Koko Dembélé fait partie du cercle restreint des artistes qui ont animé la campagne d”ATT de Kayes à Mopti, en passant Ségou, Sikasso et Bamako. Cet artiste est l”un des rares à avoir opté pour le genre reggae dans notre pays, comme en témoignent ses longs cheveux. Sa carrière d”artiste a commencé dans son village natal aux côtés de son père, gardien de la tradition. Il nous parle ici de sa musique, de sa carrière et surtout de sa famille.
Né en 1954, Koko Dembélé est originaire de Mopti, à 675 km à l”est de Bamako. Il est l”un des rares artistes malien à faire de la musique reggae pure, à l”image de grands noms comme Bob Marley. Son enfance a été influencée par les cultures peulh, bozo et dogon, ce qui peut expliquer ses engagements.
Koko étant issu d”une famille de griots, il était difficile pour lui de prendre un autre chemin professionnel dans la vie. "En effet, excellent percussionniste, mon père exerçait la profession familiale de cordonnier et animait aussi les fêtes traditionnelles du village. Ma mère était chanteuse, elle accompagnait toujours de sa belle voix mélodieuse mon père. Ils étaient les vedettes des traditionnelles cérémonies de baptême, de circoncision, de mariage ou des réjouissances célébrant les fructueuses moissons".
Déjà piqué par le virus de la musique, Koko tenait toujours à être un témoin privilégié des prouesses de ses parents. C”est donc dans cette ambiance qu”il a commencé, à l”âge de sept ans, à s”exerce à la percussion aux côtés de son père. En l”accompagnant, il découvrira des villes comme Bandiagara (capitale du pays dogon) et des cités historiques comme Gao, Djenné et Tombouctou.
"Avec mes parents, j”ai appris la tradition orale, l”histoire des griots, leur rôle dans la société africaine. Les griots sont les conseillers des rois ou des princes et, aujourd”hui, des présidents. Ils sont des philosophes, des ambassadeurs, des maîtres de la parole, des gardiens des traditions, des animateurs socio-culturels, des musiciens ou maîtres de cérémonies", rappelle-t-il, comme pour prouver qu”il a été à bonne école.
De 1961 à 1969, il a fréquenté l”école primaire de Mopti, avant celle de Bandiagara. Après son échec au DEF (Diplôme d”Etudes Fondamentales), il a opté en 1970 pour une carrière musicale.
Et de 1976 à 1986, après dix années de travail et de recherche, Koko devient le guitariste solo du célèbre Kanaga de Mopti, un groupe régional devenu orchestre national du Mali sous la direction de Sory Bamba, qui a appris beaucoup de choses à notre rasta. La star en herbe se distinguait à l”époque par des reprises réussies de Bob Marley, Jimmy Cliff, Burning Spear, etc. La voix du jeune talent attirait les foules. Ce qui lui permettra de s”imposer rapidement comme le principal chanteur de la formation.
"En 1982, avec le Kanaga, j”ai participé au Festival de la Zone II à Dakar, où douze pays d”Afrique de l”Ouest s”étaient retrouvés". Fantastique début d”une aventure musicale qui va le conduire vers d”autres horizons. C”est ainsi qu”en 1983 son orchestre est invité au Festival Musiques Métisses d”Angoulême, en France, occasion de rencontres avec des groupes du monde entier.
En 1993, Koko Dembélé compose et chante Amagni, chanson dénonce le mensonge, le vol, la corruption et exhorte les hommes de tous les pays à devenir dignes et bons. Entre temps, il a trouvé refuge à Abidjan, la capitale ivoirienne, en vue d”entamer une carrière solo. "A l”époque, la Cité de la lagune Ebrié était la plate-forme incontournable du show biz africain". C”est dans cette ville qu”il va faire la connaissance de grands noms de la musique, notamment du génie Boncana Maïga "Maestro". Paradoxalement, c”est le Maestro qui succombe au savoir-faire en matière musicale de Koko. C”était en 1990.
Le rasta, guitariste et percussionniste virtuose, obtient ainsi le privilège de travailler avec Boncana. Leur collaboration aboutit, en 1993 à "Baguinée" avec le titre Amagni. "Cet essai a eu un énorme succès commercial en dehors du continent, surtout au Brésil, où il s”est vendu comme des petits pains". C”est le début de la notoriété internationale. En avril 1997, Koko est le 4è invité de marque, après Nelson Mandela, Michael Jackson et Paul Simon au 18è festival de Olodum. Cinq mois plus tard, en septembre 1997, Koko est de nouveau réclamé par les "Baianos" (habitants de l”Etat de Bahia). C”est un challenge qui lui vaut une relative percée internationale.
Le jeune talent en profite pour mettre un second album, intitulé "Tendoro", sur le marché en 1998. Succès immédiat et ravageur de l”opus, aucun mélomane, surtout adepte du rastafarisme, ne pouvant rester indifférent à des titres poignants comme Rastaman, Tendoro, N”Sirana Malo, Fugnèba. La rampe de lancement est ainsi occupée par le fils du Niger et du Bani qui se lance à la conquête de l”Europe, voire de l”Occident. Il entreprend une tournée de promotion de Tendoro en France, en Allemagne et en Suisse. De retour d”Europe, il entreprend une tournée sous-régionale, sillonnant ainsi presque toutes les principales villes ivoiriennes et maliennes, où les mélomanes se piétinent pour assister à ses concerts.
Au Mali, il se maintient au sommet des hits parades pendant environ deux saisons. Après cet époustouflant succès, l”artiste s”éclipsera un moment pour mûrir ses projets artistiques et surtout concocter le menu de son futur album. Le résultat est au-delà des attentes, parce que Koko a mis le paquet dans cette œuvre, qui va séduire et conquérir les rares âmes qui étaient jusque-là restées indifférentes à son talent.
Kassim TRAORE
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