Dans un souci de totale transparence, le ministre des Affaires étrangères, de l’Intégration africaine et de la Coopération internationale, Abdoulaye Diop, a rencontré vendredi le corps diplomatique pour « partager » avec lui « l’évolution du processus de négociation » d’Alger. Le patron de la diplomatie malienne a, d’entrée de jeu, remercié les diplomates pour leurs efforts constants dans le seul but de ramener la paix à la maison et aussi de protéger le monde du terrorisme.
Le ministre Abdoulaye Diop qui dirige la délégation de la partie malienne à Alger, s’est félicité des résultats auxquels les négociateurs sont parvenus, malgré quelques écueils constatés au cours des pourparlers. Si la première phase était consacrée à l’adoption d’une feuille de route et à la signature d’un accord de cessation des hostilités, le deuxième round, lui, a permis de crever quelques abcès en donnant la parole à la société civile et aux populations locales. C’était un exercice d’écoute et de liberté, a commenté le ministre Diop pour qui les populations ont eu la latitude d’exprimer leurs souffrances et leurs aspirations. Surtout leur attachement à un Mali uni et indivisible.
Mais, il y a aussi eu à Alger des déclarations contre-productives qui laissent transparaitre des volontés de séparation ou encore de fédération. Des « hors-jeu » en somme, juge Abdoulaye Diop faisant remarquer que tous les documents de référence (Pacte national, accords préliminaires de Ouagadougou et résolutions des Nations Unies) insistent expressément sur l’intégrité territoriale du Mali et la laïcité de la République. De cette attitude, le ministre tire l’enseignement que les accords de Ouagadougou ne sont pas suffisamment compris par tous. A moins qu’il ne s’agisse d’une volonté délibérée de ralentir les pourparlers.
Abdoulaye Diop a ainsi regretté que certains groupes armés aient refusé de s’asseoir à la même table de négociations que d’autres groupes. Le seul prétexte étant que ces derniers sont proches des autorités maliennes. Mais le ministre voit en cela un exercice simplement tactique. Et cela n’est pas normal, de son point de vue, car « aucune partie n’a le droit d’objecter à la participation d’une autre ». Malgré le format dispersé, le travail a continué à Alger.
Au cours des pourparlers, rapporte le chef de la diplomatie malienne, les questions politiques ont primé sur les autres points. En ce qui concerne le Mali, indique-t-il, des propositions précises et articulées ont été soumises aux médiateurs. D’autres ont choisi d’autres voies : les médias. Abdoulaye Diop a assuré, à ce propos, que notre pays ne fera pas l’injure aux négociateurs de publier ses propositions sur les réseaux sociaux.
Le volet militaire a aussi été évoqué à Alger. A ce sujet, la position du gouvernement n’est pas un secret : il n’y aura qu’une seule armée même si celle-ci doit tenir compte de la diversité de notre pays et des spécificités des milieux.
Sur la question du fédéralisme, le ministre Diop a clairement rappelé à l’attention des diplomates que cette question fait partie des aspects non négociables. Cela ne veut pas dire que les portes sont fermées, a précisé le ministre en soulignant que c’est une question de principe républicain. Pour convaincre, il évoque notre loi fondamentale qui n’autorise aucune partition du pays et ne fait aucune ouverture à l’intégrisme. Cependant, des solutions alternatives existent dans une décentralisation qui peut faire la part belle à la régionalisation.
Quid du mot « Azawad » pour désigner le septentrion de notre pays ? Le ministre Diop pense que du point de vue légal, on peut parler de Tombouctou, Gao ou Kidal. C’est dire que l’Azawad ne saurait désigner le Nord de notre pays. Les positions que la délégation a défendues à Alger sont édictées par le chef de l’Etat, précisera-t-il. Contrairement à ce que l’on peut penser, l’atmosphère était détendue. « A des heures avancées, les discussions continuent dans le hall de l’hôtel », a constaté Abdoulaye Diop qui se veut « confiant » parce qu’il y a « des facteurs encourageants malgré les différences ».
Le ministre a souhaité que toutes parties respectent leurs engagements de cessation des hostilités. Aux diplomates, il a lancé un appel à un engagement accru dans la lutte contre le terrorisme. Le Mali, dit-il, n’est pas le seul concerné. La guerre contre l’extrémisme doit être mondiale, a-t-il défendu en invitant les diplomates à la vigilance.
Après cette introduction, les diplomates ont demandé à toutes les parties de prendre leurs responsabilités en respectant les termes des accords de Ouagadougou. De ce postulat, les lignes rouges doivent rester inviolées. Aussi, ils estiment que le volet développement local ne doit pas être négligé au profit des aspects politiques. Tous ont formulé le vœu que des accords sincères soient trouvés avant la fin de l’année.
A. M. CISSE