Deux membres du gouvernement ont échangé avec les diplomates pour leur expliquer les avancées et les contraintes du processus.
Constat unanime : la mise en œuvre de l’Accord pour la paix et la réconciliation nationale issu du processus d’Alger enregistre des progrès indéniables. Cette dynamique a, une fois de plus, été saluée hier par la grande famille du corps diplomatique lors d’une rencontre d’échanges avec la ministre des Affaires étrangères et de la Coopération internationale, Mme Kamissa Camara, et son collègue Lassine Bouaré, en charge de la Cohésion sociale, de la Paix et de la Réconciliation nationale.
La rencontre, qui s’est déroulée dans la salle de conférence du département des Affaires étrangères, avait également mobilisé des représentants d’organisations internationales, comme la représentante spéciale du secrétaire général des Nations unies.
Souhaitant la bienvenue aux « amis du Mali », Kamissa Camara a précisé que ce cadre d’échanges vise à informer le corps diplomatique des différents progrès réalisés dans la mise en œuvre de l’accord. Un exercice auquel le gouvernement se soumet volontiers, puisqu’il est « important que les diplomates connaissent de manière détaillée tous les défis que nous rencontrons, mais également ce que nous envisageons pour l’année 2019 ».
Aussi, l’intérêt de cette rencontre tenait au fait qu’elle intervient à quelques semaines de la présentation du rapport du secrétaire général des Nations unies sur le Mali. Un rapport qui sera étudié par le Conseil de sécurité le 29 mars courant. A ce propos, il convient de rappeler qu’aux termes des dispositions de la résolution 2423 du Conseil de sécurité, il est demandé au secrétaire général de rendre compte six mois après l’investiture du président de la République de l’état de la mise en œuvre de certaines mesures contenues dans l’accord. Au nombre de celles-ci, il y a l’avancement du processus de décentralisation, l’entrée en activité des administrations intérimaires dans le Nord, l’avancement des opérations de cantonnement et de DDR, la pleine opérationnalisation des unités mixtes du Mécanisme opérationnel conjoint (MOC)… «Donc, il est important que nous soyons là aujourd’hui pour donner un cadre particulier à cette présentation de rapport et surtout que nous sachions, en tant que partenaires du Mali, quelles sont les attentes du gouvernement malien », a expliqué Kamissa Camara.
Durant les échanges, qui se sont déroulés à huis clos, chacun pouvait prendre la parole, dire ce qu’il pensait de la mise en œuvre de l’Accord ou demander d’amples explications sur des points précis. Au sortir de la salle, les diplomates étaient visiblement satisfaits. Un constat confirmé par l’ambassadeur russe Alexei Doulian, doyen du corps diplomatique. Il a noté des avancées indéniables enregistrées dans la mise en œuvre de l’accord, en particulier dans le domaine du DDR qui est un des axes les plus importants. «A peu près, 1800 ex-combattants ont été répertoriés et réintégrés dans l’armée pour pouvoir assurer le déroulement des patrouilles mixtes », a rappelé le diplomate, souhaitant que cette dynamique positive continue à inspirer les actions futures des parties concernées. « On attend que le référendum annoncé puisse se tenir ce printemps, peut-être au mois d’avril », a-t-il espéré, parlant du volet concernant les réformes institutionnelles. La communauté internationale, a rassuré Alexei Doulian, demeurera attentive et « sera là pour accompagner le processus de paix ».
Lassine Bouaré, ministre de la Cohésion sociale, de la Paix et de la Réconciliation nationale, a aussi mis l’accent sur la dynamique enclenchée et qui a permis d’atteindre des résultats. Au nombre de ceux-ci, il a cité l’absence de confrontation entre les groupes armés et les forces régulières, mais également entre les groupes armés eux-mêmes ; la fin du processus d’enregistrement des anciens combattants. Au-delà de ce processus, il a été entamé le DDR accéléré, à savoir l’intégration accélérée d’un certain nombre d’éléments et en particulier les éléments constitutifs du MOC. « Ce qui permet de faire des prémices de l’armée reconstituée, telle que prévue dans l’accord », dira-t-il.
Sur le plan des supports, le ministre Bouaré a noté la prise des décrets précisant les critères d’intégration. Et quid des questions de décentralisation ? Le gouvernement a également adopté le décret relatif au transfert de services déconcentrés de l’Etat aux collectivités territoriales. Tout de même, les questions politiques et institutionnelles font l’objet d’une avancée, en l’occurrence la révision constitutionnelle qui est maintenant en chantier avec la mise en place du Comité d’experts et les travaux que celui-ci est en train de réaliser.
Le ministre Bouaré a cependant estimé que des défis restent à relever, concernant notamment les questions d’intégration de la grande masse des éléments armés. « On a fait le DDR accéléré pour les éléments du MOC, mais il reste encore la grande masse dont on doit procéder aux opérations de screening », a-t-il souligné. Mais le défi le plus important, rappellera le ministre, « c’est l’argent », car il faut nécessairement des moyens financiers pour la réalisation de tous ces vastes chantiers ouverts par l’accord. « Les questions de moyens et leur obtention constituent un défi de taille et l’Etat fera de son mieux pour gérer avec le maximum d’efficacité le peu de ressources dont il dispose », a-t-il assuré, avant d’en appeler à « la bonne volonté et à l’engagement du corps diplomatique à appuyer le Mali».
Issa DEMBéLé