Bamako, c’est chaud avec Matthieu Chedid !

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© AFP/Sébastien Rieussec

Sur la scène de l’Institut français, Matthieu Chedid (nom d’artiste : M), Toumani et Sidiki Diabaté, Fatoumata Diawara chantent le “Mali debout”. En déboulant au premier soir du 26 janvier, avec sa guitare, sur la scène de l’Institut français du Mali qui accueillait pour la seconde édition le Festival Acoustik Bamako (FAB), Matthieu Chedid parle d’une «folie d’être là», à Bamako, capitale du Mali. Mais la folie, en l’occurrence, était celle du baptême live d’un nouvel album. Devant un public majoritairement composé d’expatriés, dans une salle de 350 places, en mode «intime et sécurisé» comme l’a souhaité l’initiateur et directeur artistique du festival, le grand maître de la kora, Toumani Diabaté.

La capitale du Mali, qui vient d’accueillir le sommet Afrique-France, a vécu dans ce cadre, trois soirs durant, un festival célébrant la rencontre et la résistance par la culture, autour du lancement de «Lamomali», en grande première mondiale. Depuis quelque temps, Toumani Diabaté suggérait vivement à M de composer un album au son pop où se rencontreraient leurs univers, l’Afrique et l’Occident. Pour ne pas dire la France et le Mali. «Lâche-toi !» a-t-il dit à M, avec lequel il a joué à plusieurs reprises.

Après un an de travail est né l’album Lamomali (où s’entend bien sûr «l’Âme au Mali») sortie française en mars, tournée estivale, et dont le single «Le Bal de Bamako» donne la tonalité afro pop : «version 2.O du Mali» dixit M. À l’aventure participent notamment Fatoumata Diawara, comédienne et chanteuse malienne, Sidiki Diabaté, fils de Toumani, prince de la Kora modernisée et de la chanson, idole de la jeunesse malienne, et ce soir-là les musiciens du Symetric Orchestra. M, qui est venu à cinq reprises au Mali, mais chaque fois très peu de jours, confie-t-il, y revient dix ans après les Paris Bamako, un groupe qui a déjà fait chanter les deux villes sous le signe «du bonheur» à l’instigation du couple de musiciens Amadou et Mariam. La motivation du chanteur ? «Rafraîchir la mémoire des Français sur ce que ce pays offre en matière de qualité musicale au monde.»

Le Mali debout par la culture

«Anissou» ! Bonsoir, lance le maître de cérémonie, qui est aussi celui de Radio africa, Mory Touré. Il accompagne les trois soirées où défileront des vibrations du Mali croisées avec celles d’Écosse, des États-Unis (notamment au sein de l’Alba Griot ensemble) mais aussi du Nigeria. Parmi les incontournables Maliens, dont l’homme orchestre Cheikh Tidiane Seck, le «griot moderne», Habib Koité, a ouvert le bal, tenant amoureusement sa guitare en chantant les noms des virtuoses de son pays. Mais aussi celui de Tony Allen, le batteur mythique et bien présent du groupe Fela Kuti, avec lequel Habib joue sur cette scène pour la première fois : «choc» explique-t-il au public.

Fatoumata Diawara lui succède avec sa voix qui fait s’écrouler d’émotion le plus insensible des cœurs. Matthieu Chedid l’a entendue lors de la tournée Africa Express de Damon Albarn à Marseille, puis de nouveau aux Césars, pour le film Timbuktu, en l’invitant dans la foulée à être du projet Lamomali. Le premier morceau de l’album évoque un «Paris qui n’est plus» et un «Mali dévêtu», et dans leur duo coécrit, Fatoumata Diawara et Mathieu Chedid installent d’emblée à mots couverts la proximité des situations devant la violence des attentats aujourd’hui dans le monde.

Dans l’actualité récente du nord du Mali, les victimes de la tuerie de Gao, qui a valu trois jours de deuil national, ne sont pas oubliées au FAB. Il faut mesurer à la hauteur d’un tel contexte ce que signifie, même pour un public restreint à ce stade de l’aventure, la venue d’un chanteur français. «Celui qui quitte chez lui, il est mieux que toi», traduction littérale d’un proverbe disant tout de l’hospitalité malienne.

Au nom des griots

Toumani Diabaté, artiste international, souhaitait cette présence de «nos amis à nos côtés pour lancer des messages à l’Occident» sur son pays qui souffre tant d’être «jugé infréquentable». Dans le jargon malien, on nomme les Chedid les griots blancs ; la famille ne dépare pas dans la tradition des griots du Mandé où l’on chante de père en fils : une grand-mère poétesse, Andrée Chedid, dont M adapte un poème sur Lamomali, un père chanteur Louis Chedid, et lui, le petit dernier. Dans la chanson «Mali Toumani», il chante, en griot blanc, les louanges de Toumani Diabaté, dont son propre fils, Sidiki, célèbre ensuite le nom et fait frissonner la salle. Mais où est-on ? Vraiment entre la France et le Mali, qui prend soudain une valeur de manifeste quand M raconte qu’il ne s’attendait vraiment pas à composer une chanson en 48 heures à la suite d’une rencontre à Bamako avec une ministre… C’est en effet la ministre de la Culture malienne, N’Diaye Ramatoulaye Diallo, recevant Toumani Diabaté et le chanteur français, qui a évoqué un Mali debout par la culture ; il n’en fallait pas plus pour inspirer au chanteur le titre «Le Mali est debout», qui bien évidemment fait se lever la salle d’un bond pour danser. Depuis, Mme la ministre a dit la volonté du gouvernement malien de soutenir le clip qui accompagnera la chanson où «de Mopti à Tombouctou», «de Bamako à Ségou», «le Mali est debout».

Si le renforcement de la coopération franco-malienne sur le plan culturel chère à Toumani Diabaté devait être prouvé, voilà qui est fait. Cerise sur le gâteau : l’ambassadrice de France, au dernier soir du festival, a remis à «l’enchanteur de la kora» les insignes de Chevalier des arts et des lettres. Son discours était concurrencé par les voix des griottes surgies de la salle pour entrer dans ce chœur de louanges, le FAB prenant alors une véritable dimension griotique en noir et blanc !

Par notre envoyée spéciale à Bamako, Valérie Marin la Meslée

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