Terrorisme et trafic de drogue : Le nord du Mali demeure une poudrière

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Le Mali mériterait-il son qualificatif peu glorieux de maillon faible de la chaine de lutte contre le terrorisme international et le banditisme transfrontalier ? La bande sahélo saharienne est aujourd’hui une véritable poudrière.

L’Union européenne dont, essentiellement la France a interdit ou déconseillé à ses ressortissants de fréquenter le nord du Mali. L’Algérie a toujours traité les autorités maliennes de faire preuve de laxisme dans la lutte contre les terroristes d’AQMI. Les forces armées et de sécurité de la Mauritanie, dans leur traque des intégristes musulmans, agissent en territoire malien comme si elles n’avaient aucune confiance en leurs homologues maliens. Les Etats-Unis d’Amériques, qui entraînent les soldats maliens à contrer les menaces terroristes, même s’ils ne disent pas la même chose que tous ces pays, n’en pensent pas moins. Le Mali mérite-t-il son titre de maillon faible dans la lutte contre le terrorisme international et le banditisme transfrontalier ? Le chef de l’Etat malien, le général Touré, estime pour sa part qu’il n’y a pas encore de chaîne dressée dans cette lutte, les principaux protagonistes trouvant toujours le moyen de se débiner sous le premier prétexte venu. Toujours est-il que de tous les pays riverains de la bande sahélo saharienne, c’est le Mali que les terroristes de toutes nationalités et les bandits en tout genre ont choisi comme sanctuaire, notamment pour séquestrer des otages, recruter des passeurs et des convoyeurs de narcotiques, mener des négociations et transactions, libérer leurs otages, vendre leurs camelotes, etc. Cela est indéniable. Même si, le plus souvent, les otages sont kidnappés ailleurs (Niger, Algérie), la drogue provient des continents américain et asiatique, les armes ne font que transiter par le Mali.

Les autorités maliennes ont longtemps fermé les yeux et les oreilles, sous prétexte que le pacte implicite de non agression qui les lient à AQMI et affiliés tiendra. Mais il est plus temps pour elles de reconnaitre que même si la drogue est destinée à l’occident, que les armes sont destinées à tuer des Occidentaux, que ce sont des Européens qui sont kidnappés et «revendus», des menaces sérieuses de déstabilisation planent désormais sur notre pays. Il n’y a pas seulement que la perte de souveraineté sur une grande partie de notre territoire national, ni le manque de contrôle sur une jeunesse ayant succombé au gain terroriste, il y a aussi et surtout le sous-développement et la précarité dans lesquels sont maintenues essentiellement les trois régions du nord ; il y a l’insécurité croissante et le banditisme résiduel que subissent les populations de cette zone. Situation qui freine toute activité. A Tombouctou, en l’espace d’un mois, deux véhicules 4X4 ont été enlevés, un a failli l’être, par des «citoyens» qui vivent parmi la population et que tout le monde connait. Sauf que personne ne savait que ces paisibles citoyens sont entrés, il y a peu, en possession d’armes dangereuses. Ce qui corse encore plus une situation déjà explosive.

En effet, malgré les différents programmes de lutte contre la prolifération des armes légères et pour le retour de la paix et de la sécurité, le nord du Mali est devenu un véritable magasin d’armes. Pour certains, sont mis en cause des ex-combattants revenus de la Libye avec armes et munitions. Malgré les sollicitations sincères des autorités et l’implication beaucoup peu convaincante de certains leaders communautaires, certains désormais ex-mercenaires de Kadhafi refusent de rendre les armes, sans qu’aucune sanction sérieuse soit prise à leur encontre. Or, ils ne seraient même pas tous détenteurs de la nationalité malienne. Les autorités le savent puisque le président Touré a implicitement reconnu en public que tous les réfugiés en provenance des rangs de la légion islamique ne sont pas d’origine malienne. Or, le Mali leur a largement ouvert ses portes. Conséquence : le Mali est le seul pays de la sous-région où les ex-combattants de Libye se sont repliés en force. Parmi eux, des Tchadiens, des Algériens, des Soudanais, des Nigériens, des Mauritaniens. Bref, tous ceux qui ont un tant soit peu la fibre touarègue et les germes de la violence se sont retrouvés dans cette zone en déshérence, avec comme seule idée fixe de bâtir ce que leur mentor, Mouammar Kadhafi, tué par les siens, n’est jamais parvenu à réaliser : un royaume sahélo saharien constitué d’une partie de chaque Etat de la bande sahélo saharienne. Autant dire que toutes les nations de cette zone sont menacées dans leur intégrité territoriale. Et le centre névralgique de cette vaste opération de déstabilisation n’est autre que le nord du Mali.

Les populations sédentaires qui ont compris toute la portée de la menace depuis longtemps s’y préparent déjà. Reste aux autorités à prendre toutes leurs responsabilités.

Cheick Tandina

Envoyé spécial au Nord-Mali

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