“Je mesure dans toutes les dimensions ces défis qui sont aujourd’hui ceux de la République du Mali. Mais le sort a voulu que je sois là ce matin, investi comme Chef d’Etat. Je ne me déroberai ni à mon destin ni à mes responsabilités. Il ne saura y avoir pour moi que le Mali, qu’un Mali ressaisi, un Mali réunifié territoirement, humainement et spirituellement. Le tissu national est éprouvé, le recoudre demandera un immense effort de nous tous et de nous toutes. J’ai l’honneur et la fierté d’être l’aiguille et à tous les Maliens et à toutes les Maliennes de la classe politique, de la société civile, à nos corps en tenue, je dis ceci : sI tous oublient leurs appétits, leurs ambitions, leurs calculs et leurs supputations du moment, alors ils seront sans aucun doute ce fil dont l’aiguille a besoin pour coudre. Le bateau Mali vient d’essuyer une lame d’une violence inouïe, mais il n’a pas chaviré et il ne coulera pas. Mes chers compatriotes, j’accepte d’être pour un temps, le capitaine de ce bateau au bord duquel nous nous trouvons tous, je compte sur vous tous et vous toutes pour le mener à bon port”.
Une attaque inhabituelle, et surtout longue, mais à la dimension de l’homme qui tenait ces propos le 12 avril 2012, devant le Président de la Cour Suprême, un jour où seuls des doutes et des incertitudes régnaient au Mali, à savoir le Pr Dioncounda Traoré.
Nous avons voulu commencer cet article par ces propos du président Dioncounda Traoré annonçant l’entame d’une expérience, pour ne pas dire une parenthèse qui, justement, prend fin aujourd’hui avec l’entrée en fonction du nouveau Président de la République élu à l’issue d’une élection qui fera longtemps cas d’école au Mali, en Afrique et ailleurs. Oui, le “bateau Mali a essuyé une lame d’une violence inouïe”, mais il n’a pas chaviré, car le capitaine qui a accepté d’être d’une “aiguille” par recoudre le tissu social éprouvé est parvenu, avec les Maliennes et les Maliens qui ont accepté d’être un fil pour l’aiguille, à amener le bateau Mali à “bon port”. Toute chose qui n’était pas du tout évidente, il y a un an.
Oui, pour la première fois depuis le 17 janvier 2012, le Mali fêtera son indépendance, “libre” du joug des terroristes et “exerçant” sa souveraineté sur l’ensemble de son territoire. L’occupation des 2/3 du territoire par une horde de terroristes, de narcotrafiquants et de rebelles touaregs n’est plus que triste souvenir.
Le Mali, sous la conduite du Gouvernement de transition, avec l’aide et l’assistance de la France, de la Cedeao, de l’Union Africaine, de l’Union Européenne, de l’Organisation des Nations Unies et de divers partenaires, a fini par recouvrer l’ensemble de son territoire national. Tout ne fut pas rose, et des embûches sur le chemin n’ont pas manqué, mais le Mali s’est relevé.
Le Président Dioncounda Traoré n’annonçait-il pas la couleur dès le jour de son investiture, le 12 Avril 2012 ? “J’ai conscience d’être le Président d’un pays en guerre qui doit retrouver la paix sans tarder… Je suis le Président d’un pays qui aime la paix et qui appelle tous nos frères et sœurs des mouvements rebelles à revenir sous l’ardre à palabre, à rentrer dans les rangs et à renforcer cette nation au lieu de la diviser. Je leur demande d’arrêter toutes ces exactions, ces pillages, ces viols. Je leur demande de quitter ici et maintenant les cités qu’ils ont occupées. Je leur demande avec insistance et fermeté… Nous n’hésiterons pas à mener une guerre totale et implacable pour recouvrer notre intégrité territoriale, mais aussi pour bouter hors de nos frontières tous ces envahisseurs porteurs de désolation et de misère, que sont Aqmi et tous ces trafiquants de drogue qui opèrent depuis trop longtemps au Nord de notre pays, de même que tous ces preneurs d’otages qui discréditent notre pays et portent un préjudice incommensurable à notre développement. Cela doit être compris de tous : nous ne négocierons jamais la partition du Mali”.
Ce discours mémorable du 12 avril 2012, n’a pas amené à la raison, les envahisseurs des régions Nord du Mali. Autant ils multipliaient des exactions de toutes sortes, autant le gouvernement de la transition travaillait à garantir le succès de la guerre de libération du territoire national, multipliant des ballets diplomatiques entre Abidjan, Cotonou, Bamako, New-York, Paris et Bruxelles afin de peaufiner les préparatifs de la reconquête des territoires occupés.
Il fallait travailler à un plan stratégique africain, ouvert à d’autres pays qui le souhaitaient, mais qui devrait s’exécuter dans le cadre de l’Onu, pour garantir toute la légalité internationale que recommande la gestion d’une telle crise. Là aussi, des luttes intestines ont fortement entamé le rythme de ce processus.
Des réunions du Comité des Chefs d’états-majors de la Cedeao aux différentes manifestations des groupes de soutien à l’intérieur du Mali, en passant par des sommets de Chefs d’Etat de la Cedeao et de l’Union Africaine, le vote d’une résolution de l’Onu prit corps avec la requête du Président Dioncounda Traoré adressée, le 01 Septembre 2012, à la Cedeao, et à l’Union Africaine, lesquelles à leur tour ont formulé la demande auprès de l’Onu.
Le 15 septembre 2012, les chefs d’états-majors de la Cedeao peaufinent un plan soumis aux chefs d’Etat. D’autres rencontres suivirent, mais l’élément déterminant qui aura accéléré le processus est sans doute la sortie remarquée du Président français, M. François Hollande, le 26 septembre 2012 à l’Onu, en faveur du Mali.
Le Président François Hollande a plaidé, ce jour-là, en faveur du Mali en ces termes : “Il n’y a pas question de négocier avec les terroristes. La France soutiendra le Mali dans tout… Un moment, la communauté Internationale doit prendre ses responsabilités pour le Mali, pour le Sahel. Ce moment est venu ”.
Dans la même foulée, M . Hollande demandait à l’Onu d’aller vite dans la mise en ouvre du processus d’envoi d’une force de stabilisation au Mali. Et le 12 octobre 2012, l’Onu adoptait la résolution 2071 autorisant l’envoi d’une force internationale sous l’égide de l’Afrique au Mali.
Une semaine après, se tenait à Bamako la réunion du Groupe d’Appui et de Suivi sur la situation au Mali. Une rencontre qui a conduit à l’adoption d’un plan d’action militaire par les chefs militaires de la Cedeao et de l’Union Africaine, appuyés par des experts de l’Onu et de l’Union Européenne.
Les choses continuaient à se mettre en place aussi pour la reconquête des régions du Nord du Mali. Le 20 décembre 2012, le Conseil de Sécurité de l’Onu adopte la résolution 2085 autorisant le déploiement sollicité.
Trois semaines après, comme pour défier la communauté Internationale, les groupes terroristes attaquaient l’Armée malienne dans la localité de Konna. Mais leur avancée vers le Sud est stoppée par l’aviation française le 11 janvier 2013 au petit matin. Ainsi naissait l’“Opération Serval”, marquant l’entrée de la France dans la guerre de libération du Mali, sur demande des autorités de transition, notamment le président de la République par intérim. Une intervention s’inscrivant dans le cadre de la résolution 2085 de l’Onu, sous le chapitre 7. La suite est connue.
A ce jour, il n’y a pas un seul centimètre du territoire national où ne s’exercent la souveraineté et l’autorité de l’Etat malien. Cela grâce à l’appui et l’assistance de l’Afrique, de la France, et du reste du monde, mais aussi et surtout grâce à la volonté qui animait le Gouvernement de transition sous l’autorité du président Dioncounda Traoré et du Premier ministre Diango Cissoko.
A eux, et aux Ministres qui ont servi avec loyauté, engagement et don de soi, la patrie leur est reconnaissante à jamais.
La Rédaction