Lettre à mon oncle bass : Cher oncle,

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Bonjour ! Je n’ai reçu aucune  nouvelle de toi, depuis maintenant deux semaines. Que t’arrive-t-il ?  J’espère en tous les cas, que tu te portes bien. Il le faut, car, toi-même tu sais, sans toi, la marmite familiale à Fantambougou sera permanemment en ‘’jachère’’.

En attendant donc  d’avoir très vite de tes nouvelles, je t’informe que la troupe familiale, grâce à Dieu (et à toi aussi) est toujours au grand complet et grand-mère est guérie de sa diarrhée contractée, après qu’elle eût mangé une soupe de tripes de chèvres en décomposition. Quant à moi,  je viens de renoncer à mon projet de suicide par pendaison. Cela, parce que les nouvelles sont bonnes.

En effet,  un  Malien de France en vacance à Bamako vient de m’offrir la carte de séjour (en France) d’un de ses cousins. Cela, par ce que, je l’ai aidé à vendre  une bizarre poudre…blanche. De quoi s’agit-il ?  Walahi, bilahi, je n’en sais rien. ! D’ailleurs, que m’importe !

Dans ce pays là, tout se vend, tout s’achète. C’est te dire que, mon cher Bass, avec ma carte de séjour, il n’y aura plus d’obstacle pour réaliser mon rêve de partir en exil alimentaire en France. Oh France ! ‘’Vois-tu, je sais que tu m’attends, j’irai par la forêt, j’irai par la montagne.  Je ne peux demeurer loin de loi, plus longtemps’’.

 Surtout, ne te fait pas de soucis, tonton, à propos de la carte de séjour qui est celle d’un autre. Chez les blancs, tous les noirs sont…noirs. 

A présent, adorable oncle Bass, je te prie de m’autoriser à vendre les 6 ânes de feu mon oncle Siaka, afin d’être à même de payer mon billet d’avion Bamako-Paris.

Waalahi, Bilahi, je jure, dès mon arrivée en France, je m’attèlerai à rembourser l’argent des ânes et à acheter une Sotrama pour la famille à Fantambougou Bamako.

Par ailleurs, pour répondre à quelques passages de ta dernière lettre, je te signale que je n’exagère en rien. « Eternel pleurnichard » dis-tu ? Non, je ne l’ai jamais été car j’ai depuis fort longtemps, versé toutes mes larmes. Aujourd’hui, je n’en ai plus. Aussi, Walahi, Bilahi, je jure, je ne suis pas d’accord avec toi, quand tu me mets en garde en signalant que « la poule, à force de farfouiller, finira par déterrer le couteau qui sera utilisé pour l’égorger ».

D’abord mon oncle, pour qui veut me ranger dans la catégorie des volailles, je suis pas une poule, mais plutôt un coq.

Et le couteau, je l’ai découvert, depuis ma tendre enfance. Il est plus tranchant, plus implacable, plus mortel qu’aucun autre sur terre.

Ce couteau, mon oncle, s’appelle : la misère. Et il m’a tranché la gorge depuis belle lurette. Alors, permets-moi, tant que je le peux, de fouiller et de farfouiller, dans les affaires de ces gens-là… d’en haut.

D’ailleurs, il n’y a plus de péril dans ce pays, en matière de dénonciation.

Les voleurs de la République s’en foutent bien, lorsqu’ils ne s’en amusent pas.

Détourner et piller les ressources nationales sont devenus un phénomène de mode, un symbole de courage, « d’intouchabilité », de puissance et d’intelligence. Et ceux qui conservent encore cette part de dignité leur interdisant de plonger dans la mare aux diables, ils sont tout simplement perçus comme des maudits, des incapables, des froussards et des poules mouillées.

Je le dis pian !

Sur, un tout autre plan, je t’informe que nous avions été agréablement surpris, il ya quelques jours d’apprendre que ces fameuses autorités intérimaires allaient enfin être installées dans les nouvelles et anciennes régions nord du Mali. Agréable dis-je, parce que, nous en avons assez de cette histoire d’accord de paix qui ne finit toujours pas d’accorder ses cordes- Hélas, nos ‘’frères égarés’’ de Kidal par où les choses devraient commencer ont encore une fois fait des siennes.

Ils reprochent au gouvernement malien d’avoir nommé un gouverneur pour Kidal sans les avoir consultés. Walhi, Bilahi, je jure y en a marre de ces gens ! Pour qui se prennent-ils ?

Je ne sais vraiment pas. Mais une chose est sûre : nos ‘’frères égarés’’ de Kidal manquent cruellement de bon sens et de compassion pour ces milliers de compatriotes entassés les uns sur les autres dans des camps de refugiés de certains pays voisins, lorsqu’ils ne sont pas en train d’errer dans la nature, faute de sécurité dans leur propre pays.

Pendant ce temps, eux  sont là dans les luxueux hôtels de Bamako ou d’ailleurs à se pâmer et à s’enrichir sur le dos du contribuable et de la communauté internationale. Je le dis pian !

Parce que, c’est ça qui est ça !

 A Lundi prochain Inchallah

Par ton petit Ablo

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