Prochaines négociations inter-maliennes : L’opposition dénonce la gestion solitaire du dossier

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Les prochaines négociations  entre le Mali et les groupes armés qui s’ouvriront en mi-juillet 2014 sèment l’émoi au sein de l’opposition qui estime que le président de la République est en train d’engager le pays dans ces négociations de façon solitaire, comme si le pays était sa propriété privée.

Selon des sources concordantes, le Mali doit en principe entamer les négociations avec les groupes armés qui reconnaissent la laïcité et l’intégrité de son  territoire, le 15 juillet à Alger. Si l’idée n’est pas condamnée par les partis politiques qui animent l’opposition,  la démarche est loin d’être appréciée.  Car certaines entités  du pays se sentent écartées desdites négociations qui se veulent inclusives.            Dans leur communiqué  du 4 juillet 2014, les partis de l’opposition démocratique et républicaine se disent  vivement préoccupés par la gestion solitaire de la crise du Nord par le président de la République et le Gouvernement.                       Même si certains espèrent que la rencontre entre l’opposition et le Président IBK sera un facteur de décrispation du climat politique, les signataires pensent qu’«en recevant les partis politiques, le 4 juin dernier, le Chef de l’État s’était contenté de livrer sa version des graves et douloureux événements des 17 et 21 mai à Kidal qui ont conduit à la perte de plusieurs localités et positions militaires au Nord. Il n’avait pas alors souhaité d’échanges en promettant de consulter dans les prochains jours les acteurs politiques car, disait-il, il ne s’agit pas d’IBK, mais du Mali», précise le communiqué. Mais, déplore, l’opposition, un mois après ces rencontres,  le Président engage le pays, sans la moindre concertation, dans des négociations décisives sur des questions de fond relatives à la stabilité du Mali, à la cohésion de la Nation et à son avenir immédiat. Pire, s’indignent les opposants, le Chef de l’État a délégué à un pays voisin le soin de « faire enrichir par l’expertise de ses techniciens » une «feuille de route» destinée aux prochaines négociations inter-maliennes.  Pour la Vigilance Républicaine et Démocratique (VRD), malgré la tragédie de Kidal, le pilotage à vue et l’amateurisme qui caractérisent les dix mois de gestion du pouvoir d’IBK continuent.  Le processus de réconciliation traîne de manière incompréhensible : la nouvelle Commission Vérité, Justice et Réconciliation créée en mars 2014 n’a  toujours pas été mise en place. Ce qui fait dire aux adversaires politiques du pouvoir que le Président et son gouvernement ne semblent avoir aucun plan, aucune stratégie, aucune vision pour sortir le pays de la crise.                  Les affrontements meurtriers entre l’armée nationale et les groupes armés à Kidal le 21 mai, qui ont occasionné la perte de nos positions militaires aggravée par le discrédit jeté sur le gouvernement aussi bien à l’intérieur qu’à extérieur, ont contraint le Mali à négocier en position de faiblesse. Cependant, estime l’opposition, ces mésaventures ne doivent pas nous faire perdre de vue l’impérieuse nécessité d’élaborer avant toute négociation une proposition malienne soutenue par l’ensemble du pays. Pour y parvenir, l’opposition invite le Chef de l’État à consulter la classe politique et toutes les forces vives pour dégager une plateforme et une vision nationales avant de s’engager dans des pourparlers cruciaux pour le présent et l’avenir de notre pays et de la sous-région. Partant, ils on exprimé leur profonde gratitude à  toute la communauté internationale pour leur solidarité avec le peuple malien. «En ces circonstances historiques particulières, nous invitons les pays frères et amis à éviter toute précipitation susceptible de compromettre l’avenir», conclut ce communiqué qui a été signé par le Secrétaire Général Adjoint de l’Urd, Mamadou Diawara, le Secrétaire Général du parena, Djiguiba Keïta alias PPR,  et le Secrétaire Général Adjoint de Prvm/Fasoko, Adama Berthé.

Oumar KONATE

 

DIALOGUE INTER-MALIEN

«Il ne faut pas tourner en rond», dixit Koenders

Tout en réaffirmant sa conscience que le retour de la paix requiert du temps, le représentant spécial du Secrétaire général des Nations Unies a, au cours d’une interview télévisée, exprimé son optimisme quant à la volonté des Maliens à aller au dialogue.

Le jeudi 3 juillet dernier, Gérard Albert Koenders, représentant spécial de Ban Ki-Moon au Mali, était l’invité de l’édition de 20 heures du journal de l’Ortm. Sur le plateau de la télévision nationale du Mali tenu par Aïssata Maïga, le responsable onusien était appelé à se prononcer sur la résolution 2164 du Conseil de sécurité des Nations Unies concernant le Mali. Résolution qui a été récemment adoptée en remplacement de la 2100 et consacre ainsi un  nouveau mandat pour la  Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation du Mali (Minusma).

Réaffirmation de la solidarité internationale

D’entrée de jeu, Bert Koenders a tenu à souligner avec satisfaction l’élan de solidarité que la communauté internationale a encore une fois manifesté de manière unanime à l’égard du Mali, toute chose à laquelle on a rarement assisté à travers le monde. Cette solidarité est d’autant exceptionnelle aux yeux de l’orateur du jour que les troupes chinoises sont pour la première fois dans l’histoire de l’humanité engagées dans une force onusienne.

Aussi, il a fait remarquer que le nouveau mandat de la mission onusienne au Mali, tout comme l’ancien, se base sur certains grands principes de l’ONU, tels que l’intégrité territoriale, la souveraineté et la laïcité de l’Etat. A la question de savoir si la Minusma a suffisamment de moyens pour faire face à ses responsabilités, M. Koenders a  répondu par la négative, tout en révélant que la Mission dispose d’environ 80% des moyens requis. Selon lui, cette situation ne contredit pas toutefois la solidarité internationale manifestée de manière unifiée autour de notre pays. «Pour la génération des forces, cela dépend de la volonté individuelle de chaque pays de fournir des troupes, des hélicoptères… en solidarité avec le Mali», a expliqué Bert Koenders, réaffirmant au passage son réconfort au sujet de ce nouveau mandat, mais surtout de la volonté des Africains d’appuyer les Maliens.

Des insuffisances à corriger

La première insuffisance que le Représentant spécial de Ban Ki-Moon relève par rapport au mandat passé et qu’il engage la Minusma à corriger, c’est l’aspect communication : «Nous devons communiquer sur ce que nous pouvons et nous ne pouvons pas faire, mais surtout expliquer nos principes». D’où, M. Koenders a révélé que la mission onusienne a effectué à ce jour 17 000 patrouilles dans le Nord-Mali. En deuxième lieu, estime-t-il, il s’agira de rassurer les Maliens de la franche collaboration de la communauté internationale.

Par ailleurs, M. Koenders s’est inscrit en faux contre l’idée selon laquelle la Minusma n’est pas  une mission d’usage de la force. Et il en veut pour preuve la mort de plusieurs soldats, notamment ceux du Tchad,  sur le théâtre des opérations. Au sujet des futures négociations, le responsable onusien affirme que cet aspect a été renforcé par la nouvelle résolution du Conseil de sécurité. Toutefois, il a rappelé que la communauté internationale ne fait qu’appuyer les initiatives maliennes pour une paix durable. Les membres du Conseil de sécurité « ont demandé à la Minusma de soutenir la médiation, pas pour se substituer aux Maliens. C’est vous qui faîtes la paix», a-t-il dit. Et c’est cela, dit-il, le rôle politique de la Minusma. Selon lui, tous les groupes armés qui ne s’inscriront pas dans le processus de cantonnement devront être considérés comme des ennemis de la paix et traités comme tels.

Kidal, une spécificité           A la question de savoir si la nouvelle résolution met un accent particulier sur le cas Kidal en termes de restauration de l’autorité l’Etat, Gérard Albert Koenders a insisté sur le fait que cette ville de l’extrême Est du territoire national reste malienne. Après avoir rappelé certains efforts de la Minusma en faveur du  retour de l’Etat dans certaines localités de cette région, Koenders, en référence aux événements récents qui y sont survenus, a fait savoir que la cité de l’Adrar reste le symbolisme de beaucoup de problèmes de notre pays. Mais, il n’y a que par les moyens politiques, militaires, humanitaires  et les actions de développement que la Minusma peut aider l’Etat à se redéployer sur l’ensemble du territoire. Toutefois, il s’est dit conscient que la paix ne peut pas être construite en 6 mois. «Maintenant, il faut oser, il ne faut pas tourner en rond. Et ensemble avec la communauté internationale, on peut reconstruire la souveraineté malienne», a ainsi appelé Bert Koenders, avant d’afficher son optimisme face à la culture du dialogue et de la paix qui caractérise les Maliens.

Bakary SOGODOGO

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