Mise en œuvre de l’Accord pour la paix et la réconciliation : Le centre carter souligne des reculs et des obstacles

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L’observateur indépendant met le doigt sur la lenteur du processus de DDR, l’absence de services gouvernementaux à Kidal, le manque de consensus parmi les garants internationaux…

Dans le but de faire le point de ses observations sur la mise en œuvre de l’accord pour la paix et la réconciliation au Mali, le Centre Carter, observateur indépendant, a rendu public hier, son quatrième rapport, le premier au compte de l’année 2019. C’était à la faveur d’une conférence de presse organisée à son siège à Badalabougou et animée par la conseillère spéciale pour le Mali, Mme Bisa Williams, et son adjoint, M. Jean Ntole Kazadi.

Quatrième du genre, ce rapport couvre la période allant de janvier à avril 2019. Il fait cas de reculs récents dans le processus et souligne les principaux obstacles qui entravent le progrès de la mise en œuvre de l’Accord. Il s’agit de la faiblesse de la prise de décision concernant la mise en œuvre, la lenteur du processus de désarmement, de démobilisation et de réintégration (DDR) y compris l’interruption du DDR accéléré, l’absence de services gouvernementaux à Kidal, le manque de consensus parmi les garants internationaux de l’Accord et la crise dans les régions du Centre du pays.

Aussi, le rapport signale que de janvier à avril 2019, le processus de mise en œuvre de l’Accord s’est ralenti et a même reculé dans certains cas.

D’après le rapport, cette période a été marquée par des actions unilatérales du gouvernement et de la Coordination des mouvements de l’Azawad (CMA) ainsi que des frictions internes au sein de la Plateforme, qui ont affaibli sa capacité à contribuer au processus de mise en œuvre du document. Pour la conseillère spéciale pour le Mali du Centre Carter, les obstacles qui persistent sont la faiblesse de la confiance entre les parties, la tendance à la répétition des mêmes questions, l’immobilisme dans le processus, la tendance des mouvements signataires à résister dans ce qu’ils doivent faire. S’y ajoutent la crise dans les régions du Centre du pays qui attire de plus en plus l’attention du gouvernement et de la communauté internationale, l’interruption à la mi-janvier, du processus de DDR qui n’a repris qu’en avril dernier, les questions de réconciliation et de justice, dans une large mesure, négligées.

Selon Mme Bisa Williams, la communauté internationale est présente mais semble incapable, en l’état actuel, d’exiger la mise en œuvre de l’Accord ou de répondre aux besoins humanitaires.

«D’un côté, la MINUSMA fournit un soutien au processus de DDR et offre un filet de sécurité général grâce à ses patrouilles et à ses services civils limités. De l’autre, au nord, les agences des Nations unies sont dans une certaine mesure paralysées par les conditions sécuritaires et les règles de sécurité limitant leurs activités», constate la conseillère spéciale du Centre Carter. Pour surmonter les obstacles, le Centre Carter recommande aux parties maliennes et à la communauté internationale, la mise en place d’un mécanisme rigoureux, impliquant la soumission au président de la République des recommandations spécifiques par le gouvernement, la CMA et la Plateforme pour approbation/désapprobation, l’établissement par la communauté internationale et le Conseil de sécurité de l’ONU, d’un calendrier clair et contraignant pour le processus de DDR et l’engagement public et conjoint du gouvernement, de la CMA et de la Plateforme à revigorer le processus de DDR.

Par ailleurs, le Centre Carter suggère que les résultats de la stratégie de réforme de la justice 2015-2018 du gouvernement soient publiés, que le rôle de la justice traditionnelle dans le système judiciaire malien soit clarifié comme le stipule l’Accord. Mais aussi que le mandat de la Commission vérité, justice et réconciliation soit revigoré et renouvelé, de même que les parties maliennes établissent plus clairement, une politique en matière de justice transitionnelle et de responsabilité individuelle pour les crimes de guerre et les crimes contre l’humanité conformément à l’article 46 de l’Accord.

Cependant, tout le processus n’a pas été dépeint en noir par le Centre Carter qui a aussi noté des avancées, notamment l’organisation des concertations sur la loi d’entente nationale et le lancement par le gouvernement, du processus de réforme constitutionnelle.

A noter que le Centre Carter a été désigné comme observateur indépendant à la fin de 2017. Son mandat consiste à identifier, de manière impartiale, les blocages et à recommander des mesures pour améliorer la mise en œuvre de l’Accord.

Dieudonné DIAMA

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1 commentaire

  1. Il y a eu évidemment du recul dans la mise en œuvre de l’Accord. C’est le volet justice et réconciliation qui a toujours manqué à ce processus de retour à la paix. J’attends parler “justice traditionnelle”. Je suis loin d’être convaincu par cette option. Je serais d’accord que nous réajustions notre système judiciaire à nos réalités, mais pas en créant un système judiciaire parallèle dans un pays aussi fragilisé par les conflits inter-communautaires.

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