Une page de l’histoire du Mali : Les accords de Tamanrasset

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Les Accords de Tamanrasset sont constitués par deux documents : un compte rendu de réunion et un accord relatif au cessez-le-feu. Le compte rendu de réunion apporte une information de taille : « Les parties ont affirmé leur profond attachement à l’unité nationale et à l’intégrité territoriale de leur pays. » L’accord relatif au cessez-le-feu est constitué par treize articles tenant sur une page. En réalité, contrairement à ce qui a été dit en maints endroits, il ne reconnaît pas d’importantes concessions aux rebelles. Il ne consacre pas la démilitarisation du Nord ni son autonomie. Une comparaison entre les exigences des rebelles et les points d’accord avec le pouvoir central prouvent à suffisance que rien n’a été bradé. Il suffit de comparer les exigences formulées par les rebelles lors de la rencontre informelle avec les notabilités touarègues et ce qu’il leur a été concédé à Tamanrasset.

 

  1. Exigences des rebelles formulées lors de la rencontre avec les notabilités touaregues après l’échec du Sommet de Djanet.

 

  1. Relève des administrateurs actuels et leur remplacement par des natifs des 6è et 7è régions ;
  2. Octroi de six postes ministériels aux ressortissants des deux Régions du Nord, à savoir : Vice-présidence de la République (poste à créer), Ministère des Affaires Etrangères, Ministère des Affaires Sahariennes, Ministère du Développement Rural, Ministère de la Défense Nationale,
  3. Instauration du multipartisme ;
  4. 4. Intégration et prise en charge des combattants du MPA et FLA par le ministère de la Défense ;
  5. Création d’un prytanée militaire à Kidal ;
  6. Résolution du problème de l’emploi ;
  7. Suppression des taxes (impôts) sur le bétail et les indigents ;
  8. Création d’écoles bilingues (français-arabe) ;
  9. Promotion de la scolarisation en milieu nomade :
  10. Construction et équipement de structures sanitaires dans les localités de 6ème et 7ème Régions ;
  11. Création de banques agro-pastorales en 6è et 7è Régions ;
  12. Réalisations de projets agro-pastoraux dans les vallées des oueds Tilemse, Ansttwadji, Azawajlu, In Lary, Izdjarat et la mise en valeur des plaines de Mema par la construction de barrages, la multiplication de forages profonds ;
  13. Mise en exploitation commerciale de l’aéroport de Tessalit ;
  14. Réalisation du barrage de Tossaye ;
  15. Intensification de la recherche en vue de l’exploitation des ressources minières des 6è et 7èRégions
  16. Suppression des taxes douanières sur les produits de première nécessité et sur les équipements destinés aux projets ruraux ;
  17. Désenclavement des 6è et 7è Régions par la construction de la Trassaharienne, des routes praticables en toute saison entre Ménaka et Kidal d’une part, entre Niafunké et Bourem d’autre part ;
  18. Dédommagement par le gouvernement malien de victimes innocentes des événements actuels ;
  19. Respect et application de ces engagements pendant une période de 30 ans.

 

Ces revendications retiennent l’attention par deux points : nulle part, il n’y est question ni d’autonomie, ni d’indépendance ni de statut particulier, ni de démilitarisation ; elles font songer plus à une énumération de vœux pieux qu’à des revendications sérieuses et structurées.

 

  1. Les points d’accord entre le pouvoir central et les rebelles

 

Sur les treize articles que comporte l’ « Accord de Tamanrasset », quatre sont consacrés à ce que l’on nommera, par commodité, « concessions » faites aux rebelles mais qui, en réalité, sont plutôt des points d’accord. Elles sont toutes relatives aux forces armées. Les rebelles avaient demandé la démilitarisation du Nord. Il leur fut répondu que l’armée est nationale et, qu’à ce titre, elle a vocation à se déployer sur l’ensemble du territoire national.

 

Article 5 : Dans le cadre du présent accord, les forces armées maliennes se désengageront de la gestion administrative civile et procèderont à la suppression de certains postes militaires.

 

En ce qui concerne les villes (chefs-lieux de Régions et de Cercles) les casernes seront progressivement transférées vers d’autres sites plus appropriés.

 

Article 6 : Les forces armées maliennes éviteront les zones de pâturages et les zones à forte concentration de populations dans les 6è et 7è Régions actuelles.

 

Article 7 : Les forces armées maliennes se confineront à leur rôle de défense de l’intégrité territoriale dans les frontières.

 

Article 8 : Les combattants peuvent intégrer les forces armées maliennes dans les conditions définies par les deux parties.

 

Le chef de la délégation malienne, le colonel Ousmane Coulibaly ne se trouvait nullement embarrassé par ces points d’accord. Il ne lésait en rien les intérêts supérieurs de la nation. Chef d’Etat-major des armées, il savait que des dispositions étaient déjà prises allant dans le sens de ce que demandaient les rebelles.

 

Le « Procès-verbal de réunion » revient sur ces « concessions » et les complète par une résolution de taille en faisant retenir : « Les deux parties ont convenu que les populations des trois régions du nord du Mali géreront librement leurs affaires régionales et locales par le biais de leurs représentants dans des assemblées élues, selon un statut particulier consacré par la loi ».

 

C’est à propos de cette résolution que bon nombre de commentateurs se sont fourvoyés. La résolution ne peut être comprise qu’une fois placée dans son contexte, celui de la décentralisation administrative telle que conçue et décidée par l’Union Démocratique du Peuple Malien (UDPM). Ce sera l’objet de notre prochain article. Pour cette semaine, la lecture du présent article gagnerait à être enrichie avec celle des « vérités du lieutenant-colonel Kafougouna Koné » à propos des accords de Tamanrasset.

 

A suivre

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