Les premières autorités intérimaires, censées rétablir l’autorité de l’Etat dans les régions du Nord, ont été installées à Kidal. Une première étape qui a pris plus de 18 mois, mais l’accord de paix fait un grand pas en avant. Cependant, les challenges restent conséquents. RFI a pu se rendre dans l’extrême nord-est du Mali pour assister à cette cérémonie.
La délégation d’officiels n’aura vu Kidal que par la fenêtre opaque des blindés de l’ONU. Le trajet entre l’héliport et le nouveau siège des autorités intérimaires s’est déroulé sous très haute sécurité. Les forces françaises Barkhane, les casques bleus, mais aussi les soldats de la Coordination des mouvements de l’Azawad ont totalement verrouillé la ville pendant quelques heures, le temps d’une cérémonie express.
Une trentaine d’officiels, l’ambassadrice de France, les représentants de l’ONU et ministre du gouvernement malien on fait le déplacement depuis Bamako. Quelques discours sans fard, dans lesquels tous sont félicités de cette première étape symbolique.
Le drapeau du Mali n’a pas été hissé sur Kidal. A la place, des écharpes aux couleurs nationales ont été distribuées aux nouvelles autorités intérimaires, saluées par de timides applaudissements et des slogans pro-Azawad venus du fond de la salle, un territoire revendiqué un temps par les ex-rebelles. « On sait qu’il y a des difficultés, admet Haminy Belco Maïga, premier vice-président de ces autorités intérimaires. La première, c’est la cohésion sociale. Dans l’autorité intérimaire, il y a la plateforme, il y a les représentants de l’Etat, les représentants de la CMA. Ce n’est pas fortuit. Tant que les gens ne parlent pas le même langage, tant que les gens ne s’entendent pas, il ne peut pas avoir de développement, il ne peut pas y avoir de sécurité. »
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Victoire symbolique avec la présence de tous les ambassadeurs
Aucune des personnalités présentes à Kidal ne s’est risquée à mettre sur le tapis l’épineuse question territoriale. La seule allusion à la question du territoire est venue de Me Harouna Toureh, le porte-parole du groupe armé pro-gouvernemental de la Plateforme. « Nous sommes venus en frères. Et je peux vous confirmer que ce matin, j’ai eu une grande émotion à l’aéroport de Bamako lorsque les frères de la Plateforme ont rencontré ceux de la CMA. Ils se sont donné l’accolade. C’était de la fraternité. Et je constate qu’ici également dans cette salle, je ne fais la différence entre personne. Vous êtes tous enturbannés et je ne vois pas la Plateforme, je ne vois pas la CMA. Je ne vois que des frères ici. Et je vous souhaite de rester frères, de continuer à vous tendre la main. Ce qui compte, c’est le présent et l’avenir que nous devons construire ensemble, en toute fraternité dans le respect des règles, je précise bien, de cette République que nous avons unanimement reconnue dans l’accord que nous avons tous signé. »
« Le simple fait d’avoir tous ces ambassadeurs présents ici aujourd’hui est déjà une immense victoire », glisse-t-on du côté de l’ONU. Mohamed Ag Erlaf, le ministre de l’Administration territoriale, préfère lui ne pas céder au triomphalisme : « Ce qui nous attend est encore plus difficile que ce que nous avons accompli. Il s’agira dorénavant de mettre les services sociaux de base en place, de rendre les services publics aux populations et aux citoyens, d’organiser les élections pour que ces autorités intérimaires soient remplacées par des collèges unis. »
La paix et la réconciliation nationale sont loin d’être gagnées, voilà ce que glisse un des vice-présidents de ces nouvelles autorités.
Publié: le 1 Mars 2017 par rfi