Musique malienne : Jacob Yacouba Salia Diarra alias Mobjack, un rappeur “atypique

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Avec un style propre à lui-même, Mobjack a su conserver sa notoriété dans un milieu de rap malien en pleine révolution, depuis plus de 10 ans. Avec seulement deux mixtapes à son actif, il reste tout de même l’un des rappeurs maliens les plus prolifiques avec plus de 200 singles produits depuis 2007, année où débute sa carrière. Bien qu’il ait connu beaucoup d’embûches sur son chemin, suite notamment à des problèmes familiaux, Mobjack n’a jamais abandonné, incarnant ainsi le courage et la persévérance.  

e son vrai nom Jacob Yacouba Salia Diarra, Mobjack se lance dans la musique, notamment le rap vers 2007, alors qu’il était encore au lycée. Faisant de la musique un exutoire, à l’époque avec un groupe d’amis, Mobjack se retrouve finalement attiré par le rap qui deviendra plus tard sa vraie passion de jeunesse. “J’écrivais des textes en ce moment et un jour l’un de mes amis, du nom de Pétison, qui aimait faire les beats, nous a proposé de venir faire un son.  Nous avons fait deux singles qu’on transférait sur les téléphones de nos amis à l’école et dans le quartier. Quelques temps plus tard, tout le lycée appréciait nos sons. On nous félicitait partout. C’était incroyable”, raconte le rappeur dont le surnom Mobjack est une création de l’artiste lui-même. A l’en croire, il l’a créé à partir de son nom Jacob (Jac) et Mob qui veut dire un gars qui se bat pour gagner sa vie à la sueur de son front. Ces deux vocables donnent Mobjack.

Avec le succès de ces singles, le groupe a été invité sur scène lors du bal de fin d’année de l’école. Ce qui fut un succès inespéré pour le groupe dont les éléments étaient devenus de “petites stars de l’école”, mais ce n’est pas encore la vie de stars car les éléments du groupe devraient passer le baccalauréat l’année suivante et il fallait s’y consacrer en mettant les textes de rap de dans les tiroirs. Cependant, une fois le baccalauréat en poche, le groupe s’éclate car tous ses éléments sont partis poursuivre leurs études à l’étranger, sauf Mobjack. “Je devrais partir aussi, mais malheureusement je n’ai pas pu obtenir mon visa cette année-là, j’ai passé toute l’année à la maison. L’année suivante, n’arrivant pas à obtenir mon visa, ma mère m’inscrit dans une université privée où je suis sorti avec une licence en Marketing-communication”, nous raconte Mobjack qui, entre-temps, poursuivait sa carrière musicale en solo. Il rejoint ensuite, vers 2011, le groupe Génération Rap Respect (GRR) avec qui il a collaboré, notamment avec Tal B et Iba One.

Du début de sa carrière à nos jours, Mobjack a enregistré plus de 200 singles ainsi que des clips à succès, notamment Nègue poussé, Dakan Té Sa,  Star Be Darala, Borou Ni Chè, ou encore Fadebila et Dictionary 1. Avec ses chansons, il s’impose dans le rap malien et fera le tour du pays à travers des concerts et des festivals. Il sillonnera également des pays de la sous-région : le Maroc, la Côte d’Ivoire, la Tunisie et le Sénégal. Il a aussi été invité par la diaspora en France et bientôt aux Etats-Unis.

Une vie qui bascule

Mais avant de connaitre ce succès dont il jouit aujourd’hui dans le rap malien, Mobjack a dû se battre sans relâche. Pourtant issu d’une famille aisée, les circonstances basculeront la vie du rappeur pour qui la musique est passée d’une simple passion à la recherche d’une affirmation de soi. Ce sont les difficultés qui ont forgé le caractère atypique du rappeur. En effet, le défunt père de Mobjack était un ingénieur en Génie Civil et sa mère est une ingénieure agronome. “Je n’ai vraiment pas été un enfant de pauvres. Nous vivions dans une cour qui faisait à peu près un demi-hectare dans le quartier de Kalaban Coro. Enfant de famille aisée, je l’ai été jusqu’au décès de notre père”, nous confie Mobjack qui se verra mis dehors avec sa mère par une décision de justice, après le décès son père.

“Un soi-disant testament aurait attribué notre maison à quelqu’un d’autre de la famille”, ajoute-t-il avec un air confus. Bonjour le calvaire pour Mobjack et sa mère qui ont été obligés de quitter la luxueuse maison et de déménager à Kati, dans une maison sans clôture où ils étaient exposés au regard des passants. “En ce moment, j’étais déjà considéré comme une star dans le rap malien, même si la notoriété n’était forcément égale à ma condition financière. Vivre avec la maman dans ces conditions me gênait énormément.

Vu que j’avais une certaine notoriété dans le milieu, cette situation avait attiré tous les regards sur moi et bonjour les clashs. En ce moment, presque tous les rappeurs me clashaient pour se faire un nom parce que j’étais mieux connu que la plupart d’entre eux. Mais aujourd’hui, tout est différent. Dieu merci !”, précise l’artiste qui vit désormais dans une luxueuse maison avec sa mère.

“On ne touche pas à ma mère”

Après les groupes de rap Tata Pound, Rabba Boys, Escrocs, King Dadia et King Massassi qui utilisaient le rap comme un moyen de dénonciation des maux de la société, les tares du gouvernement et la mauvaise gouvernance, le rap malien va connaitre une nouvelle tendance appelée “clash” vers les années 2008. Les jeunes de la nouvelle génération ne défendront presque plus les mêmes causes que leurs prédécesseurs. Il fallait à l’époque faire de l’égotrip (c’est moi le meilleur) ou le clash pour être en vue. Cette tendance coûtera quatre (4) mois de prison à Mobjack qui était à l’époque l’un de ses fervents partisans.

En effet, en mars 2014, Mobjack est arrêté et incarcéré à Bamako pour “agression à domicile et dentition illégale d’arme à feu”. Sa victime du jour ? Le rappeur Snipper qui avait proféré des injures contre la mère de Mobjack dans l’une de ses chansons. Furieux, ce dernier avait débarqué chez lui pour l’agresser. Snipper ripostera avec une plainte pour agression à domicile et Mobjack fut arrêté et incarcéré.

“Dans le clash, on peut s’insulter entre nous, mais pourquoi mêler nos parents dans nos bêtises. Il a insulté ma mère et je n’ai pas pu digérer cela. Je suis donc allé lui régler son compte chez lui. On ne touche pas à ma mère, surtout pas dans les clashs entre rappeurs”, nous explique-t-il

Après sa sortie de prison, en juin 2014, fortifié et inspiré, Mobjack retrouve vite sa marque. Aujourd’hui, il est toujours considéré comme l’un des rappeurs le plus en vue après dix ans de carrière dans le haut niveau du rap Mali.

Son dernier single Ne Halala, sorti en février dernier, connait un véritable succès auprès de la jeunesse malienne.

Il veut dépasser les singles car son tout premier album, en gestation, s’intitulera Porte Bonheur. “Mais il prendra du temps parce que je veux qu’il soit l’un des meilleurs du rap malien”, nous glisse-t-il. Sur cet album, le rappeur souhaiterait collaborer avec plusieurs stars de la musique malienne et ferait la part belle aux instruments traditionnels maliens.

Fondateur de l’association caritative ‘‘An Ka Djè Ka Ou Dèmè” créée en 2014 et qui vient en aide aux personnes diminuées, Mobjack ambitionne d’aider plus de jeunes en mettant en place un centre de formation afin de réduire le taux de chômage.

Pour booster sa carrière artistique, le rappeur projette une collaboration avec des grandes stars du monde de la musique et des affaires.

Youssouf KONE

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