Au moins cinq ex-rebelles touareg maliens de l’Alliance démocratique du 23 Mai ont été tués lors d’une embuscade tendue lundi 23 octobre dans le nord du Mali par des combattants qui appartiendraient au Groupe salafiste pour la prédication et le combat (GSPC), a annoncé mardi l’AFP citant une source rebelle targuie.
L’accrochage a eu lieu dans la région de Taoudenit, selon la presse malienne parue hier. " Nos éléments sont tombés lundi matin dans une embuscade tendue par le GSPC dans le grand désert malien. Il y a eu dans nos rangs au moins cinq morts, des blessés et deux de nos éléments ont été enlevés par le GSPC ", a rapporté un responsable de l’ex-rébellion que l’AFP a contacté par téléphone de Bamako. Le site d’information Kidal.info annonce un autre bilan : 7 morts, 3 blessés dans les rangs d’une " patrouille de routine de l’Alliance démocratique du 23 Mai ". " Ce sont les hommes de Moktar Belmoktar, le chef du GSPC (pour le sud de l’Algérie) qui ont fait le coup ", a ajouté la même source sous le couvert de l’anonymat. " Nous allons riposter ", a encore annoncé cette source. Les ex-rebelles touareg ont affirmé, début octobre, avoir tué au mois de septembre le n°2 du GSPC pour le Sud algérien, connu sous plusieurs noms, notamment Abdelhamid et Abohola, lors d’un accrochage dans le nord du Mali. Cette embuscade intervient alors que le processus de désarmement des ex-rebelles touareg – des déserteurs de l’armée malienne qui sont entrés en dissidence en mai dernier en attaquant trois camps militaires dans le nord et l’est du pays – doit commencer samedi prochain.
Ce désarmement sera-t-il hypothéqué suite à cette embuscade ? Selon Kidal.info, les ex-rebelles considèrent que l’annonce de leur désarmement et du cantonnement de leurs forces de l’Alliance – qui devrait s’élaborer sous supervision malienne et algérienne – était faite " unilatéralement par les autorités maliennes sans concertation avec l’Alliance " qui voit cette annonce comme " une provocation ". Annonce faite après la visite, la semaine dernière, du ministre de l’Administration territoriale malien Kafougouna Koné, à Alger. Mais le processus semble grippé. " Certaines conditions posées dans l’Accord d’Alger ne sont pas remplies par les autorités maliennes ", ont ajouté les sources de l’Alliance à Kidal.info. Grâce à une médiation algérienne, le gouvernement malien et les ex-rebelles touareg ont signé, début juillet à Alger, des accords de paix, selon lesquels les Touareg ne doivent plus réclamer l’autonomie de leur région, tandis que Bamako doit accélérer le développement du Nord désertique abritant l’essentiel de la communauté targuie.
Situation explosive
Selon le quotidien malien Le Républicain, " les éléments de l’armée algérienne auraient pris position au niveau de la frontière pour, éventuellement, barrer le chemin aux éléments du GSPC. C’est dire que la situation est explosive actuellement dans le secteur. Le GSPC étant devenu l’ennemi à abattre ". Pour ce journal, le GSPC serait " pris entre le feu des insurgés de Kidal, de l’armée algérienne et étroitement surveillé par les Américains qui s’intéressent à tous leurs mouvements depuis des années.
Malgré tout, le GSPC semble décidé à en découdre avec les insurgés de Kidal. Pour les salafistes, les hommes de Iyad Ag Ghaly (chef des insurgés) sont désormais à la solde des autorités algériennes. ". A rappeler que le 30 juin 2005, au moins 13 islamistes armés avaient été tués par l’armée algérienne lors d’une opération à la frontière avec le Mali contre une colonne de véhicules du GSPC. Des sources sécuritaires maliennes avaient, de leur côté, indiqué à l’AFP que 10 personnes avaient été tuées dans cette opération. Le quotidien Le Républicain note également que les ex-rebelles et le GSPC opèrent dans la même zone : " Une zone par excellence de contrebande, de trafic d’armes, de drogue et de produits de toutes sortes. Ce qui est de nature à compliquer encore davantage la "coexistence" entre les deux groupes. " Le Républicain s’explique : " Il est apparu que les insurgés de Kidal aient décidé de sévir contre le groupe salafiste pour des raisons évidentes de stratégie : entrer dans les bonnes grâces des Algériens. Ceux-ci, de leur côté, ne pouvaient que se réjouir de l’apport des "Kidalois" dans la croisade contre les salafistes. L’axe Teghargart (base des insurgés) et Alger était tout tracé et répondait parfaitement à cet adage : "L’ennemi de mon ennemi est mon ami".
Même si de l’autre côté, les autorités d’Alger continuent de "coopérer" avec les autorités maliennes en vue de l’application du pacte que le voisin a parrainé. " D’autant plus que Alger semble reprendre l’initiative dans une zone que les Libyens ont tenté d’investir à coups d’investissements et d’ouverture de services consulaires. Tripoli a ouvert la semaine dernière un consulat à Bamako, quelques mois après la fermeture de son consulat de Kidal à la suite de l’attaque dans cette ville de deux camps militaires par les ex-rebelles touareg, a indiqué l’AFP citant des sources diplomatiques. En fermant leur antenne de Kidal, huit mois après son ouverture, les autorités libyennes avaient déclaré à la presse malienne qu’elles ne souhaitaient pas être associées " à une opération de déstabilisation du nord du Mali ". Selon des commentateurs, cette décision s’expliquait également par le souci de la Libye de ne pas froisser son voisin algérien en donnant l’impression de vouloir étendre sa zone d’influence. " La Libye, en s’installant à Kidal, était dans le dos de l’Algérie qui a une frontière avec la région de Kidal. Les Algériens contrôlent toute cette zone saharienne et ils apprécient très peu le rêve d’un ”grand Sahara” que Kadhafi veut réaliser ", a indiqué à l’AFP un diplomate européen en poste à Bamako
Adiene MEDHI
“