La CEDEAO est au pied du mur dans ce qu’il est désormais convenu d’appeler le bourbier malien. Elle attend le feu vert de l’ONU qui devrait être obtenu sans problème compte tenu du repositionnement des autorités maliennes, de l’urgence et des intérêts en jeu. Elle attend surtout que l’ONU lui procure, en plus des instruments juridiques, les moyens matériels et financiers qui font cruellement défaut. L’organisation sous régionale qui avait choisi de soigner la maladie sans prendre le temps d’écouter le malade paie depuis six mois le prix de ses nombreuses sorties de route.
La CEDEAOavait cru pouvoir faire sans les véritables acteurs de la crise, comptant en cela sur quelques responsables politiques locaux qui n’ont pas d’emprise réelle sur le cours des évènements. Heureusement qu’à son retour de France, le président par intérim a su recadrer les choses en réhabilitant les forces de défense et de sécurité et en les mettant face à leurs responsabilités. Depuis lors, comme par enchantement, tout semble bien se passer. Du coup s’est effondré l’argument principal de ceux qui demandaient la mise à l’écart des militaires maliens et la protection de la transition parla CEDEAO. Enla renvoyant à sa copie, l’ONU a en fait poliment invitéela CEDEAOà se mettre en accord avec les décisions des organes de la transition qui, pour une fois parlent d’une seule voix, celle du président. Aussi, le Mali garde-t-il la main et il fait quelques concessions dont la plus importante est l’acceptation de l’implantation du Quartier Général des soldats dela CEDEAOà Bamako ou dans sa périphérie afin de coordonner les opérations d’appui à l’armée nationale. On se rend compte que c’est l’entêtement de certains à ignorer les militaires dans la résolution de la crise qui a créé un ensemble de conflits internes et une méfiance vis-à-vis dela CEDEAOavec le blocage allégué des armes destinées au Mali. Comment peut-on imaginer un seul instant qu’un président par intérim puisse réussir une mission aussi difficile et complexe que celle de la reconquête d’une partie du territoire national en se mettant à dos sa propre armée ? Heureusement que le jour finit toujours par se lever.
L’esprit du 20 janvier
Le peuple malien a du ressort et il reste profondément attaché à sa souveraineté malgré la grave crise qu’il traverse. Du 20 janvier 1961 (date de départ de la dernière base militaire française) à ce jour, le Mali est resté constant dans son refus de toute présence militaire étrangère sur son sol. Cette fois-ci, au regard des données en présence, il est nécessaire d’adapter la posture car des erreurs internes de gestion ont mis à mal notre système de défense, des armes destinées au rééquipement de l’armée sont bloquées dans certains ports dela CEDEAO, pendant qu’une bande de hors-la-loi sème la désolation dans le septentrion. De ce fait, le Mali doit composer avec la communauté internationale et il a accepté de le faire. Dignement, c’est-à-dire en faisant entendre et accepter ses préoccupations contenues dans la lettre du président par intérim.La CEDEAOen demandant et en obtenant le retour à l’ordre constitutionnel se devait elle aussi de comprendre que ce qu’on attend d’elle c’est son aide sous la forme d’un appui logistique pour libérer le nord et non qu’elle se substitue aux autorités maliennes. Les institutions de la république fonctionnent, l’armée se réorganise progressivement, la vie suit son cours tant bien que mal. Et si, dans un premier temps la cacophonie avait régné au sommet de l’Etat, on constate avec beaucoup de bonheur que les différents responsables de la transition restent farouchement attachés au respect de la souveraineté du pays. L’esprit du 20 janvier a résisté au temps et le Mali démocratique continue de fêter son armée à cette date. L’armée est un symbole de la fierté nationale. Il n’y a pas de grande nation sans une grande armée comme il ne saurait y avoir une grande économie stable sans un bon système de défense. L’armée en tant qu’institution doit être respectée et défendue.
Un cheval de Troie appelé MNLA
Certains se plaignent des lenteurs observées dans la conduite de la transition. Pourtant, ce temps a permis de comprendre et d’appréhender un certain nombre de situations qu’une précipitation nous aurait contraints à subir. A la lumière de ce qu’on vit actuellement, on aurait commis la plus grave erreur de notre histoire en laissant la gestion de la crise entre les seules mains dela CEDEAOet du médiateur. Non seulementla CEDEAOne dispose pas des moyens matériels et financiers nécessaires mais elle a choisi une stratégie qui ne privilégie pas les intérêts du Mali. Elle veut coûte que coûte faire du MNLA un interlocuteur alors qu’on sait que ce mouvement a été produit dans certains « laboratoires » d’Europe qui ont mis à sa disposition d’importants moyens pour lui donner les apparences d’une véritable force face à l’armée malienne qu’on savait désorganisée et affaiblie. En réalité, il n’a été que le cheval de Troie qui a servi à transporter des islamistes et des narco trafiquants qui ont fini par s’en débarrasser une fois introduits dans la place. Que vaut réellement le MNLA ? Pas un pet de lapin dans le vaste désert contrôlé par d’autres que lui. C’est la raison pour laquelle, sans territoire et sans population, sa direction a dû se réfugier dans un pays voisin. Un adage de chez nous dit que vous commencez à douter de votre ami le jour que vous le verrez parer des habits de votre ennemi. Pour les Maliens, le MNLA n’est pas un interlocuteur crédible. La supercherie est évidente et les tentatives pour le remettre en selle ne changeront pas grand-chose. En outre, les tenants locaux de la sécurisation des organes de la transition par les forces dela CEDEAOsemblent particulièrement craindre les forces armées et de sécurité du Mali. Pourquoi ? Bien que le président par intérim ait mis fin à ce débat, les craintes ont-elles été levées pour autant ? Il faut espérer que les concertations nationales annoncées, si elles se tiennent effectivement puissent permettre d’apporter l’apaisement à tous les niveaux de façon que la vraie politique reprenne ses droits. Pour cela cependant, il faut que les différents acteurs civils comme militaires s’acceptent et se respectent car la défiance appelle la défiance.
La nouvelle armée malienne requinquée chassera certainement du territoire national tous les illuminés qui veulent se servir de l’Islam pour couvrir des activités hautement condamnables. Elle réussira grâce au concours de Dieu, à la résistance des populations locales et avec l’aide de la communauté internationale. Alors, les bandits enturbannés devront retournés chez eux et les autorités de leurs pays d’origine doivent s’apprêter à les recevoir et à gérer la suite des évènements. Pour le Mali, il s’agira de sécuriser effectivement le septentrion pour que pareille situation ne se reproduise plus, en implantant des bases militaires dissuasives partout où cela est nécessaire. Pour répondre enfin aux velléités sécessionnistes de certaines communautés du nord, il faudra envisager l’organisation d’un référendum sur la question, de façon que les populations du nord, toutes les populations du nord se prononcent très clairement sur le projet. C’est le prix à payer pour arriver à une paix durable.
C Amadou