le clip est au sommet des hits sur les réseaux musiques comme Youtube. Dans cette chanson qui donne facilement la chair de poule, la Fée de Kita Kuru prend l’exemple sur elle-même pour rappeler au monde que «seule la maladie est le vrai ennemi de l’Homme». «Cette vie est courte. Quand je pense à hier et me regarde aujourd’hui, je loue Dieu pour ma vie et ses bonnes actions», chante-elle avec beaucoup de dévotion et de reconnaissance. Une reconnaissance à sa famille, à tous ses Jatigiw (Nobles et mécènes), aux autorités maliennes et marocaines et à toutes les personnes en Europe et en Asie qui l’ont soutenue dans cette période difficile de sa vie. «Vous trouverez vos vrais amis quand vous êtes dans le besoin», rappelle Kandia.
Dans cette chanson, la cantatrice se réfère au Saint Coran et à l’histoire du Prophète Ayouba qui a longtemps été handicapé par de nombreuses affections sans jamais perdre la foi. Au finish, pour le récompenser de sa fidélité, «Dieu lui a redonné sa santé en plus de la richesse», rappelle-t-elle. Le titre «Maliba» est naturellement dédié au Mali, au «Cinquantenaire» de son accession à l’indépendance. Elle chante la joie que l’indépendance et la démocratie ont procurée au peuple malien. L’occasion pour Djéli Kandia d’inviter Maliens, jeunes et vieux ainsi hommes et femmes, à se lever et travailler assidument pour conforter cette souveraineté.
Un bel hommage posthume à Ibrahima Sylla
Enregistré aux studios Bogolan de Bamako et Soyouz de Paris (France), ce nouvel album a été produit par Syllart Production du regretté Ibrahima Sylla sous la coordination de Sékou Kouyaté. «Ce nouvel album a vu le jour parce que Sylla l’a voulu. Ibrahima Sylla était gravement malade, mais il était toujours là, dans le studio, pour m’encourager. Il m’a demandé de chanter tout ce que je savais, tout ce qui était dans ma tête. Je lui ai dit : je ne sais rien. J’ai tout oublié. Mais il a insisté», explique Kandia. Elle a relevé le défi avec une voix plus sombre, mais encore plus étincelante que celle qui a fait sa gloire en plus de 30 ans de carrière. «Renaissance», n’est pas seulement une revanche sur la maladie.
C’est aussi un bel hommage posthume au regretté Ibrahima Sylla, ce passionné de musique et de la culture mandingue, arraché à sa famille et au showbiz le 30 décembre 2013 à Paris, en France. Pour son management et la promotion du nouvel opus, Kandia a fait confiance à «MADI» (Mode, arts et développement international). Une agence de management et de promotion culturelle et artistique de la célèbre styliste malienne, Mariétou Mariette Dicko. Les deux parties sont désormais liées par un contrat portant notamment sur près de 20 concerts et l’enregistrement d’un titre pour une cause humanitaire.
Kandia Kouyaté a vu le jour en 1959 à Kita, une ancienne ville dans le sud-ouest du Mali qui a engendré beaucoup de stars de la musique moderne et traditionnelle du Mali. Elle a grandi dans les arts et les coutumes du peuple Mandé. Son père était un célèbre joueur de balafon (xylophone), tandis que sa mère était une chanteuse de Birigo. C’est dire que Kandia Kouyaté est née pour chanter. Conscient du talent et des dons artistiques de sa fille, il s’est battu pour qu’elle reçoive une éducation moderne en l’inscrivant dans une école de mission catholique. «J’ai commencé la chanson à bas âge, plus précisément à 7 ans. Je suis allée à l’école et j’ai fait 9 ans de scolarité. J’ai laissé l’école à cause de la chanson. Mon père était un joueur de balafon. Mes sœurs chantaient aussi, mais pas comme moi. Je suis née dans la chanson et j’ai appris à chanter à la maison», nous avait-elle confié lors de l’un de nos nombreux entretiens.
La lourde responsabilité de perpétuer un fabuleux héritage
Tout en excellant en mathématiques, elle a continué à chanter lors de réunions familiales et des cérémonies sociales. Quand son père est tombé malade et ne pouvait plus travailler, elle a dû faire ce qu’elle pouvait pour soutenir la famille. Kandia a ainsi quitté l’école pour rejoindre la capitale malienne, Bamako. À 16 ans, elle a rejoint un groupe d’Apollo (groupe folklorique) qui présentait un mélange de répertoires traditionnels et contemporains, locaux et étrangers.
Majestueuse et dotée d’une fascinante beauté vocale qui démentait son âge tendre, Kandia a rapidement attiré l’attention des musiciens les plus importants et des mécènes de la musique du pays comme Amary Daou (paix à son âme). Même si elle a seulement sorti quatre albums (solo) en plus de deux décennies, Kandia Kouyaté a été saluée comme l’une des meilleures chanteuses du Mali. «Kandia Kouyaté a le charisme et la puissance vocale de la plupart des chanteurs de soul américaine, même si sa musique traditionnelle de l’Afrique de l’ouest n’est qu’accessoirement liée à l’âme moderne», écrivait le très influent «New York Times» (quotidien new-yorkais, Etats-Unis), il y a quelques années.
La star a, à son actif, une dizaine d’albums (solo et collectif), notamment Amary Daou et Ngara (1993), Kita Kan (1999), Biriko (2002), Woulalé (1998), Symphonie mandingue (Live, 2011), Sa Kunu Sa (2012), The Divas from Mali (2013) et Renascence (Renaissance, 2015). Sans compter les deux volumes de «Mandekalou». En juin 2015, l’Association l’Etoile Européenne du Dévouement Civil et Militaire (EEDCM) avait décoré la Diva Mandingue avec sa prestigieuse et plus haute distinction, la «Médaille d’Honneur Echelon Or». Elle était ainsi récompensée pour son engagement dans la lutte contre «la mortalité maternelle et néonatale» ainsi que pour la scolarisation des filles. Et Kandia avait reçu sa médaille des mains de la présidente de l’association, Mme Ahn Dao Traxel, la fille adoptive de l’ancien président de la République française, M. Jacques Chirac.
Immense talent doté d’une beauté vocale rare, Kandia continue à faire la fierté du Mali, comme étant l’une des dernières Grandes Bibliothèques de notre musique, de la culture mandingue. Après le décès de l’emblématique Bako Dagnon, elle a aujourd’hui cette redoutable mission de perpétuer ce fabuleux héritage du patrimoine immatériel universel. Et Renaissance est un précieux pas dans ce sens !
Moussa BOLLY
Un bel article sur la diva de Kita, cette voix mandigue dorée. Dieu soit loué. Que Dieu accorde à Kandia une longue vie pleine de santé. Elle mérite toute la reconnaissance de l'Etat.
Un bel article sur la diva de Kita, cette voix mandigue dorée. Dieu soit loué. Que Dieu accorde à Kandia une longue vie pleine de santé. Elle mérite toute la reconnaissance de l'Etat.
Ah on est sauve merci le bon dieux
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