Nord du Mali : La situation sécuritaire vue par les populations

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Le marché aux légumes de Gao, sous domination islamiste. (archives)

En marge de la Caravane «Azalaï Kayes-Kidal pour la paix et la réconciliation» qui s’est déroulée du 20 octobre au 5 novembre dans les régions de Gao et Tombouctou, nous avons donné la parole aux populations sur la situation sécuritaire du Nord. Si beaucoup d’entre elles notent une légère amélioration de la situation sur le terrain depuis la signature de l’Accord en mai et juin derniers, plusieurs autres s’inquiètent face aux actes de banditisme dont elles disent être victimes de façon presque quotidienne. Nos vous proposons ici notre micro-trottoir !

Aboubacar Alassane, Combattant du Mouvement Ganda Koy (Ansongo)

«La situation sécuritaire mérite que nous conjuguions nos efforts»

Vraiment, la signature de l’Accord de paix et de réconciliation a été une bonne chose. Mais jusque-là, nous doutons,  pour la simple  raison que la situation sécuritaire n’est pas bonne sur la route de Gao. Chaque fois, il y a des mines qui explosent ou des attaques sur l’axe Gao-Ansongo. Cette situation ne nous rassure pas. Il y a juste quelques jours, une mine a explosé sur la route. Elle n’a pas fait, heureusement, de victime, mais cela inquiète tout de même la population. La situation mérite que nous conjuguions les efforts, mais nous attendons de voir ce que l’Etat va faire.

 

Aboubacrine Ag Mohamed Elmoctar, Dipômé sans emploi (Bourem)

«La population se déplace sans difficulté»

Depuis la signature de l’Accord de paix et de réconciliation en mai et juin derniers, nous remercions vraiment le bon Dieu. La situation sécuritaire s’est nettement améliorée ici à Bourem, comparée à celle d’avant signature. Plus d’attaque, plus d’agression entre militaires et civils.             Nous remercions le Tout-Puissant. La population se déplace sans difficulté aucune.

 

Amadou Kipsi Maïga, Agent de développement communautaire (Gourma-Rharous)

«Nous risquons d’être victimes d’insécurité alimentaire»

Ma vision de la situation, c’est que la situation sécuritaire d’avant signature de l’Accord de paix vaut mieux que celle que nous connaissons présentement. Cela est clair. Je le dis parce que tous les jours, nous voyons des exactions. Les populations qui habitent dans le Haoussa ont vraiment de sérieux problèmes. A Rharous, on risque d’être victimes d’une insécurité alimentaire, parce que la population du Haoussa, majoritairement des agriculteurs, n’a presque plus accès aux champs à cause de l’insécurité qui règne dans la zone. Cette année, il n’y a même pas eu de culture là-bas. A longueur de journée, il y a des enlèvements de motos et autres menaces.

 

Halassane Ould Omar, membre influent de la communauté arabe (Gourma-Rharous)

«La situation s’est améliorée, mais…»

Ici, depuis qu’on a signé l’Accord de paix et de réconciliation nationale avec les mouvements armés, ça va. Il n’y a plus d’attaque, plus d’embuscade. La situation s’est améliorée, mais elle n’a pas atteint le niveau d’avant signature de l’Accord. Tout ce que nous demandons, c’est l’application de ce document, tel qu’il a été signé par les différentes parties et la communauté internationale. C’est à ce prix que la paix, à notre avis, va revenir au Mali. Les gens sont fatigués.

 

Bocari Cissao, Artisan (Tombouctou)

«Nous avons l’impression d’être en prison»

A l’intérieur de la ville de Tombouctou, il y a la sécurité, mais difficile de se déplacer hors de la ville. A titre illustratif, pour aller à Goundam ou à Diré, le mieux c’est de se déplacer par voie fluviale, sinon on vous tracasse. Et tout le Mali le sait. Personne ne connait le nombre des personnes qui ont été attaquées sur ces routes-là, tellement elles sont nombreuses. Et la situation continue. Nous avons l’impression d’être emprisonnés, parce que nous ne pouvons pas nous déplacer. Cela entrave beaucoup nos activités. Il faut que les autorités remédient à cette situation.

 

Souleymane Sidibé, Directeur régional de l’Artisanat et du Tourisme et membre de la Commission adhoc de réconciliation des populations du Nord (Gao)

«Tout ce qui se dit, c’est de la démagogie»

Rien n’a pratiquement changé depuis la signature de l’Accord. A 5 ou 10 km de la ville, la vie est impossible. Pour nous qui sommes fonctionnaires, pour aller en mission, il faut se faire escorter. La Minusma, des fois, ne répond pas à nos attentes. Nous, on vit de cela. Tout ce qui se dit maintenant, en toute sincérité, c’est de la démagogie. En dehors de 10 km, rien ne va.

 

Fatalmoudou Agomir Touré, Elève (Bourem)

«On peut dire que Bourem est en Sécurité»

Nous remercions le bon Dieu, parce que depuis la signature de l’Accord de paix et de réconciliation nationale, on peut dire que Bourem est en sécurité. Il n’y a pas d’attaque, sauf qu’il y eut récemment un cas de banditisme jusque derrière la ville, mais il n’y a pas eu de victime. La population se déplace partout, sans problème.

 

Fadimata Walet Abdallah, Logisticienne PAT-Mali (Gao)

«Ça va, mais beaucoup reste à faire»

Depuis la signature de l’Accord de paix, je pense que ça va, sauf que tout n’est pas résolu. Il reste beaucoup d’autres choses à faire. Mais le fait que les mouvements armés sont en train de se mettre d’accord, cela est une bonne chose. Et on attend de voir la suite. Je dois par ailleurs noter qu’il y a beaucoup de banditisme dans la zone. Cela est vraiment inquiétant pour ceux qui habitent la région de Gao.

 

Mme Cissé Fatoumata Adama Maïga, femme leader (Ansongo)

«Je dirai plutôt qu’il y a la sécurité»

Avec l’arrivée des militaires, je dirai plutôt qu’il y a la sécurité. A part la justice, tous les autres services de l’administration sont revenus. Mais, quelques fois, il y a des engins qui explosent sur la route de Gao. Ce fut le cas, il y a quelques jours, à Tacharane.

 

Mme Touré Bintou Traoré, Présidente régionale de la Cafo (Tombouctou)

«Tant que nous entendons un seul coup de fusil, il n’y a pas de sécurité»

Je dois dire que l’Accord de paix et de réconciliation nationale est une belle initiative, du fait que les populations du Mali, de façon générale, et particulièrement celles du Nord, ont assez souffert. Cet accord sera peut être le remède à beaucoup de maux auxquels nous sommes confrontés. Pour ce qui concerne la situation sécuritaire, je me réserve vraiment. On n’est pas totalement en sécurité. Jusqu’à présent nous avons des inquiétudes, car tant que nous entendons un seul coup de fusil, pour nous il n’y a pas de sécurité. Tant qu’on ne peut pas se déplacer librement, on n’est pas non plus en sécurité. Il ne peut pas avoir de déplacement, même entre les villes proches les unes des autres. C’est pourquoi je dis qu’il n’y a pas de sécurité. Mais, ça va un peu quand même.

Réalisé par Bakary    SOGODOGO

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