Du 10 au 14 septembre 2013, le jeune rappeur malien Master Soumi a participé au colloque sur le thème : «Hip Hop, outil de renforcement de la stabilité politique et sociale». C’était à Post Dame en Allemagne. Ce colloque qui a été organisé par l’Université de cette ville, a enregistré la présence de plusieurs rappeurs venus d’Afrique, (Egypte, Maroc, Algérie et Mali), du monde des chercheurs, professeurs et directeurs d’Universités. Lors de ce rendez-vous, le jeune rappeur malien, Master Soumi, a présenté un exposé sur le thème : «Hip Hop et démocratie au Mali». Ce colloque a été organisé par la Fondation Volkswagen. À son retour au Mali, nous l’avons rencontré…
Le Reporter : Vous revenez d’un voyage en Allemagne, comment ça s’est déroulé ?
Master Soumi : Cette rencontre s’est passée dans une ambiance de communion d’abord, parce que les initiateurs de ce colloque sont venus au Mali en 2011. C’était dans le cadre d’un reportage sur le rap et la société malienne, surtout le rôle que le rap joue dans la société malienne. Après leur retour, ils ont décidé de faire un colloque sur le rap comme outil de renforcement de la stabilité politique et sociale. C’est ainsi que j’ai été invité pour aller représenter le Mali en Allemagne. C’était un beau monde de chercheurs, de directeurs d’Universités, de professeurs et des rappeurs venus du monde entier que j’ai rencontrés. Ça a été une véritable rencontre d’échanges.
Le thème que vous avez exposé lors de ce colloque était «Hip Hop et démocratie au Mali». De quoi s’agit-il en gros ?
Qu’est-ce que le rap a apporté à la démocratie malienne depuis 1992 jusqu’à nos jours ? J’ai mis l’accent sur les actions posées par les Sofa de la République à la suite du coup d’Etat de 2012 qui nous a conduits à l’effondrement du pays, avec l’occupation des 2/3 du territoire national et puis l’agression du président de la République au Palais de Koulouba. Ce sont des événements sur lesquels nous avons rebondi. Nous avons fait des chansons sur ces événements, mais à la veille de l’élection présidentielle, nous avons posé pas mal d’actes. Nous avons eu à mener plusieurs actions de citoyenneté. Inciter d’abord le citoyen à connaître l’importance de la carte d’électeur ; les exhorter à aller retirer leurs cartes NINA pour ensuite faire un vote utile, surtout pour un vote massif. C’est un peu la quintessence de mon exposé, mais aussi j’ai fait l’historique du mouvement Hip Hop au Mali de King Massassy en passant par les groupes comme Sofa, Tata Pound, Fanga Fing, Diata Sya, Les Escrocs, sans oublier All T Strong, M BFT, Pap and Pap. C’est un rappel historique basé sur les actions citoyennes et sur l’éveil des consciences des jeunes d’hier et d’aujourd’hui.
Pensez-vous que le Hip Hop puisse être un instrument de renforcement de la démocratie ?
Si vous voyez que la jeunesse malienne, pour ne pas dire la population malienne, en partie, a un moyen idéal pour s’exprimer aujourd’hui, moi je pense que c’est à travers le rap. Le rap malien est le genre le mieux écouté. S’il y a un concert qui peut faire le plein des grandes salles de spectacles et faire venir le maximum de personnes dans les stades, que ça soit à Bamako ou dans les régions, c’est le rap. Je pense que le rap a une place remarquable dans notre société. C’est un genre de musique qui est écouté non seulement par les jeunes, mais aussi par les adultes. Cela veut dire que chacun de nous se retrouve là dedans. C’est un véritable instrument de consolidation de la démocratie.
Avez-vous eu des contacts avec d’autres rappeurs lors de votre séjour en Allemagne ?
C’était une famille. J’ai amené des chansons de plusieurs rappeurs maliens qui abordent des thèmes de la société, traitant des problèmes de la société. Ils ont beaucoup apprécié. J’ai aussi projeté des clips et vidéos de beaucoup de rappeurs maliens. Par la suite, j’ai échangé aussi avec deux rappeurs qui m’ont expliqué comment le rap se comporte chez eux et ça m’a permis d’enrichir ma connaissance dans la musique en général. Mieux, il faut savoir que la musique n’a pas de frontières. C’est un langage universel ; quand c’est bon, c’est bon. J’ai rencontré pas mal de rappeurs qui sont bien, qui ont de bons flots, qui ont la maîtrise du bip instrumental, qui disent des choses qui intéressent les gens. Il y a des rappeurs allemands que j’ai rencontrés, des rappeurs underground qui ne sont pas connus. J’ai rencontré et échangé avec plusieurs rappeurs qui sont connus et on a partagé la scène. C’était vraiment génial. Ils ont adhéré à mes chansons, malgré le fait qu’ils ne comprennent pas le bamanankan. Il a suffi que je leur explique telle chanson parle de ça, une autre aborde un tel sujet, et le public était là pour apprécier le spectacle. Vraiment, c’était un véritable métissage culturel.
Le Mali a un nouveau président, IBK. Avez-vous un message pour lui ?
Je lui souhaite bonne chance pour son mandat et le félicite pour sa victoire. Je lui demande de rester à l’écoute de la population, parce qu’il a vu comment il a été élu. Je demande à la population de rester mobilisée, parce qu’on ne peut pas élire quelqu’un et le laisser faire ce qu’il veut. Élire quelqu’un, n’est pas une fin en soi. Seul, il ne peut rien faire. Le changement demandé doit être dans le quotidien de nous tous.
Kassim TRAORE