Rétrospection : Occupation du nord du Mali : Des négociations sans le principal concerné

6

Après le Mnla, c’est Ansar Eddine qui veut entrer dans la danse, en fait un ballet diplomatique entre Alger, Ouagadougou et Abuja. Le tout se joue sans le Mali, principale victime des islamistes et indépendantistes.

 

Ibrahim Ag Mohamed Assaleh (à g.), du MNLA, en conversation avec le ministre burkinabè des Affaires étrangères Dijbril Bassolé (à dr.) à Ouagadougou, le 9 juin 2012

Le ministre malien des Affaires étrangères et de la coopération internationale était à Ouagadougou, le week-end dernier. Le fait qu’il soit chez le médiateur en même temps qu’une délégation d’Ansar Eddine était pur hasard de calendrier. Pourtant au même moment, dans la capitale burkinabé, se discutait le sort de son pays, sans qu’il soit informé ou même consulté a fortiori impliqué.

En effet, le week-end dernier, les islamistes d’Ansar Eddine se sont montrés particulièrement actifs. A leur demande, un hélico de l’armée burkinabé a transporté une de leur délégation de Kidal à Ouagadougou. Conduite par Alghabass Ag Intallah, ancien député Adema, cette délégation avait pour mission d’entamer des négociations avec  le médiateur burkinabé sur la participation d’Ansar Eddine au processus en cours d’un retour à la normale dans le septentrion malien. Une perche tendue donc, mais une perche qui ne devrait être saisie qu’à deux conditions fondamentales: la renonciation à l’application de la charia islamique et la démarcation avec les groupes islamistes et terroristes, le Mujao  (Mouvement pour l’unicité et le jihad en Afrique de l’ouest) et Aqmi.

A Alger où une autre délégation se trouve présentement, puis à Abuja où les deux délégations se rendront cette semaine, il s’agit pour les émissaires d’Iyad Ag Ghaly de négocier la paix. Si le chef d’Ansar Eddine cède aux exigences de la Cédéao, en renonçant à l’application de la charia et en se démarquant des autres terroristes, il ne peut exiger en contrepartie qu’une seule chose: sa main mise totale sur la région de Kidal qu’il ne veut pas exposer aux effets ravageurs d’une guerre de libération. Comme en 1991. En effet, lors de la rébellion des années 1990, Iyad Ag Ghaly a été le premier chef rebelle à signer un accord de paix avec les autorités maliennes. A l’époque, sentant la cause perdue, le chef du Mouvement populaire de l’Azaouad (Mpa) s’est rallié, sous l’instigation de ses alliés algériens, à l’issue d’une rencontre tenue les 5 et 6 juin 1991 à Tamanrasset, avant même la signature du Pacte national, le 11 avril 1992 à Bamako. Iyad Ag Ghaly va-t-il rééditer ce haut fait ?  Très certainement si les négociations  et médiations continuent de se faire sans la participation effective des autorités civiles et militaires du Mali.

A Alger comme à Ouagadougou et certainement à Abuja, les négociations avec ces groupes criminels se font sans le Mali. Sous prétexte que le problème du nord est une question transfrontalière et internationale, un transfert de souveraineté s’est opéré en faveur de la Cédéao qui s’est saisie de la question malienne. Et joue seule sa partition, pour le compte de cette disparate communauté internationale. Or, on sait que les agissements du Mnla (Mouvement national de libération de l’Azawad) et même d’Ansar Eddine, tous deux des occupants au même titre que les autres, n’inquiètent pas outre mesure l’Occident. Pas seulement parce que tous deux sont composés essentiellement de Touaregs, mais parce qu’ils ne représentent pas de menaces directes contre ses intérêts. Que craint l’Occident ? Que des actes terroristes soient commis sur son territoire, que ses ressortissants soient enlevés et monnayés, que sa jeunesse soit intoxiquée par la cocaïne et d’autres drogues dures. Or, ces faits sont imputés aux groupes islamistes et terroristes que sont Aqmi et le Mujao. Lesquels ne s’en cachent pas.

Cependant, s’ils doivent payer pour leurs nombreux crimes passés, présents ou à venir, ceux-ci ne doivent pas être les seuls. Quelques soient leurs degrés de collaboration ou de participation à la lutte de reconquête, le Mnla et Aqmi doivent payer un jour pour les mains et les pieds amputés, pour les coups de fouet donnés en public, pour la lapidation à mort, pour les tortures morales et physiques, pour les viols, pour les vols. Au nom de toutes les victimes de ces deux bandes de criminel, il ne saurait y avoir aucune absolution. C’est ce message que le Mali, après s’être imposé dans les négociations, doit transmettre aux assassins et bandits qui ont pris les armes contre lui, contre leur pays.

Cheick Tandina

Commentaires via Facebook :

6 COMMENTAIRES

  1. Nous devons savoir que avec blaise compaore rien ne peux être à la vaveur du Mali.blaise était traite il est la pour le pétrole et le dollar.pourquoi nous devons négocier avec des algériens Mauritanie pour dirige notre pays.nous devons savoir que notre ennemi ce blaise assassin

  2. Mais pourquoi Ouaga et Alger n’invitent pas ces MNLA/ANESARDINE à venir s’installer chez eux ? A prendre la nationalité burkinabé ou algérienne ? Tout le monde serait heureux, parce que nous maliens dans notre immense majorité y compris surtout la grande majorité des touaregs, nous ne voulons guère commercer avec ces criminels, simplement parce que nous ne voulons pas être flagellé, amputé, estropié, saccagé, profané, volé, violé, assassiné, enlevé, exilé, sous-développé, exclavagisé ou drogué. A cause du MNLA/ANE SARDINE qui ont amené les djihadistes au Mali, tous les projets de développement, réclamés à corps et à cris par les nordistes depuis des décennies et dont l’exécution avait même démarré, sont suspendus : barrage de Taoussa, Route Niono-Tombouctou, Route Bourem-Kidal, etc. etc. Moralité : Seuls intéressent, le MNLA/ANESARDINE : i) le sous-développement du Nord Mali qui reste un fonds de commerce pour eux, un moyen de chantage continu de l’Etat malien pour disposer d’argent frais de temps en temps, ou d’un poste juteux pour leurs rares cadres ii) le trafic de drogues et d’armes, les enlèvements. Mais, c’est aux maliens d’accepter ou pas d’être des victimes éternelles…

  3. Le Mali n’aura la parole que de façon purement formelle. Les solutions seront trouvées sans lui et la communauté internationale a les moyens de lui imposer.

    La communauté internationale ne se fait aucune illusion sur le MNLA et Ançar-Dine. Ce sont des assassins et des gens sans parole. Elle vise juste à les sortir des combats. Mais l’Armee Malienne a aussi ses crimes et exactions. Tortures des berets rouges, precheurs mitraillés, et surtout le récent massacre de touaregs pres du camp de Diabaly, leur rappelant d’autres massacres de ce type dans des guerres précédentes. Avec les intimidations à la presse et le racket des populations, y compris de ceux fuyant le Nord, cela fait beaucoup. Mais militairement ils ont perdu Douentza et sont incampable de tenir une ligne de front étanche. Par contre ils tiennent le gouvernement. Voici pourquoi la parole des Maliens n’est pas entendue. De la corruption d’ATT à l’empireur SANOGO, la tete de l’Etat n’est plus crédible.

    Aux Maliens de reproduire ce qu’ont fait leurs parents en mars 1991 en chassant Moussa TRAORE. Puis en sachant lutter contre la corruption sous toutes ses formes, ce qui sera bien plus difficile qu’un simple changement de numéro de la Republique.

  4. Alger a des intérêts dans la région de Kidal et veut que les frappes ne s’arrêtent qu’à Gao et à Tombouctou! C’est simplement le jeu! Il faut donc tout faire pour écarter ançardine du conflit, et, du coup, écarter Kidal!

  5. Merci Monsieur, Vous avez donné une description et une analyse tres pertinentes de la situation, sans oublier son évolution historique. Mais, un fait marquant manque à votre analyse : le coup d’état du 22/03/12. Votre analyse l’occulte complètement, comme s’il n’avait pas eu lieu, ou comme si c’était un fait mineur, alors même que ce coup d’état est considéré par beaucoup comme la cause immédiate qui a précipité le chutte du Mali, sans pour autant n’avoir su apporter la moindre petite reponse au problème pour lequel il a semblé avoir été commis. Peut etre que je ne suis pas dans la même logique que vous, mais en réalité, je suis parmis ceux qui considère que le coup d’état a non seulement affaibli et divisé l’armée la rendant innopérante pour un certain temps, mais, a engendré un grave bouleverement de la structure socio politique et institutionnelle du pays, faisant ainsi deborder la crise du nord sur le terrain socio politique, ou, pendant des mois, elle a été le déclencheur de la grande discorde et de la division radicale de la classe politique malienne. Mais au dela, la conséquence la plus marquante du coup d’état a été l’isolement du Mali, le départ des partenaires et des investisseurs avec suspension et arrêt de la coopération économique et financière de la plupart des partenaires au dévellopément du pays. Tous ces facteurs découlant directement du coup d’état, n’ont eu comme effet que d’aggraver la crise et rendre plus complexe et plus improbable toute recherche de solution.

    Votre analyse aurait donc été plus complète a mon avis, si elle n’avait pas occulté cet autre haut fait qui, à l’intar de l’occupation des 2/3 du pays par des mouvements insurgés, laissera des empruntes indélébiles dans l’histoire de notre pays.

  6. Le nord du Mali, le jeu de dupes d’Alger et la danse avec le diable de Ouaga.

    Installée depuis le début des années 2000 dans les montagnes du Tagharghar du nord malien, la nébuleuse Alqaïda dans sa version saharienne battant pavillons algérien, mauritanien, sahraoui et nigérian, a fait de l’industrie du crime organisé et de la prise d’otage un juteux business de Satan.

    Qui ne se souvient pas de Pierre Camatte, l’espion français du nord du Mali, enlevé et vendu à la nébuleuse puis relâché par elle après qu’ATT, sous l’intense pression sarkoziste pilotée par Claude Guéant, et la justice malienne aient libéré des djihadistes mauritaniens et algériens de la nébuleuse détenus dans les prisons maliennes.

    Ire et désapprobations jusqu’aux rappels d’ambassadeurs à Nouakchott et à Alger qui avaient demandé, en vain, l’extradition des fous de Dieu devenus des canons à chair de la très encombrante nébuleuse.

    Pierre Camatte est sauvé au grand soulagement du président Sarkozy, qui gratifiera la nouvelle d’une visite éclaire et nocturne dans un palais de Koulouba mal éclairé à Bamako.
    Mais le Mali est dépeint par ses voisins du nord, à juste titre d’ailleurs, comme le “maillon faible” de la lutte anti terroriste au Sahel même si le président ATT s’en défendait “qu’il n’y a même pas de maillon”.

    Après pierre Camatte, c’est au tour de Michel Germano, un autre français, enlevé au Niger et conduit dans le sanctuaire de la nébuleuse au nord du Mali, puis exécuté par le conglomérat du terrorisme.

    La France est vénère, elle accentue sa coopération militaire avec les états du Sahel avec comme partenaire privilégié la Mauritanie d’Ould Abdel Aziz qui fait des sorties sporadiques sur le territoire malien avec des raids aériens contre les djihadistes d’Aqmi.

    Mais cela ne suffit pas, deux autres jeunes français en voyage de mariage en plein Niamey, sont enlevés et périssent dans des conditions mystérieuses après une course poursuite tragique avec les armées nigérienne et française encore sur le territoire malien.

    La France est sous le choc, le Niger est humilié et le régime ATT continue sa politique de l’autruche quant à la sécurité au Sahel car pour sécuriser nos frontières ATT ne jure que d’une conférence sous régionale voire internationale pour lutter contre l’Aqmi et ses acolytes.

    Mais l’Algérie ne le veut pas, elle ne veut surtout pas voir ATT prendre un quelconque leadership dans le Sahel, l’initiative si initiative il devrait avoir doit venir d’elle, elle qui se bat depuis les années 90 contre les islamistes du Front islamique du Salut, du GSPC, groupe salafiste pour la prédication et le combat, avant qu’il ne devienne Alqaïda au Maghreb Islamique, Aqmi, avec comme chefs connus, Abdelhamid Abou Zaid, Mokhtar Belmokhtar et
    Abdelmalek Droukdel, tous algériens bon teint et très bien connus des services de renseignement algériens.

    En même temps, la crédibilité du régime ATT à faire face efficacement à l’Aqmi est sérieusement mise à mal, non seulement à Alger, mais aussi à Nouakchott et à Paris.

    La crise libyenne déborde sur le Sahel, sans que l’Algérie et le Niger nous disent comment d’impressionnants convois d’armes lourdes ont pu traverser leurs vastes territoires en provenance de Libye pour atterrir au Mali.

    La naïveté du régime ATT permet de les recevoir sans les désarmer, la guerre se préparant contre nous avec le Mnla, l’aile politique des rebelles, confortablement reçu à Nouakchott et dans les capitales européennes notamment à Paris.

    Après le déclenchement des hostilités en janvier 2012, la complicité mauritanienne est patente avec les rebelles touareg, l’Algérie et le Niger assurent une vigilance maximale à leurs frontières et la France de Sarkozy laisse faire la “guerre à huit clos”.

    L’Algérie et la Mauritanie essaient de dissocier le problème Touareg (politique selon elles) de l’Aqmi (terroriste) quand bien même qu’elles savent pertinemment que les rebelles touareg et les terroristes combattent ensemble la même armée malienne sur le même territoire sans que personne ne lève le petit doigt pour aider le “maillon faible” de la lutte anti terroriste au Sahel.

    Alors les villes maliennes tombent comme des mouches et on jubile un peu partout autour du Mali en se mentant à soi même que ce sont les touareg qui ont chassé l’armée malienne et occupent désormais les deux tiers du pays dans sa partie nord, ironiquement appelée Azawad.
    Mais la nouvelle jouissance sous régionale va vite tourner au cauchemar quand les Fanfarons du Mnla, portes ustensiles bon marché de l’Aqmi dès le début, se font chassés comme de vulgaires malpropres par leurs alliés du Mujao à Gao et à Ansongo.

    Blaise Compaoré devient l’hébergeur attitré des apatrides nature du Mnla avec son secours héliporté au nom d’une médiation qui ne dit pas son vrai nom.

    À quoi joue Blaise, quand il ne jure que pour des négociations alors que l’ONU sous les pressions de la France de Hollande a, à travers la résolution 2071, sommé la Cedeao de lui offrir un plan d’intervention militaire détaillé dans les 45 jours?

    Qu’il sache qu’après tant de crimes et de délits aggravés auxquels les membres du Mnla, d’Ansar dine et de leurs spadassins du conglomérat du terrorisme ce sont rendus coupables au nord du Mali, aucune négociation ne sera acceptée par le peuple malien sans que justice soit faite.

    A quoi joue l’Algérie quant elle exige une négociation avec Ansardine d’Iyad Ag Ghali (Avatar de l’Aqmi) et qu’elle s’oppose à une résolution de l’Onu, la 2071, jusqu’à faire déplacer Hillary Clinton en personne pour nous dire finalement que les “discutions vont continuer entre experts”?

    Quelles discutions et quels experts pour afin se débarrasser du terrorisme au Sahel auquel l’Algérie rame depuis le milieu des années 90 et ce malgré ses 34 000 milliards de Francs CfA annuels de budget d’état?

    À force d’aller négocier des cuisses de poulet à Alger, les régimes Alpha et ATT ont permis à Boutefika et à ses généraux de se croire tout permis avec le Mali.

    Une chose est certaine toute négociation qui fera échapper les renégats du nord à la justice malienne trouvera les maliens sur sa route et l’intervention militaire au nord du Mali doit se faire avec ou sans l’Algérie pour y déloger l’obscurantisme moyenâgeux qui y dicte sa loi.

Comments are closed.