Dans une lettre ouverte, Dr Ramata Sissoko Cissé, au nom du PPP (La Police protège le peuple. Le Peuple protège la police), s’adresse aux forces de sécurité maliennes.
Le Mali traverse un moment très critique de son histoire. Les cœurs sont meurtris et le peuple est en proie au désarroi. Les Maliens en deuil perpétuel depuis plusieurs années avec des centaines de victimes militaires et civiles chaque jour, du Nord au Sud, de l’Est à l’Ouest en passant par le Centre qui risque, si rien n’est fait, de basculer dans la guerre civile.
Les Forces Armées et de Sécurité peinent à assumer leur mission régalienne de défense de l’intégrité territoriale et de sécurisation des populations et de leurs biens à cause notamment de l’insuffisance de ressources humaines qualifiées, de matériels et d’équipements adéquats.
L’unité du pays est en péril et sa souveraineté est en passe d’être compromise. Les Forces de Défense et de Sécurité sur lesquelles le peuple pouvait légitimement compter semblent tout autant être désemparées et démotivées.
Le tissu social se désintègre et il urge d’agir pour minimiser les dégâts. Il nous faut inventer des méthodes novatrices pour créer un climat de confiance entre les différents groupes sociaux, renforcer la collaboration entre les civils et les porteurs d’uniformes qui ne sont que nos frères et sœurs, autant exposés à la crise que vit le pays en entier.
C’est pourquoi, nous Maliens de la diaspora avec l’appui de nos compatriotes de l’intérieur, avons créé un mouvement de sensibilisation de nos porteurs d’uniformes, dénommé PPP “La Police Protège le Peuple, Le Peuple Protège la Police”. Notre objectif est de créer un climat de confiance entre le peuple et les porteurs d’uniformes y compris les sapeurs-pompiers, les agents des eaux et forêts, les agents de la douane, la gendarmerie, la police, la garde républicaine et l’armée, en ces moments de crise. Aussi, nous comptons sur nos frères et sœurs civils pour le respect et la protection de leurs frères et sœurs porteurs d’uniformes. Il est de notre devoir civique d’honorer la mémoire de nos soldats tombés, et d’apporter le soutien nécessaire à nos veuves et orphelins. La tenue que vous portez, au nom du peuple Malien, ne saurait vous priver du droit à la reconnaissance de vos mérites, et vous soustraire de votre devoir de protection du peuple.
L’article premier (1) de la Constitution Malienne dispose que: « La personne humaine est sacrée et inviolable. Tout individu a droit à la vie, à la liberté, à la sécurité et à l’intégrité de sa personne ». Cela est autant vrai et pour les forces de maintien de l’ordre que pour le peuple.
L’article trois (3) poursuit: « Nul ne sera soumis à la torture, ni à des sévices ou traitements inhumains, cruels, dégradants ou humiliants. Tout individu, tout agent de l’Etat qui se rendrait coupable de tels actes, soit de sa propre initiative, soit sur instruction, sera puni conformément à la loi ».
Alors, soyons et restons cette famille Malienne unie et respectueuse de nos lois et de nos us et coutumes. L’article seize (16) dispose que: « En cas de calamité nationale constatée, tous les citoyens ont le devoir d’apporter leur concours dans les conditions prévues par la loi ».
Ces trois (3) articles de notre loi fondamentale, qu’est la Constitution, demeurent plus qu’aujourd’hui d’actualité, avec la situation politico-socio-économique dégradée du pays. Nous nous joignons à tous les porteurs d’uniformes et à l’ensemble du peuple Malien de l’intérieur comme de la diaspora pour respecter ces dispositions de notre constitution.
Un mécontentement général des Maliens à travers le pays ainsi qu’à l’extérieur se fait sentir et s’agrandit du jour au jour. Les multiples marches de protestation des Maliens de la diaspora, des différents corps professionnels, des syndicats, et des femmes, sont la preuve du désenchantement et de la désillusion généralisée.
Malheureusement nous avons constaté des moments de fortes répressions, de violences et brutalités policières sur nos frères et sœurs aux mains nues pendant les marches et meetings pacifiques; pourtant une liberté reconnue et protégée par notre constitution, pour permettre aux populations de manifester leur mécontentement et se faire entendre des autorités qu’elles ont elles-mêmes mises en place. L’utilisation de gaz lacrymogènes et d’autres dispositifs dangereux, les agressions physiques sur la personne des manifestants et même des handicapés physiques dans des chaises roulantes, sont des violations graves et intolérables des droits élémentaires du citoyen, punies dans tout Etat de droit.
Mieux, l’usage de force excessive par nos frères et sœurs des forces de l’ordre sur les innocents aux mains nues est une violation de l’article trois (3) de notre constitution.
Nous dénonçons ces violations graves de notre constitution et de l’article cinq (5) de la déclaration Universelle des Droits de l’Homme des Nations Unies de 1789 dont le Mali est signataire, susceptible de donner lieu à des poursuites pénales. Cette répression aveugle de manifestants paisibles qui ne réclament que leurs droits de citoyens maliens, ne fait que peindre le tableau noir de graves blessés qui ternit l’image du pays sur le plan international. Ainsi, nous encourageons la non répression des manifestations pacifiques des Maliens sans violence ni confrontation pour l’intérêt de tous.
Comme tout bon citoyen, engagés pour la cause nationale, nous tenons au respect de la liberté d’expression et de manifestation sous toutes les formes. Avec votre aide et collaboration, nous souhaiterions pouvoir jouer le rôle d’intermédiaire, pour contribuer à améliorer les relations entre les populations civiles et les forces de l’ordre censées les protéger. Nous croyons sincèrement, que renforcer la cohésion sociale par le rapprochement de la police aux citoyens est une urgence. Chaque citoyen a le droit d’exprimer son mécontentement et la police a le devoir de protection du citoyen dans le respect des lois et de la dignité humaine.
Par conséquent, des approches préventives doivent être privilégiées par rapport aux méthodes répressives pour combler le fossé creusé entre la police et la population Malienne, pour favoriser un climat de confiance.
La perception que les citoyens ont de la police Malienne aujourd’hui représente une menace pour l’avenir de la nation. Quand le peuple ne se sent pas sécurisé par la police ou la police se sent incomprise par le peuple, la sécurité et la paix ne peuvent qu’être sérieusement affectées.
Le rôle de la police est de veiller sur les citoyens. Ces porteurs d’uniformes sont nos frères et sœurs, nos fils et filles, nos pères et mères, nos époux et épouses, nos neveux et nièces et nos amis ou voisins. Il faut un partenariat étroit entre tous les corps de maintien d’ordre avec la population pour éviter que la situation se détériore. Nous encourageons la police à assurer sa mission avec professionnalisme pour maintenir l’ordre social et la paix dans notre pays. La police est issue de ce peuple et elle en fait partie intégrante.
Chers frères et sœurs porteurs d’uniformes, vous ne devez jamais perdre de vue qu’on est tous partie intégrante de cette nation et nous avons tous intérêt à se donner la main pour maintenir la cohésion sociale et préserver l’unité nationale.
Le mouvement “La Police Protège le Peuple, Le Peuple Protège la Police” adhère entièrement à la valeur républicaine que: la police doit protéger son peuple et le peuple sa Police.
Aussi, nous sollicitons l’engagement de tous les Maliens de l’intérieur comme de la diaspora à adhérer à ces principes de respect, de soutien et de collaboration entre la Police et le Peuple, afin de préserver la cohésion et l’entente entre tous les Maliens.
Sincèrement,
Veuillez agréer, chers porteurs d’uniformes, l’expression de nos profonds sentiments patriotiques.
Dr Ramata Sissoko Cissé
Pour le mouvement : PPP
(La Police Protège le Peuple. Le Peuple Protège la Police)
Atlanta, le 2 Avril 2019