Pendant trois semaines, quelques centaines de personnes, groupes armés rivaux d’hier (la CMA et la plateforme), mais également des notables et chefs de tribus se sont réunis à Anéfis, à une centaine de kilomètres au sud de Kidal. A l’issue de la rencontre qui s’est achevée ce jeudi, tout le monde déclare avoir fait la paix.
Ce sont des négociations directes, sans intermédiaire, qui se sont déroulées dans la localité d’Anéfis, dans le nord du Mali. Les groupes armés rivaux d’hier ont donc fait la paix. « On a abouti vraiment au règlement de tous les problèmes qui existent entre nous avec la libre circulation des personnes et des biens, avec tous les arrangements sécuritaires nécessaires pour qu’ensemble on se côtoie dans notre grand Nord Mali, se félicite Azaz ag Louda, élu de la région de Gao et membre de la plateforme composée de groupes armés loyalistes. Et le tout inch’allah, servira à consolider le processus de paix. »
Les différends réglés, mais…
Sentiment partagé chez les rebelles de la Coordination des mouvements de l’Azawad(CMA). « Oui, on peut dire que tous les différends sont réglés, confirme Boubacar Ould Hamadi, désigné pour parler à la presse après la rencontre. Après nous avons procédé à l’échange de prisonniers. Nous avons décidé de mettre en place des caravanes de sensibilisation pour expliquer aux populations le processus de paix que nous avons fait ici. »
En somme toute, nous osons croire qu’avec cette paix de braves scellée entre les groupes rivaux que nous sommes à un tournant de la crise malienne, il n’y meilleur que cela. Surtout que ce ne sont pas seulement les groupes armés qui ont fait la paix. Mais aussi différentes communautés (Imghas et les touaregs) qui s’entretuaient.
De l’avis de nombreux observateurs, il faut prendre avec des pincettes la déclaration de paix de la CMA. Selon eux avec l’attitude de ses membres, il est difficile de croire à la bonne foi de la CMA. Des gens qui osent égorger des préfets et sous-préfets ne peuvent pas accepter de perdre le contrôle de leur fief, Kidal, sous peine de devoir vivre éternellement sous terre. Le constat est que chaque fois que la CMA est appelée à tenir un engagement important, elle trouve le moyen de provoquer une guerre pour ne rien faire du tout. Ainsi, à la veille du 15 mai 2015, la CMA subissait une pression diplomatique internationale unanime pour qu’elle appose sa signature sur l’Accord d’Alger. Pour sortir de ce merdier géant, elle a fait des grimaces au GATIA, la milice pro-gouvernementale postée à Ménaka. Résultat: une bataille entre les deux groupes que la CMA a utilisée comme prétexte pour ajourner sa signature de l’Accord. Dans la foulée, la pression diplomatique qui étranglait le conglomérat rebelle a disparu, au détriment du GATIA dont la communauté internationale exigea bruyamment le retrait de Ménaka. Ce n’est pas tout, même scenario en août 2015. Au lieu de commencer à désarmer et à se laisser cantonner à partir du 20 août, comme prévu dans les accords de paix, voilà la CMA aux prises avec le GATIA aux environs de Kidal. Conséquence: tout le monde a oublié l’histoire du cantonnement et a les yeux rivés sur la “zone de sécurité” établie par la MINUSMA autour de Kidal. Bien entendu, dans un contexte si fébrile, nul diplomate ou médiateur ne se hasarde plus à demander à la CMA de ranger ses armes dans un hangar et d’abandonner ses uniformes made in Libya.
« Demain encore, quand il s’agira de cantonnement ou de désarmement, vous verrez la CMA inventer une autre bataille sous des prétextes plus ou moins fallacieux », nous confia un notable du nord du Mali. Un autre de conclure : « en vérité, ces rebelles-là, instruits par la France, ne manqueront jamais de prétextes pour continuer à vivre hors des lois et à perpétuer la guerre.
Aliou Agmour