Alors que les combats se poursuivent à Gao, retour sur la prise de Tessalit. Plus d’une centaine de militaires français membres des forces spéciales ont été mobilisés pour reprendre cette ville de l’extrême nord du Mali.
C’est une nuit 5, en jargon aéronautique. Une nuit sans lune -sombre et sans visibilité. Ce 7 février, vers 20 heures, plus d’une centaine d’hommes des forces spéciales s’apprêtent à déclencher l’une de leurs plus grosses interventions. Tous appartiennent au commandement des opérations spéciales (COS) et proviennent d’unités réparties au sein des trois armées: terre, air, marine. “Chacun possède ses spécificités issues de son armée d’appartenance, mais tous ont en commun une même culture ‘FS’, forgée au fil des missions menées en commun”, souligne un officier. Depuis le début de l’opération Serval, au Mali, l’élite de l’armée française enchaîne les interventions, comme jamais auparavant.
Engagées dès les premières heures du conflit, le 11 janvier, les forces spéciales -présentes à Ouagadougou dans le cadre du dispositif Sabre- ont d’abord stoppé les colonnes de pick-up de djihadistes, qui descendaient vers Bamako ; un pilote d’hélicoptère, Damien Boiteux, a perdu la vie dans l’action. Elles ont ensuite ouvert les portes de Sévaré, Konna, Douentza et Gao, puis, remontant vers le nord, Kidal et Agueholk. Une reconquête rapide et sans heurts, sauf à Gao, où des accrochages sérieux ont eu lieu avec les groupes djihadistes. Le COS possède une grande autonomie d’action et une réactivité précieuse, grâce à ses moyens aériens, en particulier. Sa faible empreinte au sol lui permet d’agir vite et de frapper fort. “Le dispositif Sabre a été renforcé très tôt, indique un haut gradé. Nous avions aussi la chance d’avoir des forces qui étaient au bout de leur quatre mois de détachement, donc parfaitement acclimatées au terrain.”
Une quarantaine de commando parachutistes largués en quelques minutes
Ce 7 février, il s’agit de reprendre l’aéroport puis la ville de Tessalit, au pied du massif de l’Adrar des Ifoghas, près de la frontière algérienne. Dans les jours précédents, les chasseurs français ont bombardé la zone, détruisant dépôts logistiques et camps d’entraînement. Selon le récit fait à L’Express par un officier, à 20 heures, un premier avion de transport et d’assaut de l’escadron 3/61 Poitou largue, en quelques minutes, une quarantaine de commandos parachutistes. Leur mission: prendre et sécuriser l’aéroport, afin de permettre l’arrivée de renforts aéroportés et héliportés. Au sol, deux groupes se forment immédiatement. Pendant que les commandos marine et les opérateurs du 13e Régiment de dragons parachutistes se déploient aux alentours pour détecter toute présence hostile, les hommes du 1er Régiment parachutiste d’infanterie de marine (RPIMa) se postent face à une petite zone d’habitation susceptible d’héberger des djihadistes. Aux spécialistes des commandos parachutistes de l’air du CPA 10 d’intervenir. Leur job: reconnaître et marquer le terrain de manière à guider les avions français dans leur manoeuvre d’atterrissage. La piste en dur est inutilisable ; c’est une piste sommaire parallèle qui sera utilisée.
Vers 1 heure du matin, un premier avion se pose sur une courte distance. Il débarque plusieurs véhicules armés et leurs équipages, avant de redécoller. Un deuxième suit aussitôt. Dix minutes plus tard, c’est au tour des hélicoptères de libérer leurs commandos. A 2 heures, ils entament leur progression vers la ville, appuyés par les hélicoptères d’attaque Tigre, équipés d’un canon de 30 mm. Les forces spéciales ne rencontrent aucune résistance: à 8 heures, la ville est sous leur contrôle. Les forces terrestres conventionnelles de l’opération Serval peuvent alors prendre le relais. Avec Tessalit, s’est achevée la reconquête des centres urbains. Le plus dur reste à faire.
lexpress.fr / Par Romain Rosso, publié le 21/02/2013 à 17:12