«Je suis un rebelle et fils d’un rebelle… » C’est par ces propos surprenants que le député élu récemment à Abéïbara, s’est exprimé lors de l’atelier organisé par le FDR sur la sécurité, la stabilité et le développement dans l’espace Sahélo Saharien. L’honorable Ahmed Ag Bibi, puisque c’est de lui qu’il s’agit, dans son intervention, s’est expliqué sans ambages. Nous vous proposons ici l’intégralité de ses déclarations… fracassantes.
« Moi, Ahmed Ag Bibi, je suis député élu dans la circonscription d’Abéibara, signataire de l’Accord d’Alger de juillet 2006, également porte-parole de l’Alliance Démocratique pour le Changement (ADC).
D’abord, moi je suis un rebelle et fils d’un rebelle ; en même temps je suis malien et fier d’être malien. Donc, pour moi la rébellion n’est pas un crime, c’est pour réclamer des droits. Depuis l’indépendance, nos ancêtres ont signé pour être malien, trois ans plus tard, il y a eu la rébellion de 1963. La cause était bien connue à l’époque : le communisme. Après 40 ans, le sud a renversé le régime. Il y a des liens. De 1963 jusqu’à nos jours, nous n’avons rien vu dans la région de Kidal.
Et pourtant, il y a eu suffisamment de temps pour faire du changement dans le domaine du développement. En 1963 et 1997 il y a eu rébellion, tous les cadres arabo-touaregs qui ont été intégrés après le pacte de 1992, devraient être intégrés depuis l’indépendance. Malgré les difficultés et par manque d’une vision de solution malienne, ils n’ont trouvé d’autres moyens que la rébellion pour réclamer leurs droits. C’est pourquoi je dis que la rébellion n’est pas un crime ; mais pour entrer en possession de ses droits. Je propose qu’il y ait une conférence nationale malienne pour que nous discutions de nos problèmes, et nous arriverons à trouver une solution inch allah.
Depuis toujours, le nord, plus précisément la région de Kidal ne connaît que les horreurs de la guerre. Il faut expliquer ce qui s’est passé depuis 1963. Beaucoup de choses se sont passées. Il y a eu des massacres et l’humiliation. C’est ça la solution malienne. De 1963 jusqu’en 1990, ces populations n’ont connu que la brimade, la prison sous une administration militaire sévère. La Région de Kidal est gérée par une administration militaire sévère qui a carte blanche pour faire ce qu’elle veut. Là, on n’est loin de trouver une solution. Si on n’est pas dans la même logique, on ne va pas s’en sortir.
rnLa rébellion s’explique par toutes ces injustices.
Actuellement, la rébellion est menée par les enfants qui ont échappé au massacre de 1963. Le pacte de 1990 n’a pas été appliqué et nous savons que plusieurs milliards ont été investis pour le développement des régions du nord. Tout cet argent a été détourné pour enrichir des individus malveillants, chargés de la gestion de ses fonds. Ce problème de détournement à aggraver le problème du Nord. Kidal ne reçoit pas grand-chose par rapport au Sud ; ça il faut le savoir. Nous demandons à nos frères du Sud d’accepter le partage. Nous sommes des frères et des associés.
Il y a une commission bilatérale entre l’Algérie et le Mali, mais ces deux pays, c’est-à-dire mon pays et l’Algérie n’ont pas la volonté de gérer le problème. C’est pourquoi tous nos produits viennent de l’Algérie par contrebande. Ce n’est pas légal ! La région de Kidal est la plus enclavée du pays. A chaque saison sèche, des hommes et les bétails meurent de soif. A Kidal, il n’y a aucune véritable route, même pas un centimètre de route bitumée.
Il n’y a ni hôpital pour les hommes ni de vétérinaire pour les animaux. Kidal, contrairement à toutes les régions du pays, n’a pas accès à l’eau ; ça tout le monde le sait. Nous les rebelles, nous demandons qu’il y ait des routes bitumées à Kidal, mais ces routes profiteront à tous le Mali entier. Tous les maliens emprunteront ces routes…
Cessons de rendre Kidal responsable des maux de ce pays. Il faut avoir le courage d’accepter le problème que nous vivons. On dit que c’est un problème récurrent, parce que on n’a pas cherché de solution. La solution ne se trouve pas à l’extérieur, c’est seulement nous qui pouvons la chercher. C’est un problème maliano-malien.
Réunissons-nous au tour du pacte et nous trouverons la solution malienne à ce problème qui n’a que trop duré !»
Propos recueillis par
Adama DIARRA