C’est en principe aujourd’hui que prend fin la réunion de deux jours qui regroupe depuis hier mercredi à Bamako les experts du groupe d’action antiterroriste du G8 pour étudier les voies et moyens de renforcer la lutte contre Al Qaïda au Maghreb islamique (AQMI) qui détient sept otages, dont cinq français, un Malgache et un Togolais, au sud de l’Algérie, dans la région frontalière avec le Mali. Malgré l’importance de l’ordre du jour, l’Algérie a boudé cette réunion.
Des experts du G8 (États-Unis, Russie, Japon, Canada, France, Grande-Bretagne, Italie et Allemagne) et des pays de la région sahélienne (Maroc, Mauritanie, Niger, Burkina Faso, Sénégal, Nigeria) ainsi que de l’Union européenne (la Suisse, l’Espagne et l’Australie) se réunissent à Bamako, depuis hier, mercredi 13 octobre, pour s’entendre sur les moyens d’intensifier la lutte contre Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi). La rencontre prend fin en principe aujourd’hui et des décisions importantes, voire décisives dans la lutte contre AQMI, devront y sortir.
La rencontre est à l’initiative du Groupe d’action antiterroriste des pays du G8 (CTAG), créé en 2003 pour renforcer les capacités de la lutte contre le terrorisme. A travers la rencontre de Bamako, les experts du G8 veulent mettre l’accent sur l’importance du renforcement de la coordination des actions anti-terroristes dans la bande sahélo-saharienne, notamment par l’intensification du contrôle des frontières pour limiter les mouvements des terroristes et l’implication de l’Union africaine (UA) et la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (Cédéao. La réunion de Bamako se charge, justement, de définir le rôle que ces deux organisations auront à jouer dans cette dynamique unitaire anti-Aqmi.
Malgré l’importance de l’ordre du jour de cette réunion, les experts algériens y ont brillé par leur absence. L’Algérie a purement et simplement ignoré l’invitation du groupe d’action terroriste, arguant que la lutte contre Aqmi est l’affaire des seuls pays du Sahel. En d’autres termes, l’Algérie ne veut pas voir s’impliquer, dans cette lutte contre AQMI, des pays autres que ceux de la bande sahélo-saharienne.
L’on comprend alors mieux aujourd’hui les déclarations du directeur général par intérim du Centre africain d’études et de recherche sur le terrorisme (Caert), l’Algérien Lies Boukraâ, qui a qualifié AQMI de "leurre" qui cache un projet de recolonisation du Sahel.
Cet argument d’apparence séduisant, cache mal les velléités de rivalité entretenue par l’Algérie, vis-à-vis du Mali, au point de s’en prendre à l’armée malienne, pour un oui ou un non. En effet, l’on se rappelle que le 18 septembre dernier, un camion-citerne parti de Tombouctou pour ravitailler des unités mauritaniennes en panne sèche après deux jours d’accrochage contre les terroristes, a été intercepté par des combattants d’AQMI. Des incidents qui arrivent sur n’importe quel champ de bataille. Mais les services de sécurité algériens brandissent cette histoire pour en faire un instrument de campagne contre l’armée malienne, allant jusqu’à tenter d’empêcher la tenue de la réunion qui se termine aujourd’hui à Bamako.
C’est à croire que l’Algérie et le Mali ne pourront jamais se mettre autour de la même table et discuter franchement de la question de la sécurisation de la bande sahélo-saharienne, a fortiori s’entendre sur les moyens et les procédés pour mettre hors d’état de nuire les terroristes du désert.
Il faut reconnaître que le conflit entre le Mali et l’Algérie trouve sa source dans l’affaire de la République arabe sahraouie démocratique (RASD) proclamée et défendue par les dirigeants du front Polisario. Le Mali et l’Algérie ont été certes les premiers parrains de la RASD. Mais, autre temps, autres intérêts, autre réalité, autre méthode. Le Mali a révisé sa position, pour finalement geler, de fait, la reconnaissance de la RASD : pas de vote à son profit à l’Onu, pas d’ouverture de représentation diplomatique à Bamako, pas de relations officielles avec des dirigeants de la RASD.
Si l’on sait l’engagement de l’Algérie aux côtés du Polisario, l’on comprend aisément pourquoi cette divergence, disons cette opposition fondamentale entre l’Algérie et le Mali. Le pays de Bouteflika ne pardonnant pas au Mali, pourtant état libre et souverain, d’assumer ses choix diplomatiques au gré de ses intérêts. L’on comprend aussi pourquoi le réchauffement subit de la rébellion intérieure au nord du Mali il y a deux ans et aujourd’hui le piège d’une guerre frontale irréfléchie contre AQMI, dans laquelle l’on voudrait le Mali.
Amadou Bamba NIANG