Libération De Serge Lazarevic : Une victoire pour les terroristes de la Katiba Al Ansar

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L’ex-otage Serge Lazarevic est de retour en France
L’ex-otage Serge Lazarevic.
AFP PHOTO / HAMA BOUREIMA

La nouvelle a été annoncée avant-hier, 9 décembre, par le Président français François Hollande en personne : Serge Lazarevic, enlevé et détenu depuis trois ans par la Katiba el Ansar dirigée par le tristement célèbre Hamada Ag Hama, est désormais libre. Dès le lendemain de l’annonce, l’ex – otage était accueilli devant les caméras des plus grands média du monde par un Hollande visiblement heureux du dénouement de ce qui aura été l’une plus longues prises d’otage de ces dernières années.

Sur les circonstances de la libération de l’otage enlevé il y a trois ans au Mali en compagnie de Philippe Verdon, assassiné plus tard par les ravisseurs, le Président français s’est contenté de louer le concours précieux apporté par les autorités maliennes et nigériennes, citant nommément les chefs d’Etat du Mali et du Niger. Aucun mot  sur les tractations secrètes ayant permis à Lazarevic de recouvrer la liberté, et surtout blackout total sur les contreparties obtenues par AQMI avant de se défaire de l’ex – otage.

Malgré l’impasse faite sur ces circonstances, la vérité commence à émerger. En effet, la presse française a tôt fait de faire le lien entre la libération de Serge Lazarevic et celle intervenue à Bamako deux jours plus tôt de plusieurs terroristes appartenant à la Katiba Al Ansar. Et comme par hasard, parmi les jihadistes libérés par les autorités maliennes figurent Mohamed Ali Ag Wadossene et Heiba Ag Acherif, recherchés pour avoir joué un rôle actif dans l’enlèvement et l’exécution le 2 novembre 2013 à Kidal des journalistes français Claude Verdon et Ghislaine Dupont.

Ce n’est pas tout : la Katiba Al Ansar de Mohamed Ag Hamada dit Abdelkrim El Targui, à laquelle appartiennent Mohamed Ali Ag Wadossène, est également considérée comme étant l’auteur de l’enlèvement à Arlit au Niger puis de la libération le 29 octobre 2013 de plusieurs otages.

Une fois de plus, pendant que les autorités maliennes et françaises font l’impasse sur ce qui n’est autre qu’un échange de prisonniers avec la circonstance aggravante de la remise en liberté des auteurs d’une prise d’otage, ce sont les organisations de la société civile des deux pays qui ont tiré la sonnette d’alarme en élevant de vives protestations.

Au Mali, dès l’annonce, au moyen d’un communiqué gouvernemental laconique, de la libération des terroristes d’Al Ansar, le Président de l’Association Malienne des Droits de l’homme a élevé de vives protestations contre une initiative qui est selon lui de nature à consacrer l’impunité pour des criminels avérés.

En France, il a fallu la voix discordante de l’Association des Amis de Ghislaine Dupont pour apporter un bémol au concert de satisfactions qui a accueilli la libération de Serge Lazarevic. Après avoir affirmé que la libération de l’ex – otage a donné lieu à un échange de prisonniers, cette association invite les autorités françaises et maliennes à redoubler d’efforts pour « éclaircir les circonstances et les mobiles du double crime du 2 novembre 2013 afin que les assassins de Ghislaine et de Claude soient arrêtés et  jugés ».

Si l’on en juge par les déclarations des officiels français et nigériens depuis la libération de Serge Lazarevic, le Mali a joué un rôle crucial dans l’opération. Compte tenu des états de service des terroristes libérés par Bamako,  on peut s’interroger sur les motifs véritables de leur libération par les autorités maliennes. S’agissait – il simplement de rendre service à la France, comme indiqué dans le communiqué publié par le Gouvernement, ou bien cette décision rentre-t-elle dans l’objectif de reconquérir le soutien politique et financier de la France après les scandales provoqués par les affaires de l’achat de l’avion présidentiel et des contrats d’armement ?

Ces questions se posent avec d’autant plus d’acuité que les terroristes remis en liberté ont commis des crimes imprescriptibles au Mali et contribué grandement à sa déstabilisation. Est-il besoin de rappeler que le dernier forfait de l’un des prisonniers par les autorités maliennes,  le nommé  Mohamed Ali Ag Wadossène, a été d’abattre un surveillant de prison, au cours d’une tentative sanglante  d’évasion de la Maison centrale d’arrêt de Bamako qui a également causé la mort d’une jeune fille ?

En tout état de cause, les autorités maliennes qui, dans un passé récent, ont  mis en liberté des terroristes présumés sous le prétexte de la nécessité de mesures d’apaisement en vue de favoriser les pourparlers de paix avec les groupes armés, se doivent désormais de donner les plus amples informations à nos compatriotes. Sinon, le sentiment que le gouvernement assure  l’impunité aux pires criminels dominera et aucun appui apporté par la France ne pourra compenser l’immense détresse qu’une telle situation engendrerait au Mali de Kayes à Kidal. Au président IBK d’agir maintenant en apaisant les  inquiétudes qui s’expriment ça et là et en tenant aux Maliens le seul langage qui vaille, celui de la vérité.

Birama FALL

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