Signé en grandes pompes et en deux phases à Bamako, sous l’égide de la communauté internationale, après de longs mois d’intenses tractations à Alger, l’Accord de paix et de réconciliation de Bamako vient de connaitre son plus sérieux blocage. Pour cause, les affrontements entre la milice d’auto-défense, le GATIA et la CMA à Kidal. Ce énième blocage portera un coup sérieux sur le tout processus et jettera encore une fois le discrédit sur le gouvernement qui endossera avec la MINUSMA l’entière responsabilité de l’impasse. En quoi le gouvernement et la MINUSMA sont-ils responsables de cette situation ?
La responsabilité du Gouvernement est dans la lenteur de la mise en œuvre de l’Accord
De la signature de l’accord le 20 juin 2015 jusqu’à l’affrontement du samedi 15 Août de la même année, le processus de mise en œuvre n’a pas bougé d’un Iota. Le premier instrument de la mise en œuvre de l’Accord qui est le Comité de suivi tarde à se mettre en place et cela pour des raisons mineures. Qui ne s’était pas réjoui de la nomination du représentant du président de la République aux pourparlers inter-maliens au poste de Premier Ministre ? La nomination de M. Modibo Keita à la Primature a été saluée pour deux raisons, d’abord pour avoir dirigé avec brio les négociations, mais aussi et surtout pour sa profonde connaissance du Mali, son expérience et ses qualités intellectuelles et morales. Aujourd’hui à la tête du gouvernement il a libéré un poste stratégique dont le vide plane sur tout le processus de paix qui est dans l’impasse totale. S’occuper de ce dossier est tout un métier à part qui ne peut s’accommoder avec la gestion primatoriale d’un pays à relever. Ou le président nomme un nouveau haut représentant aux pourparlers de paix, une personnalité aussi respectée comme le Premier Ministre, ou il se choisit un nouveau PM en ramenant M Modibo Keita à la présidence exclusive du Comité de suivi de l’Accord. Donc, il ne fait l’ombre d’aucun doute que la lenteur observée dans la mise en œuvre de l’Accord est de la responsabilité du gouvernement. En effet, la solution à cette sempiternelle crise est à trouver dans la promptitude et la diligence avec lesquelles le gouvernement traitera ce dossier. Il ne peut plus continuer à trainer les pieds ou à jouer aux sapeurs-pompiers, il lui faudrait surtout savoir anticiper pour gouverner. La preuve de ce manque d’anticipation est son incapacité réunir autour de la table le premier gouvernement post-crise qui était attendu dix à quinze jours après la signature de l’Accord. Mais déjà deux mois se sont écoulés que toujours rien n’est fait, laissant la situation s’enliser et les belligérants s’en remettre aux armes comme à la case de départ.
De la Responsabilité de la MINUSMA
Quant à la MINUSMA, sa responsabilité est d’autant plus engagée que l’on se pose très souvent la question de savoir si elle est réellement là pour le maintien de la paix au Mali ou pour la préservation des intérêts d’une minorité ou de la France ? Pourquoi une zone de sécurité de 20 km à la ronde autour de la seule ville de Kidal, alors qu’au même moment on attaque un camp à Gourma Rharous, on égorge un imam à Mopti. Il ya deux poids deux mesures. La force internationale de maintien de la paix est en passe de devenir la force de partition ou d’occupation du Mali, en aidant la CMA à réaliser le rêve qu’elle a toujours caressé celui de voir le Mali coupé de son Kidal stratégique pour la France. Si Kidal devait échapper au Mail, qu’à Dieu ne plaise, ce sont d’autres forces du mal qui viendront déloger la CMA et créer un nouveau DAESH au Sahara africain avec des Katibas qui menaceront la sécurité de toute l’Europe. L’autre idée qui reste très répandue au sein de l’opinion publique malienne est sans nul doute le relan raciste de la MINUSMA. Défendre une minorité de la Minorité qui ne réclame que leurs droits en tant que minorité n’est pas récusable en soi, mais la défendre contre vents et marées avec la seule volonté de prendre en otage toute une République en revendiquant la paternité d’un territoire qui n’ a jamais été autre que malien, est comme vouloir une nouvelle conférence de Berlin 50 ans après les indépendances africaines. La République de l’Azawad est une chimère, un rêve d’illuminés fous qui n’a ni fondement juridique, historique, social, culturel et économique encore moins géographique.
Vivement la reprise en mains par le gouvernement de ce dossier du nord en posant des actes concrets au lieu d’inonder nos medias de communiqué de protestation et de condamnation, comme il sait si bien le faire. Gouverner c’est bien et toujours anticiper.
Youssouf Sissoko