Lettre à mon oncle Bass, Cher oncle,

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Salamaleck !

C’est avec le ventre bien plein, pardon le cœur plein de joie, que je t’envoie la présente lettre. Mais, avant de te donner des nouvelles du pays, je m’en voudrais à mort si, d’abord, je ne te remerciais, au nom de toute la troupe familiale, pour le sac de riz et le colis de poissons fumés que tu viens de nous envoyer.

« Tiô bélé bélé » ! Walahi, Bilahi, je jure, Allah Akbar, mais toi non plus, mon oncle, tu n’es pas petit !

Grand mère également me charge de te dire qu’elle t’envoie des milliers de “sacs” de… bénédictions.

La pauvre, n’a que ça pour toi, mais ça, aussi, c’est beaucoup… Enfin, il faut y croire.

Par ailleurs, le « main en main » qui te donnera cette lettre, te remettra aussi un colis d’arachides (de la part de grand mère) et un grand boubou, que je t’ai acheté.

Je suis vraiment content du fait que, nous aussi arrivons de temps en temps à t’envoyer de petites choses.

La vie ou la survie mon cher oncle, ne mérite point d’être vécue, lorsqu’elle est synonyme de toujours recevoir, sans jamais rien donner.

D’ailleurs, on a toujours quelque chose à donner, même lorsque, l’on manque de tout.

Walahi Tonton, ton sac de riz nous tombe du ciel, car la marmite familiale était en « jachère », depuis maintenant cinq jours. Pour cause, le riz est toujours  un luxe, car le prix du kg a pris l’ascenseur pour atteindre de nos jours les 375 Fcfa.

C’est vrai que, pour les « en haut », leurs proches et leurs griots, il ne fait ni chaud, ni froid face à cette hausse des prix du riz et des autres céréales, mais pour l’écrasante majorité des Maliens, nous autres les « en bas », nos tripes se rétrécissent de jour en jour.

Sur un tout autre plan, je t’informe que mon cousin Sunkalo qui a purgé sa peine (2 ans fermes pour le vol de 3 moutons) à la maison d’arrêt de Bamako, n’a toujours pas été libéré.

Il n’y a pas à trop y  réfléchir car, ici au Mali, on est coupable ou victime selon que l’on soit pauvre ou riche.

C’est pourquoi, les nombreux rapports des “végaux” et “Cascaux” ne font peur à personne. Cela, parce que de ces dossiers transmis à la Justice, les Maliens ne s’attendent à rien, car, depuis plusieurs années, bien d’autres dossiers faisant état de détournements de fonds colossaux ont été transmis à la même Justice, mais, les voleurs n’ont jamais été inquiétés.

La Justice dans ce pays mon pauvre oncle, n’est que toile d’araignée pour les riches et les puissants, chaîne qu’aucun acier ne peut rompre pour les pauvres et les faibles. Je le dis pian ! Parce que, c’est ça qui est ça !

Toujours concernant la République, l’événement majeur qui l’a marqué la semaine dernière, c’est la grève de 48 heures qui a été décrétée par l’Union Nationale des Travailleurs du Mali.

Celle-ci a soumis au gouvernement 17 revendications dont la diminution du taux de l’impôt sur les traitements et salaires (ITS), le relèvement du salaire minimum, la baisse des tarifs d’eau et d’électricité et bien d’autres. Hélas, concernant l’augmentation du salaire minimum, du taux de la valeur d’indice, de l’augmentation de l’allocation familiale, de la réduction de l’impôt sur le salaire et la baisse des tarifs d’eau et d’électricité, le gouvernement a dit ne pas pouvoir les prendre en compte pour le moment.

L’UNTM estimant alors ne pouvant plus continuer à attendre, a donc décidé d’aller en grève. Et ce fut le cas jeudi et vendredi derniers.

Cependant tonton Bass, ne me demande point de t’expliquer ces histoires de salaire minimum, d’impôt sur les traitements et salaires et toute cette littérature qui oppose l’UNTM et le gouvernement. Je n’y comprends absolument rien ! Nous les maliens d’en bas ne connaissons de salaire que la pitance quotidienne qui nous tombe dessus de temps en temps. D’électricité à Fantambougou, nous n’en avons pas et d’eau nous ne en procurons que dans les puits.

Quand aux hôpitaux, centres de santé et autres, qu’ils soient ou pas en grève, cela ne change rien pour nous, parce que, les médecins, même en temps normal ne se trouvent que dans les cliniques.

Les seules grèves qui nous porteront à coup sûr préjudice, ce sont celles des conducteurs des minibus noirs, car à Fantambougou, les voyages pour Lahara sont réguliers. Allah Akbar !

En tous les cas tonton Bass, grève ou pas grève, c’est du pareil au même pour nous les maliens par terre.

Sur un tout autre plan et comme tu dois le savoir, la mort Ebola fait frémir toute la sous-région et même le reste du monde. C’est pourquoi, le Sénégal (où tu vis) vient de fermer ses frontières avec la Guinée où l’épidémie sévit. Le Mali n’a encore pas pris une décision du genre et je comprend bien cela, car on n’isole pas un ami quand il a des problèmes.

Que Dieu sauve les “certaines choses des nageurs que nous (les maliens d’en bas) sommes”. Amen.     

A lundi prochain Inchallah !

Par ton petit Ablo !

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