L’acquisition d’avions de combat par l’armée malienne ainsi que la grande parade militaire et civile à laquelle lesdits appareils ont donné lieu pourraient en dire long sur lechangementde cap et le revirement d’approche dans la gestion de la problématique du septentrion par le Mali d’IBK. Nombre de compatriotes du président malien auront été les fiers témoins de la grande exhibition faite du matériel venu enrichir l’arsenal de l’armée nationale et diversifier du même coup ses marges de réplique aux assauts que subissent constamment ses positions dans le nord et le centre du pays. Les nouvelles acquisitions, obtenues sur effort budgétaire propre, ont même inspiré à certains politiques une récupération euphorique par un grand meeting de reconnaissance au chef de l’Etat pour ses efforts en direction de la Grande Muette. C’est à cette occasion qu’on a entendu un des organisateurs et non des moindres clamer haut et fort que l’armée malienne fait désormais trembler depuis le renforcement de ses capacités aériennes par l’obtention d’avions de combat. D’autres en ont poussé la jubilation au point d’y voir un moyen de clouer le bec à l’opposition.
Quoi qu’il en soit, il y a de quoi s’interroger – non sur l’utilité du matériel – mais sur la catégorie d’adversaires qu’il cible, au regard d’un contexte plutôt dominé par une nette tendance vers un règlement de la problématique du nord par les voies pacifiques.
Sans verser dans les arts divinatoires, il ne semble point évident que l’acquisition d’hélicoptères de combat puisse se justifier par une réponse aux velléités islamistes. Et pour cause, ni les forces françaises ‘Barkhan’ ni les missions militaires onusiennes et européennes mieux dotées en moyens aériens n’en ont fait un créneau de lutte contre les attaques multiformes de terroristes. Beaucoup plus plausible dès lors l’intention de les utiliser comme moyen de dissuasion et de pression contre les mouvements armés séparatistes qui ne renoncent pas encore à défier l’autorité et la souveraineté de l’Etat malgré la signature d’un Accord pour la paix. À quelques encablures des élections générales de 2018 très déterminantes pour la continuité des institutions de la République et les ambitions politiques du chef de l’Etat sortant, il n’est point exclu que Koulouba renoue avec ses ardeurs bellicistes initiales. Les mêmes qui avaient inspiré aux hautes autorités de préférer l’hostilitéà l’ouverture des négociations avec les mouvements armés qu’elles espéraient prendre à l’usure jusqu’au déclenchement de l’assaut hasardeux des forces armées sur Kidal. Avec des troupes sans la couverture aérienne, la suite est connue : le cuisant échec de l’intervention a contraint les autorités à engager des pourparlers en nette position de faiblesse, lesquels ont finalement produit un accord quasi inapplicable que les groupes armés autonomistes utilisent pour imposer leurs caprices à la République. L’acquisition d’armements dans un tel contexte pourrait probablement servir à inverser cette tendance.
Reste à savoir comment les parties-prenantes de l’Accord – singulièrement la CMA – réagira à cette volonté tacite de changer de cap susceptible de ramener la confiance entre les protagonistes au plus bas niveau d’où elle était partie depuis les pourparlers d’Alger.
La Rédaction