Dans son intervention télévisée du mardi soir, Nicolas Sarkozy s’était dit « spécialement inquiet » pour les cinq otages français enlevés à Arlit (Niger) en septembre dernier, alors qu’il était plus optimiste pour ses deux compatriotes détenus en Afghanistan. Les choses allaient s’accélérer et lui donner raison. Quarante huit heures plus tard en effet, Aqmi mettra la barre plus haut en transférant le dossier des cinq otages du Sahel aux régions pakistanaises et sous la responsabilité personnelle de Ossama Ben Laden déclaré alors seul négociateur.
L’enregistrement audio de l’émir d’Aqmi, Abdelmalek Droudkel, qui attendait d’être authentifié le week-end change donc tout et prend de court les autorités françaises qui, à travers la toute nouvelle ministre des affaires étrangères Michèle Alliot Marie, ne cachent pas leur agacement : « la politique de la France ne sera pas dictée de l’extérieur ». Un énervement qui tranche d’avec l’assurance d’Alain Juppé, son homologue de la défense qui annonçait, quelques heures avant, que des contacts avaient été établis avec les ravisseurs.
Par la seule France sans doute car de son côté, Amadou Toumani Touré, qui dit dans l’interview accordée au Parisien et que nous reproduisons ci-contre que le Mali n’a établi aucun contact dans ce sens et que de toute façon, il y avait tellement d’intermédiaires qu’on ne sait plus auquel se fier. La seule chose sûre est que les otages d’Areva sont entre les mains du salafiste Abuzeid. Mais où ? Depuis le 18 septembre dernier, selon les nombreuses dépêches de presse et les sources officielles françaises, il n’y a pas de doute que les otages Areva et Satom sont détenus dans Nord du Mali, dans les montagnes de Timetrine, à la frontière entre la Région de Kidal et le Sud algérien. Amadou Toumani Touré ne dit pourtant pas que les otages se trouvent sur le territoire malien.
Il insinue, au contraire, qu’ils peuvent se trouver n’importe où dans ces vastes contrées aux frontières poreuses. Histoire de dire que les chercher revient à chercher une aiguille dans une botte de foin Or, selon le président malien, attaquer Aqmi alors qu’ils ont les otages entre les mains serait mettre la vie de ceux-ci en danger. Autant dire que nous sommes partis pour un long feuilleton, avec possiblement le PC opérationnel de la « Base Globale » comme seul interlocuteur et des conditions difficiles à satisfaire.
La détermination française à régler le problème de ses otages sahéliens ne pourra pourtant qu’être de plus en forte, maintenant que Droudkel a internationalisé l’affaire en se défaussant sur Ben Laden. Que celui-ci soit encore en vie ou non, l’opinion de cet internaute français relevée samedi est pertinente : « l’organisation nous défie désormais sur son terrain et le “Cheik” en personne Ben Laden peut ensuite se permettre de narguer Paris depuis sa planques montagneuse. Les terroristes islamistes ne font pas n’importe quoi : ils appliquent des méthodes qui ont parfaitement réussi en Occident, délocalisation et communication ». Ce n’est pas de chance pour le candidat Sarkozy. Pas pour le Mali non plus qui ne se trouve plus sur les bandes passantes que pour les histoires d’otages.
Adam Thiam