Depuis 2002, je suis surpris par la situation politique de mon pays. Dois-je comprendre que les idées politiques d’un groupe sont parfaites et que ce groupe a les capacités intellectuelles parfaites pour diriger et pour développer mon pays ?
J’accepte le consensus, vu que je reconnais que ce n’est pas moi qui pourrais orienter la pirogue. Et si tous ceux qui disaient pouvoir le faire changent d’avis, alors l’homme qu’il faut est à la place qu’il faut. Et puis j’ai voté pour lui, allez vérifier si vous voulez (je suis sûr que c’est faisable de vérifier les votes dans ce pays, vu l’évolution des choses). Alors je ne peux pas parler de mystification, ni de populisme, ni de despotisme, ni même de mensonge professionnel destiné à aveugler les esprits sensibles. Même si je le pensais, je ne le dirais pas. Parce que j’ai contribué à la situation actuelle en votant. Et que si je devais voter demain, je voterai encore pour la même personne (mais cette fois parce qu’il n’y a pas d’adversaire).
On m’a dit qu’un adversaire sérieux se profilait à l’horizon, bien reluisant dans son boubou blanc, et que, tel un héros des mille et une nuits, il viendrait nous sauver sur son cheval blanc. Mais en regardant bien dans le ventre de la pile, j’ai reconnu Monsieur mille et une nuits qui, à une époque, n’était qu’un spécialiste en ivrognerie, un despote illuminé ne se complaisant que dans la magnificence, les compliments et la vantardise. Et je pense même (je peux me tromper, on est en démocratie, arrêtez-moi) que quand j’étais étudiant, ce même ivrogne avait ruiné les caisses de mon pays. Quand j’ai grevé, ce même ivrogne m’a rappelé que si je ne rentrais pas en classe, ses enfants me dirigeraient comme leur père a dirigé mon père. Parce que leur père est bourgeois, et ils étudient dans les meilleures universités canadiennes.
Je sais que c’est ridicule et cruel de le dire comme ça, mais ce sont les mots de l’auteur, respectons le copyright. Je suis donc retourné sur les bancs, et maintenant on est tous diplômés. Mais un sage ivrogne disait que « l’égalité n’existe pas et il n’existe pas sur cette immense planète deux gouttes d’eau qui aient exactement le même nombre de molécules assemblées de la même manière au millimètre près ». Alors ses enfants me dirigeront peut-être, mais j’aurais fait ce que j’ai à faire. Et vu que l’égalité n’existe pas plus que les mille et une nuits, revenons à nos politiciens. Les vrais.
Donc, pour ne pas voter pour des énergumènes qui cachent leur idiotie aussi bien que le numéro de leur portable, je voterai pour mon militaire préféré en 2007. Comme je l’ai fait en 2002. Et puis, en 2002, il y avait d’autres raisons. L’insécurité devenait croissante dans la sous région, et je pensais qu’un militaire serait mieux qu’un autre pour me protéger. La constitution de mon pays, à l’article …… dit que je suis en sécurité, et à l’article ……….. me garantit que mon pays est uni et indivisible. Et avec ces histoires de pétrole dans l’air, je ne veux pas ressembler à un Libéria, une Côte d’Ivoire ou encore bien d’autres pays de la sous région qui se sont déchirés en dix mille morceaux sous dix mille prétextes dont le résumé est la richesse.
Vu que le militaire m’avait libéré en 1991, je me suis dit qu’il arriverait peut-être à me protéger de l’insécurité grandissante. Alors j’ai voté pour lui. Et c’est là que le bât a blessé. Des machin-bouzouk (oups) ont décidé de prendre mes armes, et d’aller se cacher là où le militaire aurait eu peur d’aller les chercher. Et le militaire a eu peur d’aller les chercher. Et moi je me suis demandé pourquoi. Mais le temps de trouver une réponse, le militaire et d’autres militaires ont lancé une campagne de communication digne de la célèbre O. communication. Je crois que trois experts en marketing n’auraient pas fait mieux. Car les messagers étaient bons, c’est le message qui était confus. Mais que fallait-il retenir ? Que la paix est préférable à la guerre. Que la stabilité est une valeur sûre que nous ne perdrons pas. Je dis oui. Je suis d’accord, et si j’ai voté « militaire », c’était pour ça. Il faut aussi retenir que s’il faut faire des sacrifices ridicules pour la stabilité, nous n’hésiterons pas. Je dis non, je n’ai pas voté pour ça (mais si je devais voter en 2007, je voterais pour ça, car il n’y a rien d’autre au menu).
Nous ne pouvons pas nous permettre, Monsieur. Sinon, toute personne qui a les moyens de faire une petite pression ou qui sait où et comment voler des armes, a le même pouvoir que vous, Monsieur. Et ce n’est pas ce qu’on s’était dit vous et moi. Je sais que vous êtes intellectuel, pardon, intelligent (pardon du lapsus linguo-clavierae, oups), et que vous savez que quand ça commence comme ça, ça ne s’arrête plus. 15 ans ont séparé les rebellions de 91 et de 06, mais je suis sûr qu’à ce rythme là, la prochaine est pour très bientôt. Et vous le savez aussi bien que moi. Les mêmes idiots récidiveront très bientôt, dès que ce qui a été obtenu illégalement sera épuisé (et je n’incite pas à la violence, j’énonce des faits). Et si votre but exact est de retarder la prochaine rébellion le temps que nous vous remettions au pouvoir, c’est une méthode. Mais ce n’est pas LA méthode. Nous vous aurions réélu quoiqu’il arrive, car dans le monde politique, personne n’a vraiment l’envie (j’ai failli dire le courage, heureusement je me suis retenu) de s’opposer à vous.
Alors, Monsieur, pourquoi ne pas réagir en soldat ? On discute avec des terroristes, oui. On ne négocie pas avec des terroristes. Non, jamais. Car c’est bien de terroristes qu’il s’agit, appelons le chat par le chat. Un cheval n’est pas un âne de race pure. Et nos amis ne sont pas des combattants à la recherche de développement d’une région quelconque. Ce sont des terroristes, les mêmes terroristes qui nous prennent en otage et nous tuent à chaque fois. Et ces terroristes là, s’ils savaient signer des accords, c’est qu’ils savaient tenir un stylo. Alors il aurait été plus simple de tenir un stylo et de revendiquer par les moyens qu’autorise tout état de droit : le dialogue.
A partir du moment où ils ont pris les armes, il fallait les rendre, sans autre choix. Et ensuite, on aurait signé des accords, et peut-être, pourquoi pas, ici à Bamako. Car, si la situation était maîtrisable et maîtrisée comme vous nous l’avez fait savoir depuis Diéma, on n’avait pas besoin du savon du voisin pour laver notre linge sale. Mais comme d’habitude, on a cédé au chantage (enfin, c’est ce que j’ai cru comprendre), mais en faisant croire au peuple qu’on est sortis vainqueurs. Mais comme vingt deux millions d’yeux et vingt deux millions d’oreilles ne peuvent pas être dupes en tous temps (il y aura toujours un Galilée qui vous dira que la terre est ronde) quelques langues se sont dénouées (presque onze millions, je crois).
Vous me direz que des voix se lèvent partout et en tous temps, et que là où il n’y a pas de mécontents, il n’y a pas de démocratie. Je vous répondrai que c’est vrai, et que c’est cette situation sans mécontents et sans démocratie que j’appelle un consensus. Et j’ajouterai que la force de celui qui a raison, dans un pays de paix et de dialogue, c’est de savoir répondre en tous temps aux différentes accusations des mécontents.
Vous voyez, Monsieur, sans aucune ironie, je me sens responsable de vos agissements, car je suis allé voter et tapager dans la rue jusqu’à ce que vous arriviez là où vous êtes. Alors je vais vous proposer des solutions à tout ceci.
Solution N°1 : Vous épluchez tous les journaux contradictoires, tous les articles et émissions audiovisuels qui sont apparus depuis les accords d’Alger. Vous prenez toutes les questions difficiles que le peuple se pose, et vous y répondez, jusqu’à ce que la majorité du peuple (pas tout le monde, ce n’est pas un consensus, et on ne peut pas toujours tous suivre comme des moutons) soit convaincue.
Solution N°2 : Si la solution N°1 n’est pas faisable, alors renvoyez quelqu’un à Alger, dans la même salle, déchirer les mêmes accords. Ce serait très symbolique, et ça recollerait sûrement nos cœurs brisés. A la super-glue même! Ensuite, vous retourneriez mater qui de droit, par devoir, parce qu’il a violé les règles fondamentales de notre paix sociale et de notre si chère constitution. Et si vous avez besoin d’aide, je vous suivrai dans le maquis, avec tous ceux qui croient en l’intégrité et en l’unicité de notre pays. Je me battrais plutôt que de céder à des revendications ridicules et signer des accords bizarres. Car j’ai fait un serment comme vous. Et comme tous les Maliens. J’ai dit à ma chère nation, «si l’ennemi présente son front, au dedans ou au dehors, debout sur les remparts, nous sommes résolus de mourir, pour l’Afrique et pour toi, Mali ». Et je tiendrai parole plutôt que d’officialiser et d’intégrer des terroristes à mon pays.
La dernière solution, Monsieur, est de froisser ce document que vous êtes en train de lire, et de le jeter à la poubelle. Ensuite, vous continueriez votre petit chemin vers la réélection. Comme ça, tous ceux qui ont un peu de force pourront acquérir une région du pays. On pourrait même faire des soldes et des promotions pour les régions les moins riches. On n’aurait plus besoin de mairie pour acquérir les terres. La décentralisation et tous nos autres combats deviendraient nuls et non avenus. Pour posséder une région, il suffirait de savoir se battre ou de savoir braquer les casernes. Un jour, pourquoi pas, on privatiserait la Présidence.
Non, Monsieur, ne nous expliquez pas ces accords, nous ne pouvons pas les comprendre. Parce qu’ils sont écrits dans la langue de notre cerveau, mais dans une langue que notre cœur ne comprend pas. Or, pour nous les Maliens, tout est dans le cœur. Et vous nous avez prouvé, à maintes reprises, que pour vous aussi.
Vous nous avez montré que le pouvoir vous intéressait moins que le bien-être du pays.
Ne commencez pas, avec vos consensus et vos accords, à nous faire penser à ceux qui modifient les constitutions pour rester à vie. Il y a un début à tout et, à l’ère du téléphone portable, de la fusée sur la lune, du Hummer II Sport (oups, qu’est ce que je raconte encore), ne pas être contredit peut-être vu comme un début de mobutisme (oups) ou de bokassisme (oups). Ouvrez le débat. Et si personne ne veut débattre, poussez les gens qui se battent entre eux pour porter votre sac à retourner s’opposer. Car de ses ennemis, souvent, on tire de bonnes leçons. Et on a besoin d’adversité pour savoir ce qu’on vaut. Car c’est le combat qui rend l’homme fort, pas l’entraînement. Et si vous remportez les élections, vous en sortirez plus aguerri et autant respecté que quand je vous aimais à la folie.
Ne me faites pas regretter de vous avoir mis là où vous êtes. Personnellement, je reconnais que vous oeuvrez dans la voie du développement, car je suis dans le domaine et je vois vos réalisations. Je vois le boulot abattu. Et j’en suis fier, car j’y participe. Et le pays vous doit une fière chandelle pour ça.
Mais il existe des dossiers où je me demande si les décisions viennent de vous, ou si nous sommes en présence d’une lobotomie ou d’un lavage de cerveau digne des grands films SFX d’Hollywood. Comprenez-moi, je ne peux pas être d’accord avec vous sur tous les plans. Je ne suis pas très « consensussiste ».
Merci de votre attention. Un fils du pays.
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