Le processus DDR peine à trouver ses marques. Nous avons approché Mohamed Almaouloud Ramadan de la CMA et chargé au DDR au sein de ce mouvement. Il nous explique…
Mali Tribune : Quel est l’état d’évolution du DDR aujourd’hui ?
Mohamed Elmaouloud Ramadan : Nous sommes à notre 3ème phase pour finir et parachever le bataillon Moc. Aujourd’hui nous étions confrontés à certains nombre de problèmes. Il y’ a deux mouvances Plateformes et elles ne parviennent pas à s’entendre sur une liste unanime. C’est l’un des problèmes qui nous a beaucoup tardés et ce n’est jusque-là pas résolu. Le 2ème point c’est celui des inaptes eux-mêmes. Ceux qui ont été définitivement déclarés inaptes à intégrer l’armée. Ils refusent de partir tant qu’ils n’ont pas connu leur sort. Ils ont eu même à faire des sit-in. Mais je crois qu’il y a une compréhension avec le ministre de la Réconciliation.
Ce dernier a promis qu’ils seront prioritaires dans la réinsertion socio-économique et dans les corps paramilitaires. Cela est une garantie qui pourra atténuer leur frustration. Il y’a aussi la Covid-19. Avec cette pandémie, nous sommes obligés de restreindre le nombre d’éléments pour le screening par jour. Autrefois on allait jusqu’à 200 éléments par jour, mais avec Covid-19 on ne dépasse pas 20/jour. Parce qu’il faut les amener faire le test avant le commencement de tout processus. Celui qui est négatif on l’achemine vers le Moc et celui qui est positif est remis aux autorités sanitaires compétentes.
Mali Tribune : Pouvons-nous être optimistes pour la réussite de ce processus ?
A. R. : Nous, nous avons toujours été optimistes mais souvent il y a des mauvaises volontés de certaines parties signataires de l’Accord particulièrement, le gouvernement. Parce que ce sont eux qui sont responsables de sa mise en œuvre et disposent de moyens à cet effet. En ce qui concerne le Moc et de le DDR accéléré, nous nous étions compris sur un certain nombre de principes dont le commandement de 3 bataillons. Il y a 3 bataillons, 1 à Kidal dirigé par les FAMa, et chaque partie signataire doit avoir le commandement d’un bataillon parmi les 3. Ce principe à son tour n’a pas été respecté. Et c’est difficile que les choses avancent si les parties ne respectent pas leur engagement.
Mali Tribune : Et la Commission du DDR dans tout ça ?
A. R. : La commission DDR elle-même, elle est là. Elle est à pieds d’œuvre mais le problème ne vient pas de la commission elle-même ? mais des parties ou d’autres blocages. Nous espérons que cette fois-ci les choses vont aller plus vite. Que la Plateforme décide de donner une liste unanime et que le gouvernement respecte ses engagements pour le commandement des bataillons. Que chaque partie trouve sa part.
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FAHAD AG ALMAHAMOUD ? SECRETAIRE GENERAL DU GATIA
“L’Etat du Mali doit faire l’effort“
Le président de la Plateforme, secrétaire général du (Gatia) mouvement signataire de l’Accord, a accordé une interview à notre journal pour se prononcer sur le DDR.
Mali Tribune : Quel est l’état de lieu du DDR aujourd’hui ?
Fahad Ag Almahamoud : Vous avez suivi ce qu’on a appelé en son temps le DDR accéléré pour intégrer les éléments du mécanisme opérationnel coordination (Moc) dans les forces armées maliennes. Il y a une autre phase qui devrait commencer incessamment. Une phase qui devrait commencer par les rattrapages des éléments issus du Moc et le complément de ces éléments. Afin que le total des éléments intégrés atteigne 3 000 hommes comme prévu par la Résolution du Conseil de Sécurité. C’est à ce titre que nous avons besoin de 1140 hommes pour compléter les éléments du Moc à 3 000 hommes avant la fin de ce mois de juin.
Mali Tribune : En tant que leader de mouvement armé, êtes-vous optimiste ?
A. A. : Oui je suis optimiste en ce qui concerne le DDR lui-même. Les parties vont donner des lites. Mais ce que j’ai vu par le passé, les éléments qui ont été intégrés par le Moc, donnent l’impression de toujours dépendre des mouvements armés plutôt que l’Etat major des Armées. Cela n’est pas une bonne chose pour moi. Les éléments, une fois intégrés, doivent couper tout lien avec leur mouvement dont ils sont issus et répondre directement du Chef d’Etat major général des Armées.
Mali Tribune : Selon vous, quelle peut être la cause de cette non-soumission à l’Etat major général des Armées ?
A. A. : Certains mouvements ont toujours gardé une grande influence sur leurs éléments. Cela se manifeste par le refus d’aller à certaines missions comme la lutte anti-terroriste ou certaines mutations. Certains éléments intégrés disent clairement que leur mouvement d’origine ne les avait pas autorisés. Ce n’est pas rassurant.
Mali Tribune : Quelle est votre appréciation après tout ça ?
A. A. : Moi je pense qu’on doit arriver à un moment pour corriger les erreurs du passé. Ce lien n’a jamais été coupé entre certains groupes signataires et les terroristes. Ce que je regrette jusqu’ici, les services de renseignement malien n’ont jamais présenté un dossier à la communauté internationale pour dire que telle ou telle autre personne ou tel mouvement entretient des relations avec les terroristes. Il faut que les services de renseignements maliens corrigent ça pour qu’ils nous aident à avancer dans le processus. Il faut que le gouvernement du Mali instruise à ses services d’être regardants en ce qui concerne les liens entre les relations avec les mouvements signataires et les mouvements terroristes. L’Etat du Mali doit faire l’effort pour ressembler à un Etat.
Mali Tribune : Et l’après-DDR ? Qu’en pensez-vous ?
A. A. : Après le DDR, c’est le travail de tous. Les gens qui vont intégrer vont être l’Armée du Mali. L’Armée du Mali aura besoin de ses partenaires de la Communauté internationale comme Barkhane pour s’adonner à la tâche. Puisqu’en ce moment il y aura seulement deux porteurs d’arme, l’Armée et les groupes terroristes. Il n’y aura plus ce qu’on appelle signataires, sous les drapeaux desquels beaucoup de choses se font contre la paix. Ils disparaitront tous.
Propos recueillis par
Koureichy Cissé
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MOHAMED ATTAYIB SIDIBE, PRESIDENT DU MOUVEMENT GANDA IZO
“Après le DDR, tout autre groupe armé pourrait être traité comme ennemi du Mali”
Très optimiste, le président du groupe armé, Mohamed Attayib Sidibé invite à un DDR rapide et invite les combattants à aller vers une armée unie sous la couleur des FAMa afin de faciliter le repérage et la lutte contre l’ennemi de la paix, notamment les groupes terroristes.
Mali Tribune : Parlez-nous de votre groupe “Ganda Izo”. Comment êtes-vous venu à ce groupe ?
A. S. : Je suis venu au mouvement “Ganda Izo” en 2012. En 2013 j’ai été désigné porte-parole et président de la branche politique de ce mouvement. Nous étions proches des mouvements qui défendent l’unité et les valeurs républicaines des mouvements pro-Mali. Par la suite je me suis retrouvé dans la Plateforme du 14 juin 2014.
Mali Tribune : Comment le mouvement Ganda-Izo est-il structuré ? Où opère-t-il au Mali ?
A. S.: Notre groupe armé “Ganda Izo“ est un groupe politico-militaire. La branche politique que je dirige, s’occupe de la démarche idéologique et politique du mouvement. La branche armée, est la branche combattante. Elle est structurée sous un bureau national avec des coordinations régionales. Nous avons une coordination à Mopti, une à Tombouctou et une autre à Ansogo. La branche est là bien sûre au besoin de la sécurisation de la population et leurs biens. Elle est présente partout où il y’a besoin. On a un nombre important de combattants au Nord et au Centre. La branche armée est dirigée par Abdrahamane Housseïni Cissé. Le mouvement a été créé pour protéger la population et leurs biens. Elle n’a aucune velléité séparatiste ou indépendantiste.
Mali Tribune : Le mouvement Ganda-Izo, a-t-il pris part au DDR ?
A. S. : Oui nous sommes concernés par le DDR. On a fourni des éléments pour le Moc de Gao, Tombouctou et de Gao. On est aussi concerné par les 3 000 éléments repartis entre la réinsertion et l’intégration. On est concerné parce qu’on est signataire de l’Accord. Pour qu’il n’y soit pas, il faut obligatoirement que les combattants des mouvements signataires déposent leurs armes pour bénéficier d’une réinsertion sociale. Et les éléments intégrés qui constituent ce qu’on appelle l’armée reconstituée. On souhaite dans un futur proche, qu’il n’y aura que l’Armée nationale. Tout mouvement qui continuera à garder son arme pourra être considéré comme ennemi du Mali.
Mali Tribune : Quelle est votre perception sur le DDR à l’état actuel des choses ?
A. S. : Ma perception sur le DDR aujourd’hui, c’est une très bonne chose. Si le délai prescrit par l’Accord avait été respecté, c’aurait été un très grand pas envers la pacification du Pays. Donc je suis pour le DDR. C’est un programme qui pourra amener beaucoup de jeunes à sortir de l’oisiveté mais aussi à contribuer à la formation de notre armée nationale et faire de celle-ci une armée nationale au sens du terme. Une armée au sein de laquelle on a toutes les composantes, toutes les sensibilités qui composent la nation malienne en quelque sorte.
Le DDR est un espoir. 5 ans après la signature, on a toujours espoir que la paix revienne. On a espoir que les jeunes arrêtent de suivre des groupes qui ont fait de la guerre un métier. On a espoir également que les gouvernants respectent leur engagement et de s’atteler à la mise en œuvre de l’Accord sans discrimination. On a espoir que ceux qui se laissent manipuler et qui, au lieu de servir la paix, provoquent la désunion et alimentent les conflits intercommunautaires, se laissent gagner par la paix. Le Mali avait une très grande richesse et cette richesse c’était la paix. On a espoir que cette paix revienne.
Propos recueillis par
Koureichy Cissé