Il est à New York depuis le mois de juillet et va souvent à Baltimore et Washington pour l’enregistrement de son nouvel album. Il vient d’ailleurs de finir son nouveau clip intitulé «DIBI». Nous avons pu le joindre afin d’échanger avec lui sur cet album dont certaines vidéos et clips sont actuellement sur Youtube.
«C’est pour cela que tu ne me vois pas, mais je suis toujours au boulot pour faire connaître le hip-hop malien ici aux Etats-Unis. Toujours plus haut et avec toute la mauvaise publicité que le Mali a eu ces 2 dernières années, je pense qu’il est important de donner une belle image à l’international. Le Mali, ce n’est pas que des problèmes ou dérapages, même s’il faut reconnaître qu’il y’en a beaucoup en ce moment». Ce sont les premiers prononcés par Amkoullel.
Parlant de son prochain album, l’enfant peulh nous dira que cette œuvre sera une rencontre entre la musique malienne et le hip-hop américain. Car des producteurs américains sont en train de travailler pour les beats, et la touche mandingue ajoutée par les instruments traditionnels. L’objectif est de produire une œuvre internationale permettant au Hip-hop malien de se faire connaître aux Etats-Unis. Le hip-hop malien grandit de jour en jour «et maintenant nous sommes arrivés au stade où il nous faut être de plus en plus présent aux quatre coins du monde. Nous, artistes rappeurs maliens, devrons faire de notre mieux pour être à l’image de nos aînés Salif Keita, Oumou Sangaré, Toumani Diabaté, Bassékou Kouyaté, Yoro Diallo et feu Ali Farka Touré qui ont ouvert la voie. À notre tour de le faire pour le hip-hop malien», déclare le jeune rappeur. C’est pourquoi, dira-t-il, il est actuellement aux Etats-Unis afin que ce rêve devienne réalité.
Après un documentaire avec MTV, la BBC, des articles dans New York Times Magazines, des conférences dans des universités tels que la Brown université ou UCLA à Los Angeles, des ateliers de créations, notamment avec la Brooklyn Académie of Music et des tournées, Amkoullel peut confirmer que le public américain est plus que prêt à accueillir positivement le hip-hop malien. «Même si je suis ici, mon nom est et restera toujours au Mali, et cela va sans dire. Je reviendrai bientôt à la maison», nous a-t-il confié.
Dans le prochain album, Amkoullel traite de la crise au Mali, la corruption, la déclinaison de l’autorité parentale et l’échec scolaire. Dans le morceau «Zon Bidjan» il dépeint la corruption à toutes les échelles de la société malienne, de la petite corruption avec la vente des notes sexuellement transmissibles aux grands caïmans dans les bureaux de l’Etat. Il n’épargne personne. Pour lui, c’est une chanson dédiée à tous les Maliens qui ne reculent plus devant rien pour s’enrichir sur le dos des pauvres citoyens. «Aujourd’hui beaucoup de gens pensent que le vol et la tricherie sont normaux, il est temps qu’on combatte cela. Il y a plusieurs gens qui se sont enrichis sur le dos du pays ; ils n’ont jamais été inquiétés et ce sont des exemples de réussite pour les jeunes de leurs quartiers alors que ce n’est pas vrai. Cela n’est pas normal. C’est pourquoi je chante et je dis que les voleurs sont chanceux au Mali, ceux qui volent le pays sont bien traités. Mais cela doit cesser, il faut que le discours de lutte contre la corruption soit une réalité au Mali», clame-t-il.
Amkoullel n’est pas tendre avec les hommes politiques maliens. «La plupart d’entre eux ne pensent pas à la population une fois élu. Ils ne pensent qu’à eux-mêmes, alors que dans un Etat démocratique on n’a besoin d’une opposition forte, ceux qui sont dans la majorité doivent jouer leur rôle, tous ceux de l’opposition, doivent tous travailler pour le bonheur du pays, mais pas dans l’animosité et travailler pour soi-même en oubliant le pays et les populations», assène-t-il.
Par ailleurs, il a salué l’élection du jeune Amadou Thiam au poste de 2ème vice-président de l’Assemblée nationale, tout en demandant à la jeunesse de ne plus suivre la voie des aînés qui ont échoué, mais de se donner la main pour tracer une nouvelle voie pour le pays. À la question de savoir s’il ambitionne faire de la politique un jour, voici sa réponse : «Nos artistes ont mobilisé plus que les politiques ; nous sommes plus écoutés que les politiques. Je préfère ma place d’artiste avec mon micro. J’ai de la chance d’être écouté par les jeunes maliens, africains et du monde. Cette chance n’est pas donnée à un homme politique, donc je reste rappeur». On n’a pas besoin d’un dessin pour le comprendre !
Nana HOUMAMA