Si ce qui nous lie est plus fort que ce qui peut nous diviser, alors il ne reste plus qu’à taire nos divergences pour former un bloc soudé afin de défendre nos intérêts communs. C’est certainement ce que la CMA et le GATIA se seraient dits en signant cet accord d’alliance pour le retrait d’Anéfis. Mais aussi et surtout pour la libre circulation des personnes et de leurs biens sur cet espace qui leur est commun qu’est Kidal. Si non qui aurait parié il y a quelques jours qu’après les combats meurtriers qui firent beaucoup de morts que le GATIA allait sympathiser avec la CMA au point de signer un communiqué commun annonçant la suspension de leur participation ? Les observateurs avertis de la scène politique ne sont guère surpris surtout face aux hésitations et au pilotage à vue du gouvernement de ce dossier du nord d’où les 4 raisons de leur décision :
- L’ambivalence du Gouvernement: au lieu d’appuyer fermement les positions du GATIA, unioniste et républicain plus proche de la volonté populaire des maliens, le gouvernement cède trop tôt à la moindre pression de la communauté internationale. Toute chose qui le fragilise voir même le discrédite aux yeux de l’opinion publique et de son allié le GATIA. Pour rappel, après la prise d’Anéfis par le groupe pro-Bamako, le Gouvernement s’est désolidarisé sous la pression de la CMA et de la communauté internationale en demandant au GATIA de quitter sans condition pour ensuite se rétracter quand la CMA en violation des accords a réoccupé à la surprise générale « son Anéfis ». La conclusion à laquelle le GATIA semble parvenir est celle de se rapprocher de son ennemi intime qui a au moins le soutien de la communauté internationale afin de préserver ses arrières plutôt que de continuer avec un partenaire qui peut le lâcher à tout moment surtout que le GATIA et la CMA sont au fond les mêmes. Et certains maliens vont jusqu’à dire que GATIA-CMA égal bonnet blanc, blanc bonnet
2 La trop grande lenteur inacceptable dans la mise en œuvre de l’Accord : depuis la signature des accords on constate une certaine léthargie, un surplace de la part du gouvernement dans la mise en œuvre entrainant une certaine lassitude des parties prenantes. Toute chose qui provoqua un scepticisme réel quant à l’aboutissement heureux du processus, d’où la révision de la position de la plateforme qui commence par être convaincu par la CMA. C’est l’une des explications que l’on peut trouver pour justifier ce rapprochement GATIA-CMA pour former un front commun de défense de leurs intérêts.
3 Le remaniement raté du gouvernement Modibo Keita II : attendu depuis des mois, la formation du gouvernement dit de large ouverture intégrant les groupes armés rebelles et loyalistes, n’aura finalement pas porté la promesse attendue des fleurs. La mauvaise surprise a été la quasi absence des représentants de ces deux groupes armés, toute chose qui irrita les membres de la plateforme et de la CMA qui auraient bien voulu prendre part à la gestion du pays. Ce remaniement qui n’en est pas un, a renforcé la conviction des plus pessimistes qui ont pensé et qui continuent de croire que la sortie de crise n’est pas pour demain.
4 La mise en scelle récente du groupe COMPIS 15 par le gouvernement: l’une des raisons officielles de la colère noire GATIA-CMA est l’accréditation récente du groupe COMPIS 15 né après la signature de l’Accord de paix de Bamako issu du processus d’Alger. L’une des sources du problème semble être l’exclusion de COMPIS 15 du parachèvement de la signature par la CMA le 20 juin 2015. Et le fait de le réintégrer aujourd’hui dans le processus alors qu’il n’est pas signataire de l’Accord a été la goutte d’eau qui fit déborder le vase. D’où ce regain d’unité entre la CMA et le GATIA pour suspendre leur participation aux travaux du comité de suivi. Pour ces deux groupes le COMPIS 15 n’aurait aucune légitimité pour mériter la part belle du gouvernement.
En définitive donc, la mise en œuvre de l’accord de paix et de réconciliation issu des pourparlers d’Alger, ne pourrait réussir avec succès que si et seulement si, l’ensemble des forces vives de la nation toutes confessions religieuses et toutes obédiences politiques et sociales confondues seraient impliquées.
Youssouf Sissoko