Manœuvres algériennes contre la Libye au nord-Mali : Révélations sur la crise de Kidal

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De mai 2006 à maintenant, l’Algérie a réussi à tromper à la fois l’opinion malienne et internationale sur son véritable jeu au nord du Mali et sur toute la bande Sahélo-saharienne. Le colonel Kaddafi était un bouc émissaire idéal pour couvrir les Algériens. 

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Janvier 2006, la Libye décida d’ouvrir un consulat à Kidal. Le Guide de la révolution libyenne, pourtant animé de bonnes intentions pour les régions du septentrion malien, était loin d’imaginer qu’il dérangerait nos voisins du nord, nullement rassurés de cette initiative. Pourquoi ? L’Algérie ne voulait ni plus, ni moins, voir une représentation libyenne dans cette partie du Mali qu’elle considère comme une chasse gardée.

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Or, l’idée libyenne d’ouvrir un consulat à Kidal était venue suite à divers déplacements qu’ont effectué à Tripoli plusieurs délégations des ressortissants du nord, courant 2005. Les délégations de femmes, de jeunes, de notabilités et même d’élus locaux, ont souvent apporté dans leurs bagages des doléances relatives au développement des régions nord du Mali. Consécutivement, à ces doléances soumises aux autorités libyennes, le Guide de la révolution décida une Kyrielle de mesures.

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Dans l’entendement du dirigeant libyen, la stabilisation du nord-Mali et de toute la bande sahélo-saharienne passe par le développement.

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Aussi, insista-t-il, sur la nécessité d’éradiquer certains maux qui gangrènent cette partie du Mali et de toute la bande : banditisme, trafic, menace islamiste, terrorisme. 

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Comment donc lutter contre ces maux ? Kaddafi avait son idée. Il décida alors l’ouverture d’un consulat à Kidal. En fait de consulat, il s’agissait d’un Bureau de coopération qui avait en charge la réalisation de plusieurs projets à Kidal, Tombouctou et Gao.

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Dans ces trois régions, la Libye envisageait de faire beaucoup de réalisations : forages, construction d’écoles et de centres de santé, ainsi que la formation et l’équipement de plusieurs groupements de femmes et de jeunes. 

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Pour un départ, le Guide débloqua un pactole de 50 millions de dollars, environ 25 milliards de F CFA qu’il mit immédiatement à la disposition du consulat de Kidal. Les travaux devaient être exécutés de commun accord entre les autorités maliennes et libyennes. Ce n’est pas tout. Il était prévu, la construction d’un aéroport à Kidal, afin de désenclaver cette localité distante de plus de 1000 kilomètres de la capitale.

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Hostilité algérienne 

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L’annonce en fin 2005 de l’ouverture du consulat libyen à Kidal suscita la panique, voire une certaine hostilité, du côté d’Alger.

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A défaut d’empêcher la réalisation d’une décision de souveraineté nationale et qui releve de la coopération bilatérale entre les deux pays (Mali-Libye), les Algériens ont commencé à exercer de vives pressions sur le Mali. Pareillement, ils bouclent leur frontière du côté de Kidal. Objectif avéré : asphyxier cette localité, et éventuellement provoquer des troubles. 

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Côté diplomatique : en fin 2005, un nouvel Ambassadeur, Abdelkrim Gheraieb, est nommé à Bamako. La particularité de ce diplomate, qui est à son second séjour au Mali (fait rarissime) est, qu’il est considéré comme un spécialiste des questions du nord-Mali. A vrai dire, il aurait infiltré depuis des années de nombreuses sphères politiques, administratives et même sécuritaires dans notre pays.

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Le diplomate aura pour principale mission de contrer « toutes velléités libyennes » au Mali. 

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Pour épauler le diplomate, Alger envoie à Bamako, d’autres agents dont un certain colonel Rachid. Il est chargé des renseignements au niveau de l’Ambassade.

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Au même moment, à Gao, un nouveau consul y dépose ses bagages. 

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A Kidal, plusieurs agents, appartenant au redoutable service des renseignements algérien, débarquent dans la localité. L’on évoque l’ouverture, dans cette cité, d’une « boulangerie » algérienne, juste après l’arrivée des Libyens et en face de leur consulat. Le fait n’a pas échappé aux Kidalois.

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En réalité, les services de renseignements algériens n’avaient guère lésiné sur les moyens. Le nord-Mali est un enjeu. A ce titre, il mérite le prix fort. 

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Ce dispositif diplomatique et sécuritaire mis en place, tant à Bamako qu’à Kidal, par les Algériens, s’accompagne à partir de janvier 2006 d’une campagne d’intoxication de l’opinion pour polluer l’atmosphère. La presse algérienne est ainsi  mise à contribution et dénonçait quotidiennement les visées de Khaddafi sur la bande sahélo-saharienne. L’on va jusqu’à prêter au Guide des intentions expansionnistes, visant à la création d’un Etat sahélo-saharien ; avec le soutien des communautés touaregues.

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En février 2006, la fête du Maouloud célébrée à Tombouctou, sous l’égide du Guide libyen, apporta de l’eau au moulin des Algériens. Dès lors, fallait-il tout mettre en œuvre du côté d’Alger pour contrecarrer les projets du Guide. 

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Chasser les libyens

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La campagne algérienne s’intensifia avec l’ouverture, en mars 2006, du consulat libyen. Une ouverture qui, faut-il le préciser, a failli capoter au moment même où une délégation libyenne- venue pour la circonstance- était arrivée à Bamako. 

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En effet, une haute autorité malienne avait pris sur lui, l’initiative d’informer les Libyens à Kidal, via le commissaire, le chef de la gendarmerie et celui de la garde, que la cérémonie d’ouverture du consulat n’aura pas lieu. Or, les Libyens avaient reçu du gouvernement malien tous les documents administratifs et diplomatiques autorisant l’ouverture de la représentation consulaire.

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A présent, une énigme subsiste quant à la décision de l’autorité en question. Pour certains, la main algérienne est passée par là. C’est dans une atmosphère de suspicion, de colère algérienne et de méfiance que le consulat libyen a finalement ouvert ses portes 

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Ensuite à Kidal, les manœuvres algériennes devenaient de plus en plus pressantes. Objectif : chasser les Libyens.

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Deux mois après, alors que le Consul Moussa Kony n’avait pas encore occupé son fauteuil, éclata une insurrection armée à Kidal, le 23 mai. Quelques jours après, les insurgés se retranchent vers la frontière algérienne, ils demandent puis obtiennent une médiation… algérienne. 

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En vérité, l’Algérie venait d’atteindre son principal objectif : le départ des Libyens de Kidal. Du coup, Kaddafi décide le gel des 50 millions de dollars et la suspension de toutes interventions au nord du Mali.

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Les Algériens pouvaient alors se frotter les mains. 

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Avec la nouvelle crise, les Algériens restent sur une seule et même logique : empêcher d’autres pays à intervenir dans le septentrion malien, surtout au moment où les recherches pétrolières dans cette partie attirent les investisseurs étrangers.

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Aussi, ils semblent mécontents de l’intérêt que ne cesse de manifester les Etats-Unis à l’adresse du nord-Mali. A ce sujet, un journal algérois « L’expression » tentait de justifier, il y a quelques jours, à propos de l’implication algérienne au nord du Mali « il y va aussi de la sécurité des frontières sud de l’Algérie et de toute la région du Sahel, convoitée surtout par Washington au nom ; tout bonnement, de la logique de « lutte antiterroriste dans le monde. » 

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En définitive, les Algériens sont aujourd’hui démasqués. Ils ne veulent voir aucun pays intervenir dans le septentrion malien. Après avoir bloqué le colonel Kadhafi, ils persistent à décourager d’éventuels partenaires du Mali, en suscitant une tension permanente dans cette partie de notre territoire. Or, la réalité est que nos voisins, de l’indépendance du Mali à nos jours, n’ont posé aucun acte dans le sens du développement des régions nord du Mali, et au-delà. Alors, comment comprendre l’attitude d’un tel pays ? C’est là toute la question.

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C. H. Sylla

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