Dans la gestion de la crise du nord du Mali, l’Algérie, après avoir tout perdu (influence et mainmise sur les négociations) s’était finalement résolue à faire profil bas. Et l’intervention militaire française (Serval) appuyé par les forces africaines de la Minusma avait sonné le glas de l’influence algérienne sur cette région malienne.
Ainsi, jusqu’à une date récente, Alger était incontournable dans les négociations entre Bamako et les différents groupes insurgés du nord du Mali. Mais la Cedeao, à partir de décembre 2012, a pris le relais suite à sa forte implication dans la crise malienne. Ainsi, l’organisation sous régionale avait confié le dossier au Burkinabé Blaise Compaoré. Ce qui avait conduit à la signature de l’accord de Ouagadougou en 2013.
Entre temps, Alger avait provoqué la colère des dirigeants de la Cedea en tentant une médiation parallèle. En effet, en décembre 2012, des responsables de la rébellion avaient publié un communiqué à partir d’Alger. Ils affirmaient en substance que «l’Algérie était le seul médiateur de la crise du nord du Mali». C’était en réalité une tentative de récupération dont seul le pouvoir algérien a le secret. Mais cette tentative se solda par un cuisant échec. La Cedeao avait mal pris la chose. Et à Bamako, le jeu d’Alger avait suscité l’ire des autorités de la transition.
Revenir dans le jeu
Pourquoi et comment l’Algérie, protectrice des groupes armés de Kidal, veut-elle récupérer son manteau de « médiateur », alors que tous attendaient l’ouverture du second round des négociations entamées par la Cedeao avec l’appui de la communauté internationale?
Premièrement : le leadership algérien a pris un sérieux coup au nord du Mali et au Sahara depuis l’occupation des régions nord du Mali. Alger qui a longtemps joué avec le feu dans cette région n’a rien pu faire pour contrer l’incendie djihadiste. Ce qui provoqua la mobilisation de la France et de la communauté internationale pour éteindre le feu. Cette intervention n’a jamais été digérée par le voisin algérien.
Au contraire, l’Algérie a soupçonné la France d’avoir mis en exécution un plan qui était préparé de longue date et qui vise à s’installer (définitivement) dans la zone, précisément au nord du Mali. L’Algérie entend donc revenir dans le jeu, puisque qu’elle mesure plus que quiconque l’importance géostratégique de cette zone.
Deuxièmement: L’Algérie qui n’a jamais digéré le fait d’être mise à l’écart par la Cedeao veut prendre sa revanche contre Ouattara et ses pairs. Pour Alger, cette communauté est beaucoup plus encline à céder aux intérêts de la France en Afrique.
Troisièmement: l’influence du Maroc sur les nouvelles autorités maliennes n’est guère un secret. Elle n’est pas du goût des Algériens. Et Alger suit de près le rapprochement entamé entre Bamako et Rabbat. Un rapprochement qui a d’ailleurs occasionné le séjour du roi Mohamed VI à Bamako, lors de l’investiture de IBK. A l’actif du Maroc: l’octroi de500 bourses de formation à des imams maliens, la mise à la disposition du chef d’Etat d’un avion royal lors d’une tournée en Europe en décembre dernier et bien d’autres œuvres de bienfaisance.
En fait, l’objectif recherché par le Maroc est d’obtenir le gèle de la reconnaissance de la République Arabe Sahraoui Démocratique (RASD) par le Mali. L’Algérie le sait! Alors, pour éviter cette éventualité et trop de rapprochement entre le Mali et le Maroc, le calcul est simple du côté d’Alger.
Seul le dossier du nord peut constituer un moyen de pression sur IBK qui a du mal à trouver une solution au bourbier de Kidal. Et le chef de l’Etat malien connait l’influence de l’Algérie sur les responsables des groupes armés. IBK coincé dans le dossier de Kidal peut penser que l’Algérie l’aidera sans doute à sortir du bourbier kidalois. D’où son déplacement la semaine dernière à Alger. Alors question: qui critiquait l’accord d’Algérie ? Et qui promettait aux Maliens une solution miracle au dossier du nord ? En attendant des réponses à ces questions, les autorités maliennes ont intérêt à sortir du tâtonnement en cours dans la gestion du dossier du nord. Pour ce faire, Bamako doit clairement faire savoir maintenant qui de l’Algérie ou de la Cedeao doit conduire les prochaines négociations avec les groupes armés de Kidal.
CH. Sylla et Soumaïla T Diarra
Excellent article.BRAVO!!!
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