Me Harouna Toureh lors de la signature du 20 juin : «Nous demandons, aux représentants des Nations amies une égalité de traitement entre les fils d’un même pays»

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Me Harouna Toureh
Me Harouna Toureh

Distingués invités ;

Chers frères des mouvements républicains de la Plateforme et de la Coordination des Mouvements de l’Azawad (CMA) ;

Mesdames et Messieurs ;

Nous nous réjouissons ce jour 20 juin 2015 de la signature par nos frères de la CMA de l’Accord du 15 mai 2015 tant attendue par les populations du Nord, en ce qu’elles croient que cet accord porte en lui,  un espoir de paix et de réconciliation et leur offre la chance de reconstruire et consolider leurs liens sociaux faits de brassage, de fraternité et de solidarité dans la diversité.

Enfin arrive pour chacun de nous, membre des groupes armés de la «Plateforme d’Alger et de la déclaration d’Alger» l’heure de vérité, l’heure de la preuve de notre engouement réel et de notre désir sincère de sortir nos communautés plongées par notre faute dans la détresse et le doute, l’heure des responsabilités est arrivée.

Saint Exupéry disait «Etre homme, c’est être responsable». Nous sommes des hommes à la CMA et à la Plateforme, nous l’avions prouvé hélas sur les champs de bataille, il nous faut alors rester, sans hésitation, ni lâcheté, responsables de tout ce qui adviendra après le 20 juin 2015 quel que soit les épreuves, l’immensité de la charge et la gravité de l’accusation.

Alors ! Saurions-nous assumer nos responsabilités face à l’histoire qui nous interpelle en offrant enfin au peuple malien meurtri  et martyrisé les fruits doux de la paix à compter de ce jour ?

Convaincus  que le destin de notre pays se joue à nouveau ici et maintenant, les mouvements membres de la Plateforme et de la CMA doivent s’engager résolument à donner à cet accord  toutes les chances de succès en s’abstenant de tenir le moindre propos provocateur, de poser un acte susceptible d’en compromettre la bonne fin, afin que les anciens territoires des anciens empires du Ghana, du Mali et Songhoï appelés depuis peu par certains, Azawad, soient définitivement libérés de tout risque de conflit fratricide.

Nous iront vers nos frères de la CMA, la main tendue pleine de fleurs du désert afin de sceller les liens de l’espérance et de la fraternité ;

Et puisque nous sommes tous frères et sœurs de sang malien. Ensemble, nous prendrons d’assaut les villes et les campagnes du Nord du Mali pour y créer, animer des cellules, des comités dynamiques pour le pardon, la paix et la réconciliation.

Toujours ensemble, sans armes, ni pensées guerrières, sans haine, nous garderons la paix et la protégerons contre les tenants et les soutiens des guerres fratricides. Et encore ensemble, nous devrions faire attention. Attention à ne pas réveiller la colère de nos frères du Sud, car ils sont tout aussi fiers descendants de guerriers fondateurs jadis, de royaumes et d’empires puissants, soninké, mandingue, sénoufo, bambara, peulh, bobo, dogon, toucouleur etc.

Oui l’histoire a fait don au Mali d’un peuple guerrier au Nord comme au Sud, c’est pourquoi la république a besoin en ses moments de conflits intra continentaux et inter maliens d’un gouvernement pacifiste attaché à la culture de la paix.

Sinon, qui pourrait arrêter la colère du peuple malien lorsqu’elle se déchainera, si ce n’est un gouvernement pacifiste, celui que dirigent le Président Ibrahim Boubacar KEITA, l’imperturbable et Modibo KEITA, le Sage, qui nous rappelle à certains moments le plus illustre de ses homonymes, le président Modibo KEITA dont le verbe et le regard autant que la taille obligeaient les grands de son monde du 20ème siècle à lever la tête pour le  voir parler.

Il n’est pas une faute de dire, ce jour de pardon, que prendre les armes contre sa famille, son pays est un crime capital, les prendre pour les défendre est une valeur patriotique, capitale. A la plateforme, vous l’avez compris, nous les avons prises pour provoquer la paix et préparer le pardon et la réconciliation.

Excellence, Mesdames et Messieurs,

Nous le croyons, l’Accord du 15 mai 2015 nous offrira tout le long de sa mise en œuvre des occasions de fraterniser, de panser les plaies qui ont été causées à notre pays par notre faute et de forger pour des lendemains enchanteurs une nouvelle civilisation, celle de la Paix et donc de l’espérance.

En effet, après tant de sacrifices hélas souvent ultimes consentis, tant de douleurs et de meurtrissures subies par les paisibles populations du Mali vivant au Nord, tant de leçons à tirer de ces vaines batailles à coups de canons et de balles :

– N’avons-nous pas compris qu’il n’existe pour nous les acteurs de ces sombres jours vécus qu’une seule et unique voie, celle de l’enfantement d’un Accord politique global, inclusif et sincèrement définitif, un accord de pardon, de paix et de réconciliation?

Les Mouvements Républicains de la Plateforme s’y sont engagés depuis le début de ce processus à Alger en janvier 2014.

– N’avons-nous pas prouvé à chaque étape de ce processus notre volonté d’aller au pas de charge vers le dialogue inclusif et fraternel, vers la paix?

– N’avons-nous pas assez prouvé que nous les mouvements républicains de la Plateforme savons tenir d’une main un fusil et de l’autre un rameau d’olivier, celui que nous vous avons toujours présenté à Alger, chers frères de la CMA,  à chacune de nos réunions?

Nos victoires acquises par la force des armes à Tabankort, Tarkint, Tessalit, N’Tillit, Bamba, Bintagoungou, Ménaka etc. et votre victoire prétendue acquise à Kidal, ne constituent-elles pas en réalité pour nous tous des défaites de l’amitié, de la fraternité, de la tolérance, du pardon dans ses mêmes localités entre les fils et les filles d’un même pays, le Mali.

Au nom de mes compagnons des Mouvements Républicains de la Plateforme, de nos officiers, sous-officiers et combattants pour la liberté et le respect de leurs droits humains, je tends à nouveau la main à nos frères des Mouvements de la Coordination.

Et je prie en disant ceci :

Puissions-nous chers frères de la coordination jeter l’encre pour la dernière fois à compter de ce jour afin que soit enterré le deuil de l’hiver et que chante l’espoir d’un printemps plein de promesses et de fleurs? Le Mali, la patrie de la paix et de la dignité, de la fierté et de l’hospitalité vous ouvre ses bras, ne le décevez point à nouveau.

Le Gouvernement du Mali ne doit avoir qu’un seul front, celui de la libération totale de notre territoire et son occupation permanente par l’armée du Mali, une armée que nous voulons nationaliste comme celle de l’Algérie des années 1960, une armée dissuasive, forte, aguerrie et toujours prête à défendre son pays, au cas où de nouveaux adeptes du narco-terrorisme international s’aventureront sur nos terres pour tenter d’y installer un empire du mal. Le Nord du Mali depuis plus de 3 ans est sans visage et sans identité.

Il nous est solennellement demandé, chers frères de la CMA et de la plateforme de contribuer à compter de ce jour à lui redonner son visage et son identité d’antan par l’instauration d’un silence absolu des armes, car les populations du Nord redoutent,  avant ou pendant le cantonnement des forces combattantes de la plateforme et de la CMA, que certains individus nourrissant de noirs desseins ne s’adonnent à leur sport favori, fait d’enlèvements, de vols, de pillages, de braquages dans les villages et sur les routes.

Nous restons toujours liés par notre serment du 15 mai 2015.

L’accord du 15 mai 2015 vient de naître pour la deuxième fois ce 20 juin 2015.

Et comme l’a si bien prédit le président Modibo KEITA le jour de naissance de la République du Mali le 22 septembre 1960 et après l’éclatement de la fédération du mali « Le Mali continue » et nous disons après lui « Le nom Mali continuera à résonner comme un gong sur la conscience de tous ceux qui de l’intérieur et de l’extérieur ont œuvré à sa destruction ».

Et que « c’est seulement dans l’unité que le Mali pourra résister à toute forme de convoitise ou d’emprise sur son territoire ou ses richesses naturelles ». Dixit Président Modibo KEITA.

Nous demandons, aux représentants des Nations amies du Mali venues le secourir, comme jadis nos pères africains le firent en faveur d’autres nations lors des deux grandes guerres, en Indochine, au Vietnam etc. une égalité de traitement entre les fils d’un même pays. Une égalité de traitement qui nous fut si longtemps disputée à Kidal, à Ménaka, à Ber, à Tombouctou, à Gao etc. Cette égalité de traitement est nécessaire car elle constitue un gage certain à la renaissance de la fraternité entre frères de la CMA et de la Plateforme, un gage de Paix.

Pasteur disait : « La science n’a pas de patrie ». Ne pourrait-on pas dire la même chose de la Paix, par ce qu’elle représente à la fois un état d’esprit et un comportement indispensables à la vie humaine.

Le destin à court terme de notre pays se joue maintenant et dépendra sans nul doute de l’issue de la dernière bataille, la bataille pour la paix et la réconciliation et chacun doit s’y jeter avec l’énergie de l’espoir.

A la Plateforme, nos pensées reconnaissantes vont à l’endroit de la Communauté Internationale pour les efforts déployés et les sacrifices consentis à travers BARKHANE et la MINUSMA afin d’aider notre beau pays à sortir de la crise et l’encourageons chaleureusement à persévérer pour le grand bien du peuple malien.

Cependant, nous tenons à dire publiquement, mais cordialement deux vérités :

La première : La confiance et l’amitié des maliennes et des maliens ne seront jamais acquises à personne tant que dureront dans nos relations le paternalisme, l’esprit de joug et de sujétion.

La deuxième : Les Enfants et petits Enfants de Houari Boumedienne, de Gamel Abdel NASSER, de Modibo KEITA, de Kwamé N’KRUMA, de Robert MUGABE, de Paul KAGAME et de Sékou TOURE ont fait leur choix, ils préfèrent la liberté et le respect dans l’obscurité à l’esclavage et la soumission dans la lumière.

Vive les peuples des pays amis du Mali, membres de la CEDEAO, de l’Union Africaine, de l’Union Européenne, de l’Organisation de la Coopération Islamique (OCI) et des pays membres de l’équipe de la Médiation (Algérie, Niger, Burkina-Faso, Mauritanie, Tchad, Nigéria, France, USA, etc.)

Vive les peuples frères d’Algérie et du Mali !

Vive la paix !

Fait à Bamako, le 20 juin 2015

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