Les islamistes du Nord-Mali viennent de donner la pleine mesure de la scène qu’ils s’apprêtent à jouer les mois à venir. Ils n’entendent pas se faire conter l’histoire et se disposent même à dévider leurs tripes pour ne pas céder le moindre carré de territoire conquis par la force des armes. C’est à cette fin qu’ils ont entrepris des manœuvres visant à entamer le moral des autorités maliennes et de la communauté internationale qui préparent une contre-offensive. Habib Ould Issouf, l’un des dirigeants du Mouvement pour l’unicité et le Jihad en Afrique de l’Ouest (MUJAO) à Gao déclarait : « ils veulent la guerre ? On va faire la guerre. C’est pourquoi, nos frères viennent de partout … »
Ce n’est pas la première fois que des hordes islamistes affluent dans cette partie du Mali. Il n’y a pas si longtemps qu’on y avait signalé la présence grâce de maquignons venus du Nigeria, du Niger, du Sénégal, de la Mauritanie, de l’Algérie, du Pakistan et d’autres pays du Moyen-Orient. Ces jusqu’aux-boutistes, accordant le primat aux méthodes barbares et sauvages, ont contribué à radicaliser indéniablement le mouvement islamiste, Ansar Dine, qui les a rameutés. Bastonnades, lapidations, amputations, tout ou presque, sports favoris de ces mouvements islamistes qui flanchent sous l’emprise du monarque de l’intégrisme, font désormais partie intégrante des habitudes des hommes de Lyad Ag Ghali. Avec l’afflux de nouveaux viatiques soudanais, tunisiens, égyptiens et sahraouis, dont la présence se limitait à quelques brebis égarées, il faut s’attendre à ce que d’autres vagues de fondamentalistes suivent ; et ainsi de suite.
De sorte que les groupuscules armés du Nord-Mali qui ont infligé de revers cinglants au Mouvement national de la libération de l’Azawad (MNLA) pourraient se retrouver submergés, à un moment donné, par la nouvelle vague de jihadistes. Les changements intervenus à la tête d’AQMI pour le Sahel et le Sahara sont illustrateurs de ce qui pourrait advenir. Plus violents et excessifs par nature, ces derniers arrivants pourraient tenter de happer les premiers occupants, comme dans la fable de la Fontaine où les plus tendres sont écrabouillés par les plus durs. A défaut, de « petits empires » pourraient être constitués, sous l’épouvantail mouvant de la charia, dans ce vaste territoire déshérité.
Avant qu’on en arrive à cette situation qui frise avec la “talibanisation” du Nord-Mali, il importe que la communauté internationale, qui vient de convenir d’une mobilisation optimale pour la restauration de l’intégrité territoriale, pense à la constitution d’une force africaine à l’image de la Mission de l’Union africaine en Somalie qui combat les Shebabs. Là encore, les armées africaines sont à pied d’œuvre, depuis bientôt un peu plus de deux ans, pour enlever le goût de compromettre à des combattants qui n’ont pas eu autant de soutiens de l’extrémisme musulman que ceux du Mali.
Ce constat commande que les puissances occidentales sortent de la trop grande prudence qui les amène à ne promettre que des appuis logistiques. Ils ne sont d’ailleurs pas sans savoir que des pays, qui font partie de la solution, rechignent à apporter leur contribution. C’est vrai qu’on ne peut pas tout attendre des Occidentaux, mais la vérité est là, têtue et outrageante. Il faut faire avec, sinon combien de temps faudra t-il aux forces de la CEDEAO ou de l’UA pour tirer le Mali des eaux fangeuses de la crise ?
Adama BAYALA (badam1021@yahoo.fr)
Sidwaya