Au moment où toute la communauté internationale est au chevet du Mali en vue des pourparlers inclusifs de paix entre le gouvernement et les groupes armés du nord et que la société civile se mobilise pour entamer la réconciliation nationale, on assiste, malheureusement, à un regain de tension entre les communautés suite à la recrudescence de la violence et de l’insécurité dans les régions nord du pays. Les attaques contre les civils se multiplient. L’armée aussi fait l’objet de provocations de la part du Mnla. Constat : aujourd’hui, il n’est pas exagéré de penser que le processus de réconciliation a du plomb dans l’aile…
Malgré l’Accord préliminaire de Ouagadougou signé le 18 juin dernier entre le gouvernement et les bandits armés qui devraient aboutir à l’instauration d’une certaine quiétude dans les régions du nord en vue d’imprimer la sérénité aux négociations, l’insécurité couve toujours dans ces zones. Cela, malgré la présence des forces étrangères. La preuve : le 4 mars dernier, des échanges de tirs ont eu lieu entre la patrouille de l’armée malienne appuyée par la Minusma et des éléments du Mnla à Kidal. Le lendemain, le Mnla a accusé l’armée malienne d’avoir ciblé un de leurs chefs qui serait même blessé.
Le gouverneur de la région de Kidal, Adama Kamissoko, a apporté un démenti à cette affirmation. Ce qui dénote de la reprise des velléités dans la région. Ceci fait suite à plusieurs incidents déjà enregistrés dans les différentes régions du nord au cours des mois qui ont suivi l’arrivée du président Ibrahim Boubacar Keïta à la présidence de la République le 11 août 2013. Le 6 février 2014, des violences intercommunautaires ont opposé Peulhs et Tamasheqs dans la localité de Tamkoutat (Gao) faisant 30 victimes, le mardi 11 février 2014, des forains ont été dépouillés de leurs marchandises à Tombouctou dans la localité d’Agal (Commune de Lafia), le 8 février 2014, cinq agents du Cicr dont 4 humanitaires et un vétérinaire, ont été enlevés par les djihadistes à Annéfis (Kidal). Au mois de décembre 2013, des casques bleus sénégalais ont péri dans un attentat Kamikaze à Kidal. À cela, s’ajoutent les tirs d’obus des djihadistes sur les villes de Tombouctou et Gao. Les faits sont assez illustratifs, la violence fait légion dans le nord. Faits attribuables au retard accusé dans le processus de réconciliation. Dans ces conditions, on peut penser que la commission qui sera mise en place aura du pain sur la planche. Surtout quand on constate que cette Commission vérité justice et réconciliation peine à naitre après deux reports successifs de la session d’adoption de ses textes à l’Assemblée nationale. Autres faits non moins importants dans le processus de paix et de réconciliation nationale, la non effectivité du processus de cantonnement caractérisé par la circulation massive d’armes. Pendant ce temps, le ministre en charge de la réconciliation donne l’impression d’être à court d’idée en la matière et peine même à mettre de l’ordre dans son cabinet. Le gouvernement IBK est aujourd’hui interpellé face à la gravité de la situation. Le Mali recule après les accords de Ouaga. En effet, ces accords avaient donné l’espoir à tout un peuple grâce à l’organisation d’élections présidentielles et législatives. Ils ont permis le retour à la vie constitutionnelle. Mais, force est de constater que le nouveau gouvernement a du mal à engager les vrais pourparlers avec les groupes armés. En tout cas, l’Etat centrale de Bamako ne semble pas être pressé. Entre temps les nuages au lieu de se dissiper sont en train de se former. Et, cela dans un climat d’indifférence des autorités en charge de la gestion de cette crise. Cependant, quelques bonnes initiatives sont à signaler sur le terrain. Notamment, la mobilisation en cours des Conseillers Nationaux et de la société civile à la mairie du District de Bamako. Cette rencontre permettra, à coup sûr, de trouver des pistes favorables à la réconciliation. Au même moment, le ministère en charge de la question prépare un forum qui devrait se tenir à Tombouctou ce mois-ci sur le sujet. Le nord risque de devenir un bourbier avec cette lenteur du gouvernement IBK, qui ne semble pas prendre les choses à leur juste mesure. Le retard dans ce processus serait à la base du blocage des activités politiques pour ne pas dire un arrêt total des affaires publiques…
Abdoulaye Ouattara, Fakara Faïnké