Tout le monde s’attendait à une dégradation majeure de la situation sécuritaire dans le septentrion malien avec le retour massif de mercenaires touareg lourdement armés qui étaient partis combattre auprès de l’ex-leader libyen, Mouammar Kadhafi. Intégrés dans la Légion islamique, certains résidaient en Libye depuis des décennies. Les prémisses en étaient fournies par la recrudescence d’actes de grand banditisme isolés avec à la clé des braquages de véhicules, des enlèvements d’animaux…
L’attaque des localités de Ménaka, Tessalit et Aguelhok à partir du 17 Janvier atteste à suffisance que cette appréhension générale est, malheureusement, fondée.
Les affrontements se sont soldés, selon les derniers chiffres publiés par le ministère de la Défense, par 47 morts dont 45 du côté des assaillants et 2 du côté de l’armée et la destruction de plusieurs armes et véhicules de guerre appartenant à l’ennemi.
Des affrontements qui se sont donc soldés par suprématie de l’armée malienne. Selon les sources crédibles après cet épisode, les bandits armés reviennent régulièrement à la charge mais sont tout aussi mis en déroute par les forces républicaines.
Cette situation nous change quelque peu de la politique du sapeur- pompier et de la gestion calamiteuse des questions sécuritaires au septentrion à laquelle on nous avait habitués.
En effet, il faut saluer la proactivité – que nous n’avons jamais cessé d’appeler de tous nos vœux – dont les autorités compétentes viennent de faire preuve, pour une fois, dans la gestion politico-militaire du dossier sécuritaire du Nord-Mali. Même s’il faut quelque peu relativiser les choses car, en plus de renforcement militaire du septentrion, encore aurait-il fallu désarmer tous les mercenaires venus de la Libye, un mercenaire étant par définition quelqu’un qui est sans foi ni loi, quelqu’un qui est sans principes ni conviction ou, plus exactement, quelqu’un dont la seule conviction est l’argent.
Quid des motivations qui sous-tendent leurs actes crapuleux? On n’a pas besoin d’être un grand stratège pour comprendre que leur démarche est dénuée de tout fondement rationnel.
Les agresseurs appartiennent à un fantomatique mouvement national de libération de l’Arawak (MNLA) un mouvement créé, nous apprend-on, en juillet 2011 pour les besoins de la cause. Il regrouperait outre les mercenaires venus de la Libye, des éléments de l’Alliance du 23mai, quelques va-t-en guerre qui ont choisi de sortir du processus de paix. On apprend par RFI interposée qu’ils veulent une République dite de l’Azawad occupant tout le nord du Mali, soit les deux tiers de la République sous prétexte que les Touareg sont laissés pour compte par le pouvoir central. Alors que dans la réalité tout indique qu’il n’y a aucun problème Touareg au Mali.
A preuve, c’est bien un Touareg bon teint, le Colonel El hadj Gamou, dont loyauté et le patriotisme n’ont jamais été pris à défaut, qui a commandé les forces ayant bouté les bandits armés hors de Ménaka. Au demeurant, l’écrasante majorité des Touareg vivent en bonne intelligence avec les autres composantes de la société malienne.
Des Touareg qui sont plutôt bien représentés tant dans les hautes sphères politico-administratives et dans l’administration générale. Donc une prétendue marginalisation des Touareg au Mali n’existe que dans la tête de ceux qui le pensent au cas où ce n’est tout simplement pas un paravent dernière lequel ils se cachent pour entreprendre des activités criminelles aux motivations inavouables. Leurs actions ne sont de nature qu’à entamer la cohésion sociale et à annihiler les efforts de développement, la seule guerre qui mérite d’être menée dans un pays pauvre comme le Mali. Leurs actes sont d’autant plus répréhensibles qu’ils surviennent au moment où l’Etat malien, avec l’aide de certains de ses partenaires, est en train de mettre en œuvre dans la partie septentrionale du pays d’ambitieux programmes de développement. A l’image du Programme spécial pour la paix, la sécurité et le développement (PSPSPDN).
Autre preuve de l’isolement des aventuriers venus de la Libye, les Arabes du Mali, via la Coordination qui les fédère, a clairement condamné les agressions perpétrées par les bandits armés du soit-disant Mouvement national de libération de l’Azawad, ce qui tranche avec les événements survenus sous le régime finissant de Moussa Traoré et le début de la transition.
A ces événements qu’on pouvait assimiler à une vraie rébellion, la composante Arabe, à travers le FIAA, avait pris part. Ce front arabe était l’une des quatre entités constituant le Mouvement des fronts unifiés de l’Azawad (MFUA).
Fait assez rare pour être souligné, l’Union Africaine, par la voix du président de sa Commission, Jean Ping, est sortie de sa réserve pour condamner les actes perpétrés par les bandits armés du soit-disant MNLA et exprimer sa solidarité à l’Etat au peuple malien.
L’entreprise suicidaire et insensée de ces derniers ne serait elle qu’un problème de démobilisation après la débâcle Libyenne? Ou un projet fou d’un ramassis de désœuvrés manipulés par on ne sait quelle puissance occulte leur faisant croire qu’ils peuvent disposer de toutes les richesses potentielles (pétrole en tête) du Nord-Mali après y avoir créé une très improbable République de l’Azawad? Dans tous les cas, ils ne font que poursuivre un mirage dans le désert. Toujours est-il qu’ATT, devant le tournant que vient de prendre le dossier de l’insécurité au Nord, serait bien inspiré de continuer à jouer la carte de la fermeté face aux mercenaires venus de la Libye et autres aventuriers en mal de distraction.
D’abord, parce que ceux-ci n’ont pas d’argument à faire valoir. Mais surtout il urge de sécuriser le septentrion à quelques trois petits mois du début des élections générales de 2012 pour que celles-ci puissent se dérouler simultanément sur l’ensemble du territoire national. Et assurer ainsi l’intégrité territoriale.
Pour ce faire, il se doit de laisser les coudées franches à ceux-là mêmes qui sont chargés d’assurer la sécurité des hommes et des biens et leur fournir des moyens conséquents: moyens humains, matériels, logistiques. Conformément à un principe tout militaire: une mission, des hommes et des moyens.
Reste maintenant le traitement du dossier en question par RFI. Ici, on est bien obligé de constater une couverture très tendancieuse des évènements par la ”Chaîne mondiale”.
La preuve la plus éloquente de cette attitude est la diffusion des informations faisant état de combats particulièrement violents à Aguelhok. Combats au cours desquels le Colonel Major Mohamed Abderrahmane Ould Meydou, annonce RFI, aurait été grièvement blessé et évacué sur Gao où le Commandement opérationnel a pris ses quartiers.
Cette information a été démentie de la manière la plus cinglante par les principaux intéressés. En effet, à la faveur d’un flash spécial diffusé le 21 janvier par l’ORTM, le Colonel Major Mohamed Abderrahmane Ould Meydou, qui a pris une part très active dans la reprise en main de Ménaka, est apparu sur le petit écran rayonnant de santé aux côtés du Chef d’état major Général des Armées, le Général Gabriel Poudiougou, ,donnant des assurances sur la situation sécuritaire au Nord. Faisant au passage un pied-de-nez à ceux qui l’avaient donné pour blessé-voire mort et fustigeant les actes répréhensibles posés par les mercenaires venus de la Libye, les invitant à venir se mettre au service de la construction nationale au lieu de retourner leurs armes contre la patrie qui n’a commis comme seul péché que de les accueillir à bras ouverts.
Que la ”Radio mondiale” utilise le conditionnel ne la dédouane pas pour autant. Vu le caractère extrêmement sensible de l’information, elle aurait dû prendre, au nom du professionnalisme, la précaution élémentaire de la recouper avant de la diffuser. A se demander si ce ”manque de professionnalisme” ne participe pas d’une campagne d’intoxication destinée à saper le moral des troupes. D’autant que, auparavant, la même chaine avait prédit, via son correspondant au Mali, un certain Serge Daniel, l’ouverture d’un nouveau front à l’ouest. A croire que le journaliste s’était brusquement mué en oracle. Toujours est-il que l’initiative va au-delà du simple journalisme pour intégrer la sphère souterraine du renseignement et du nébuleux réseau de la France-Afrique qui, au regard de l’évolution géostratégique actuelle, ne cesse de perdre du terrain. Il est tout aussi vrai que la ”Radio Mondiale” nous a plutôt habitués à un traitement méditerranéen de l’information avec tout ce que cela suppose comme théâtralité. On dit tout et son contraire, à la différence du style anglo-saxon fait de rigueur et de grand professionnalisme.
Yaya SIDIBE