Nord-Mali : Gao : la bombe désamorcée !

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Si en matière sécuritaire la région de Kidal passe pour être l’épicentre de tous les foyers de tension, Gao a frôlé le pire à cause de l’émergence de groupes armés, de braqueurs et autres voleurs de bétails. Conséquences : l’instauration d’un climat de terreur à travers toute la région. Au cours de ces derniers mois, les autorités, sous l’égide du ministère de la Sécurité intérieure et de la Protection civile, ont opté pour la fermeté afin d’éviter que Gao, à l’image de Kidal, ne bascule définitivement dans la violence.

 

L’insurrection déclenchée en 2006 à Kidal et qui, finalement, a été matée en février 2009, suite a une grande offensive de l’armée sous le code « Opération Djiguitugu » (ou restaurer l’espoir) a eu des conséquences néfastes sur la région de Gao.

 

En effet, excédés par les attaques de la bande à Bahanga, des Gaois ont décidé en 2008, de créer un mouvement d’auto défense, baptisé Ganda-Iso (les fils du terroir).

 

Ce mouvement était inspiré de cet autre mouvement d’auto-défense « Ganda Koye » qui, suite à la rébellion armée de 1990, s’était imposé dans la région de Gao pour faire face aux velléités des mouvements armés touaregs.

 

Mais le mouvement Ganda Iso n’aura pas les coudées franches pour agir comme Ganda Koye.

A peine informées de la formation de Ganda Iso et de l’implantation de ses camps d’entrainement, notamment à Fafa, les autorités militaires sont passées à l’action contre ce mouvement. Certains de ses initiateurs sont arrêtés et ses camps furent investis et détruits par l’armée. Le chef de l’aile militaire s’enfuit alors au Niger où il fut arrêté puis extradé à Bamako à bord d’un avion. Détenu pendant un moment, le lieutenant Abdoulaye Diallo, puisqu’il s’agit de lui est finalement assigné en résidence à Bamako.

 

Au même moment, d’autres responsables du mouvement dont le sergent de la garde nationale, Lamine Bossou et Seydou Diallo, responsable politique du mouvement, ont été incarcérés à Gao. Quant aux autres combattants, plusieurs d’entre eux ont été arrêtés au cours des opérations militaires, et d’autres se sont enfuis. Dès lors, Ganda Iso cessa toutes activités. Il n’aura, en fait, existé que quelques semaines.

 

L’heure des groupuscules

L’amère expérience de ce mouvement, au lieu de servir d’exemple a, au contraire, favorisé la constitution des groupuscules armés à travers la région. En effet, des éléments ayant appartenu à l’éphémère  Ganda Iso, se sont vite retrouvés et ont formé leurs propres groupes. D’autres jeunes emboitent leurs pas. Finalement l’on assista à la création de nombreux groupuscules, de bandes armées et  d’autres organisations criminelles. En effet, des localités comme Fafa, Wattagouna, Tinahama, Tessit, Tallattaï, Ansongo, Boura et Gao sont investis par des jeunes armés. Le règne de la terreur !

 

Loin  d’avoir les mêmes motivations, ces groupes armés n’avaient aucune revendication politique. Loin s’en faut. C’étaient des bandes armées créées, souvent sur des bases ethniques et/ou d’appartenance communautaire: groupes peulh, tamashek, songhaï ou encore Daoushack.

Au départ, certains de ces jeunes armés revendiquaient la protection des intérêts de leurs communautés. La réalité était tout autre. Ils ont vite basculé dans le banditisme avec en toile de fond son lot de violences. Il était fréquent de voir de paisibles bergers attaqués et dépouillés de tout leur bétail.

 

Ajoutez-y, de nombreuses attaques perpétrées sur les axes routiers, les braquages de forains et les attaques à mains armées perpétrées à l’intérieur même des localités. Agissant alors en toute impunité, ces bandes devenaient une source de tensions entre les communautés de la région.

Ainsi, les règlements de compte entre communautés devenaient fréquents. Chacun s’appuyant sur les groupes armés de sa tribu ou de sa contrée.

 

Par exemple, un certain Djaffar, qui était réputé comme étant un grand voleur de bétail de la région, est abattu par des inconnus embusqués entre Fafa et Ansongo.

Quelques temps après, un notable (kelsouk) est surpris par des assaillants et égorgé sans ménagement dans la localité de Tessit. Désormais, les bandes ne se faisaient guère de cadeaux. Les attaques des unes étaient immédiatement suivies de représailles des autres. Un climat de suspicions et de méfiances s’installe alors entre les communautés. Et les incursions de racketteurs et voleurs de bétails, en provenance des frontières mauritaniennes et nigériennes, n’étaient pas pour arranger une situation sécuritaire déjà détériorée.

 

Aux grands maux…

Face à cette situation porteuse de dangers et de violences pour la région de Gao, le ministre de la Sécurité intérieure et de la Protection civile, le général Sadio Gassama, a effectué au mois de juillet dernier une tournée sur place.

 

A l’occasion, le ministre de la Sécurité a pu se rendre compte de l’ampleur des dégâts causés par les activités de ces bandes incontrôlées. Pour éradiquer le mal, Sadio Gassama opta pour la fermeté. Ainsi, à partir du mois de juillet, toute la région fut investie par les forces de sécurité, dotées des moyens conséquents : véhicules, armes et munitions.

 

Les opérations déclenchées avaient pour objectif le démantèlement de tous les groupes armés. Le succès fut franc. Plusieurs groupes sont passés à la trappe et leurs membres appréhendés. Ils sont actuellement en détention. La région, à l’issu de ces opérations salvatrices, a retrouvé la quiétude.

Cependant, les populations de Gao pointent un doigt accusateur sur certains éléments des unités méharistes de la zone. Ces éléments de la garde nationale sont fortement soupçonnés de connivence avec certaines bandes. Simples soupçons ou complicités avérées ? A la hiérarchie de la Garde nationale d’y apporter la réponse. En attendant, le général Gassama a eu le mérite de désamorcer la bombe gaoise au grand soulagement des populations de cette région.

 

CH. Sylla

 

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