L’occupation terroriste islamiste des 2/3 du territoire du Mali, d’une bonne partie du nord du Nigéria ou encore du sud libyen prouve à suffisance que partout où l’autorité publique fait défaut, les groupes extrémistes armés ont pu facilement sévir. D’ailleurs, même les Etats dans leur acception moderne, se trouvent aujourd’hui menacés par ce péril. Quid alors du Sahara occidental ? Un territoire à problèmes, qui ne jouit que d’un statut de « territoire non autonome » par l’ONU et où l’Autorité étatique est assurée par le Maroc à 80% et par le front Polisario à 20% ?
Ce territoire de 266 000 km2 du Nord-Ouest de l’Afrique, soit la moitié de la superficie de la région de Tombouctou (497 926 km2), est bordé par la province marocaine de Tarfaya au nord, l’Algérie au nord-est, la Mauritanie à l’est et au sud tandis que sa côte ouest donne sur l’atlantique. Depuis le départ précipité des espagnols en 1976 du Sahara Occidental, différents acteurs sont à couteaux tirés pour son contrôle exclusif. D’abord, les marocains qui revendiquent sa « marocanité » et qui se basent sur les Accords de Madrid qui mentionne l’allégeance passée entre les tribus sahraouies et les sultans du Maroc. Ensuite, la Mauritanie d’alors, qui se fondant sur les mêmes accords de Madrid, revendiquait le sud du Sahara Occidental auquel elle ne renoncera qu’à la suite des accords d’Alger. Enfin, aujourd’hui, le Front Polisario basé à Tindouf au sud de l’Algérie qui proclama la République Arabe Sahraoui Démocratique (RASD) reste fortement soutenue par l’Algérie et plaide pour l’indépendance totale, pleine et entière du Sahara Occidental sans aucun rattachement à aucun autre Etat déjà constitué. Cette lutte est en grande partie à la base de la guerre froide que se mènent les deux pays voisins et « frères » que sont l’Algérie et le Maroc, tous deux impliqués dans la gestion de la Crise malienne. L’autre paradoxe est la présence de la Mission des Nations unies pour l’organisation d’un référendum au Sahara occidental, MINURSO. La MINURSO est, à plusieurs points, différente des autres missions onusiennes classiques. Elle est dépourvue d’un mandat de maintien de la paix ou encore d’un volet de surveillance des droits de l’Homme.
Mais alors, comment le Sahara Occidental échappe-t-il toujours à la nébuleuse terroriste ?
Le terrorisme sévit partout où le pouvoir étatique est ébranlé ou inexistant. Comme ce fut le cas en Libye avec la chute de Mouammar Kadhafi qui a transformé un pays jadis stable en un champ de guerre à ciel ouvert où des organisations comme Daech règne en maître. Ce fut le cas aussi au Mali avec le coup d’Etat du 22 mars 2012 qui a précipité la chute des 3 grandes villes du nord dans les mains de la bande à Iyad Ag Ghaly. En Syrie également, la Révolution qui n’avait au départ autre but que l’avènement d’une vie politique démocratique garantissant les droits de l’Homme les plus élémentaires est aujourd’hui usurpée par des terroristes. Donc, les groupuscules armés profitent à chaque fois de l’étincelle d’un coup d’Etat ou d’un début de Révolution pour répandre leur idéologie extrémiste fasciste. Le Sahara Occidental semble donc pour le moment épargné du terrorisme. En 2011, avec le début des Printemps arabes, il y eu bien quelques révoltes pour dénoncer la violation des droits de l’Homme consécutive à la répression supposée marocaine mais également à la corruption de l’Elite sahraouie, sans succès. Mais, le risque est bel et bien présent. Et il suffit d’une étincelle de révolte de toute la population sahraouie pour que le Sahara Occidental soit menacé de tomber dans l’escarcelle du terrorisme.
Ahmed M. Thiam