NORD-MALI: L’indépendance de Kidal ou la guerre ?

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C’est véritablement ce chantage que les maîtres de l’Adrar des Iforas font au pouvoir en place. En effet, après les accords d’Alger, les rebelles continuent de prôner la légitimité de leur combat. Après avoir enlevé et emporté des armes de l’armée régulière dans les montagnes de Tegharghar, lors de l’insurrection du 23 mai, les alliés de Iyad et de Fagaga continuent leur lutte sur le front intellectuel en inondant leurs différents sites d’écrits, de menaces de tous genres. Les insurgés vont jusqu’à conditionner la paix dans la localité à l’application sans condition de leur fameux statut particulier. En rappelant les conditions de naissance de leur mouvement dans le papier ci-dessous, cet animateur du site « Tessalit. Info » profèrent des menaces au pouvoir central de Bamako que lui même et ses frères n’ont d’ailleurs jamais arrêté de faire chanter. Parce que peut être ils se sont rendus compte que le pouvoir veut brader la paix. On ne peut pas parler de statut particulier d’une entité et adhérer à l’unité nationale dont il fait allusion dans l’article. Dans ce cas, l’unité nationale ne serait-elle pas mise à rude épreuve? En tous les cas, même si le pouvoir capitule, le peuple du Mali jaloux de l’unité nationale ne baissera pas les bras.
es rapports conflictuels entre la région de l’Adagh et le pouvoir central de Bamako datent déjà de la veille de l’indépendance du Mali.
Les Kel Adagh étaient le seul groupe touareg du Mali qui a conditionné son adhésion à la nouvelle entité étatique née du nouvel découpage territorial opéré par l’ancienne puissance coloniale.
Les premiers contacts entre les Kel Adagh, à leur tête, l’amènokal Zeid ag Attahir, et les responsables de l’Us-Rda, ont porté sur l’avenir de la gestion politique du pays après le départ programmé de l’administration coloniale.
Durant ces contacts, les Kel Adagh ont présenté leur vision du future État comme suit :
-Étant un État géré par des musulmans, ils le préfèrent à une administration des Chrétiens (Français).
      -Ils doivent y vivre pleinement leur différence religieuse, économique et sociale. En un mot, la pleine gestion de leurs affaires internes.
-Les responsables de l’Us – Rda ont accepté le principe que chacune des communautés qui composaient le Mali avait le droit de gérer ses propres affaires internes sans que l’État ne s’y ingère.
       Mais en 1963, les agissements de la première campagne militaire venue du Sud a révélé le véritable visage des nouvelles autorités socialistes de l’époque et leurs intentions de soumettre militairement la région de l’Adagh après y avoir opéré un génocide et un carnage qui ont visé les hommes, la flore, la faune et le bétail.
Le tout s’est soldé par l’arrestation de Zeid et ses compagnons et leur condamnation à mort.
Depuis cette date, la région de l’Adagh a été soumise à une lourde et brutale administration militaire et interdite aux étrangers jusqu’en 1986.
       Cela a été la première rupture de confiance entre le pouvoir de Bamako et la région de l’Adagh.
La rébellion de 1990 à laquelle les Kel Adagh ont réussi à mobiliser les ressortissants d’autres régions touarègues du Mali rencontrés dans l’exil, s’est alimentée du sentiment de vengeance (egha) au sein de la nouvelle génération des Kel Adagh pour les atrocités commises par l’armée envoyée depuis le Sud, en 1963.
        Les Kel Adagh ont démontré lors de cette deuxième rébellion, à l’occasion des accords de Tamanrasset en 1991 qu’ils n’ont jamais violé malgré les moments difficiles par lesquels est passée la région et ce jusqu’à la flamme de la paix en 1996, bien qu’ils savent se battre quand il s’agit de leur autodéfense, comme cela a été le cas en 1963, ils savent aussi faire la paix et respecter leurs engagements.            Aujourd’hui, leur mouvement n’a d’autres objectifs que de rappeler au régime de Bamako les engagements qu’il avait lui même pris en signant ces accords.
Le statut particulier contre l’unité nationale :
Ce bref rappel des difficiles rapports entre la région de l’Adagh et le pouvoir central de Bamako nous montre que dans l’intérêt de l’unité nationale, ce même régime se doit d’octroyer à la région de Kidal, 46 ans après l’avoir revendiqué, (la première fois étant en 1960) son statut particulier.
– Une troisième rébellion dans l’Adagh, à laquelle le pouvoir de Bamako semble vouloir pousser la région, ne fera que repousser cette revendication, qui pourrait évoluer et prendre d’autres formes, dans l’avenir des rapports entre les deux camps.
     Il ne s’agit donc pas d’une simple mutinerie désertion à laquelle les médias affiliés au régime d’ATT semblent faire croire à la population, mais d’un problème politique qui puise ses racines dans l’histoire de difficiles rapports de cette région avec le pouvoir central et cela bien avant l’indépendance du Mali.
         Les solutions que ce même pouvoir a préconisées depuis qu’il ait pris le relais de la gestion de cette région de l’administration coloniale, semblent aujourd’hui montrer leurs limites et pour preuve, le problème persiste toujours.
Le régime d’ATT ne peut pas compter sur des milices d’autodéfense qui lui sont fidèles comme il l’a fait avec le Ganda Koy, pour la simple raison que la région de l’Adagh est homogène sociologiquement et culturellement.
      Il ne peut, non plus utiliser le problème devenu classique de la libération des esclaves du joug des « Seigneurs féodaux touareg », comme Modibo Kéita a tenté de faire en 1963 en manipulant les chiffres donnés par l’administration coloniale en 1956 de 1,2% en supprimant la virgule, et cela pour la simple raison qu’il n y a pas d’esclaves dans l’Adagh, même pas « anciens ».
    Il ne peut pas aussi, utiliser le clivage (imghad vs ilallen), comme il tente de le faire actuellement quand il essaye d’utiliser certains anciens chefs rebelles touaregs étrangers à l’Adagh, pour la simple raison que dans l’Adagh, cette problématique est aujourd’hui complètement dépassée grâce à l’évolution interne de la structure sociale des Kel Adagh.
Que se passerait-il si l’on suppose qu’ ATT cèdera à son côté militariste «je suis militaire et je ne cède pas au chantage) et optera pour la manière violente et se décide d’attaquer la base des partisans de l’Adagh et qu’il réussisse à les exterminer tous ( en a-t-il les moyens ?)
Mais pour ce faire, ATT doit tenir compte de deux choses:
– de l’unité nationale : va t-il prendre le risque de menacer l’unité nationale en créant les conditions pour une autre rébellion dans l’Adagh (la troisième depuis 1963)? En s’attaquant aux partisans de l’Adagh, ATT va faire d’eux de nouveaux martyres qui s’ajouteront à la longue liste de ceux tombés lors des rébellions passées.
– de la structure sociale des Kel Adagh qui impose à ses segments une solidarité agnatique en périodes de crises: il aura perdu l’argument qu’il a jusqu’à présent utilisé et pour lequel il a eu l’adhésion de certaines puissances étrangères et l’opinion interne à Bamako, qui consiste à isoler les partisans de la population, puisque tout ce beau monde va découvrir, à son insu, que les partisans bénéficient de l’adhésion de leurs contributions et ils ne sont que les porte parole du malaise que vit leur région.   Contre tous ces risques que fait peser l’intervention militaire sur l’unité nationale et l’octroi d’un simple statut particulier, justifié du reste, par l’approfondissement de la démocratie, pour une région très particulière, ATT doit réfléchir avant d’agir dans un sens ou dans l’autre.
In Allaghen
ag Alla Depuis Kidal.

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