Après avoir compromis le succès de l’ANICT, le super patron du Programme Spécial Pour la Sécurité et le Développement du Nord (PSPSDN), prépare certainement sa nouvelle carrière politique. Et pour ce faire, il a vite trouvé un tremplin le plus approprié: le PSPSDN.
Ce Programme est l’un des plus importants investissements des partenaires au développement dans le cadre du financement du développement local. Ce n’est pas pour rien que sous le prétexte d’une recommandation des bailleurs de fonds, ATT a imposé son ami Ag Erlaf, grand acteur mal repenti de l’irrédentisme touareg au Mali.
Précipitamment lancé (pour des raisons faciles à deviner), ce Programme très spécial a été volontairement soumis au pillage. L’attaque d’Abéïbara a été sans conteste minutieusement préparée. Ag Erlaf savait très bien que les populations étaient réticentes à la construction des camps en ville. Et, il lui a été notifié clairement par certains élus que les populations s’opposeraient de toutes leurs forces à la construction de ce camp. Après les premières menaces, l’entrepreneur a exprimé ses inquiétudes au Coordinateur du Programme, sans succès. L’attaque s’est produite dans des circonstances que les responsables du Programme n’ont jamais voulu dévoiler. Quel en a été le bilan ? Qui étaient les assaillants ? Ag Erlaf connaît tout, mais n’ose en dire mot. Pourquoi ? Nous reviendrons sur les raisons profondes de son mutisme.
On peut également se poser la question de savoir pourquoi les autres entreprises n’ont pas été attaquées. Parce que simplement ces entreprises sont de couleur rouge, c’est-à-dire, il s’agit des entreprises appartenant à des proches parents de Ag Erlaf et qui avaient eu le marché dans de troubles conditions.
Ag Erlaf est très bien introduit au sein de la communauté touareg, arabe et tamashek. Il savait bien que certains de ses frères résidants en Libye avaient des intentions malveillantes pour leur pays. Il les a protégés jusqu’au bout. Pourquoi ? Là aussi, la raison est connue.
Aujourd’hui, vue la situation qui prévaut actuellement, il sait que son programme est pris en otage et il sait que les «séparatistes» comptent bien sur lui pour gouverner la future République Unie de l’Azawad. La fin des conciliabules, en cours dans le grand désert, permettra sans aucun doute de dévoiler certaines figures.
Le PSPSDN, un mort-né
Avant même sa mise en œuvre effective, le Programme Spécial Pour la Paix, la Sécurité et le Développement des régions du nord Mali (PSPSDN) est fortement contesté dans la région de Tombouctou. Outre le fait que pour cette première phase, seule la localité de Ber (60 km à l’Est de Tombouctou) est concernée, les ressortissants de cette région commencent à grincer des dents. Lors de la cérémonie de lancement des activités du Programme à Ber, un des maires, et pas des moindres, de la région serait sorti de ses gonds pour fustiger «la ridicule» part imputée à sa région sur la soixantaine de milliards de FCFA. Après avoir asséné ses quatre vérités, à savoir que ce fonds est très peu pour conjurer les menaces réelles de rébellion armée, pour financer le retour et la réinsertion de dizaines d’ex-combattants de retour de Libye, et relancer les activités de développement du septentrion malien, l’édile aurait mis en cause la nature même des investissements prévus.
Selon plusieurs techniciens proches du dossier, le gouvernement prévoit, en effet, de construire des casernes militaires, des postes de sécurité et des locaux pour l’administration. Ceci, afin de signifier le retour de l’Etat et de son autorité dans cette zone. Dans le même temps, pour encourager aussi le retour des populations civiles, d’autres infrastructures sont prévues, dont essentiellement des magasins, boutiques, marchés et parcs de vaccination pour bétail. Un autre volet concerne la réinsertion de ces populations par octroi de prêts. Mais visiblement, selon plusieurs interlocuteurs, tout cela ne serait pas vu d’un bon œil par les populations. Lesquelles sont principalement effrayées par tout ce déploiement militaire et carcéral même émaillé par quelques équipements marchands.
De plus, la jeunesse, en particulier, juge dérisoire les montants qu’on leur proposerait pour faire financer leurs projets de réinsertion socio-économique. D’autant plus que l’expérience en la matière, à leurs dires, s’est révélée désastreuse avec des programmes similaires, au point de les démotiver et de leur faire envisager d’autres alternatives. Selon ces jeunes, en effet, le PAREM, le CAR Nord, l’ADIN et, aujourd’hui, l’ADN ont tous échoué dans leur mission de désarmement et de réinsertion socio-économique de la jeunesse, en général, des ex-combattants, en particulier. Par exemple, cette dernière structure, l’ADN (Agence de développement du nord), leur avait promis à chacun la somme («déjà dérisoire») de 600 000 FCFA comme fonds de réinsertion. Après d’âpres discussions, ils avaient accepté, faute de mieux. Mais, après avoir longtemps attendu cette somme, on serait venu leur dire que le taux a été revu à la baisse et qu’ils devraient se contenter de 200 000 par tête de pipe. Ils ont accepté cela aussi. Mais depuis, cet argent se fait toujours désirer. Pour eux, ce fonds servirait principalement à nourrir d’autres desseins assez éloignés de leurs préoccupations. Ils disent savoir que les autorités ne sont pas les seuls fautifs et que leurs propres responsables communautaires seraient à la base de leur situation actuelle. Mécontents, ils seraient ballottés entre différentes oreilles pour tenter de se faire entendre. En vain. Résultat : l’ADN n’a plus pour seule activité que la réinsertion socio économique qui, jusque là, ne porterait aucun fruit.
Dans la région de Gao, principale bénéficiaire de la première phase, avec la région de Kidal, l’accueil réservé au PSPSDN serait tout aussi glacial. Mais surtout, risque d’embraser définitivement une zone où la paix est plus que précaire. D’un côté, les communautés nomades (Touareg et Arabes) s’apprêtent à faire main basse sur la quasi-totalité des fonds du Programme. Et, ce que craignent nombre d’observateurs, ce ne serait pas pour investir dans le développement mais pour préparer une tentative de sécession. Mais contrairement à la rumeur, les leaders de cette fronde ne seraient pas des anciens de la légion islamique de Kadhafi mais bel et bien des responsables des ex-MFUA, n’ayant jamais désarmé ou ayant déserté des rangs de l’armée nationale. Pour mener leur projet à terme, ils comptent non seulement sur l’enrôlement des nouveaux-venus de Libye mais aussi sur le rachat massif d’armes en provenance de ce pays. Et en l’occurrence, si même les autorités ne savent pas encore la quantité d’armes qui circulent actuellement dans le nord, elles savent néanmoins que c’est un arsenal de qualité.
Concernant les populations sédentaires, comprenant le danger d’accaparement de tout le financement PSPSDN par les ex-MFUA, à la suite de chantage et de menaces exercés sur l’Etat, elles tentent de se réorganiser, en ressuscitant notamment le Mouvement patriotique Ganda Koy, et en réactivant Ganda Iso. Toutefois, le rapprochement, prôné et souhaité par certains, entre les deux mouvements d’autodéfense a très peu de chances d’aboutir. Et ce, pour plusieurs raisons.
MANINGAKE