Le Rossignol du Mandé, récemment immortalisé par le Larousse, est fâché contre le pouvoir en place qui, affirme-t-il, ne fait plus rien contre la corruption qui aggrave la pauvreté des Maliens. Au cours d’un point de presse qu’il a animé jeudi dernier au Moffou, il a aussi fustigé l’attitude des pouvoirs publics face à l’immigration.
« Les jeunes passent tout leur temps à étudier et à leur sortie de l’école, des grandes universités, ils ne savent plus quoi faire parce que leurs places sont données aux fils des riches ». Pour Salif Kéita, qui rencontrait jeudi 12 octobre 2006 la presse après son inscription dans le Larousse, il faut que les décideurs adoptent enfin la politique de « l’homme qu’il faut à la place qu’il faut ».
Il en a profité pour dénoncer la grande corruption dont sont victimes tous les Maliens par le fait d’une petite minorité et le silence radio des autorités sur la question de l’immigration. « La lutte contre la pauvreté n’est qu’une propagande. Elle n’a jamais été le cas », a encore accusé l’auteur du tube « Nous pas bouger », pour qui, le salut du pays passe par l’adoption d’une politique d’emploi où le favoritisme n’aura pas sa place.
Issu d’un milieu où les hommes mettent un point d’honneur au respect de soi-même, à l’honneur et à la dignité, Salif dit ne pas comprendre le silence radio de dignitaires, accusés à longueur de journée, et que l’Etat continue de traiter grassement. « Tant que les ressources du pays continuent d’être dilapidés par des gens sans scrupules, qui ne pensent qu’à leurs poches, l’extrême pauvreté perdurera dans notre pays ». C’est la raison pour laquelle, a-t-il dit, que les Maliens préfèrent s’exiler.
Un politicien en gestation
« Si vous voyez que les Maliens aiment sortir, c’est parce que ça ne va pas au pays ». Sur le sujet, le maestro a affirmé qu’il est inadmissible que les autorités se taisent face à l’humiliation infligée à nos compatriotes lors des rapatriements. « Les Maliens sont enchaînés ou menottés dans l’avion avant d’être jetés au bas de la passerelle. Nous avons droit au minimum de respect », a-t-il déploré.
A force de prendre position contre cette pratique, le Domingo de la musique a affirmé avoir un dossier sale en France. « Si vous voyez que je n’ai pas assez de trophée de la musique, c’est que je n’ai pas ma langue dans ma poche ». Il a exhorté les autorités à prendre les dispositions afin que plus jamais un Malien ne soit rapatrié dans les conditions inhumaines.
Salif n’a pas écarté la possibilité de faire de la politique pour défendre les opprimés. « Dans les pays où la musique n’a pu trouver des remèdes aux maux des sans voix, des musiciens se sont versés dans la politique. Avant, la politique n’étais pas mon affaire, mais depuis quelque temps je commence à m’intéresser ».
Après une tournée internationale qui l’a conduit en Amérique, en Europe et en Afrique, Salif Kéita est de retour au bercail avec plusieurs distinctions. Disque d’or, meilleur artiste francophone 2006. Jeudi au Moffou, il a présenté ses trophées à la presse.
Amadou Sidibé
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