Bamako fête ce mercredi les 50 ans de son indépendance, avec en filigrane les activités d’Al Qaeda au Maghreb islamique et la lutte contre son emprise sur le Sahel.
Le Mali, ex-colonie française, devait célébrer ce mercredi le cinquantenaire de son indépendance, en présence de nombreux chefs d’Etat. Mais la fête prend finalement une tout autre dimension alors que les activités d’Al Qaeda au Maghreb islamique (Aqmi), et notamment l’enlèvement de sept personnes dont cinq Français la semaine dernière, viennent troubler les pays du Sahel.
Bamako se trouve en effet au coeur de cette affaire: les otages d’Aqmi auraient été rapidement transférés du nord du Niger, là où leurs ravisseurs les ont capturés, au désert malien. Sans que la surveillance de la frontière par les troupes de Niamey n’y change rien.
C’est déjà dans cette vaste zone sahélienne qu’Aqmi gardait sous sa coupe un autre otage français, Michel Germaneau. Les premières informations publiques concernant son exécution en juillet dernier provenait d’un élu de la région du nord-est malien de Kidal, où l’humanitaire de 78 ans était censé être détenu depuis sa capture en avril.
Raid mauritanien… au Mali
Cette région a été du 17 au 19 septembre derniers le théâtre de "combats violents", officiellement sans lien avec le kidnapping opéré dans le nord du Niger. Mais l’armée malienne n’y participe pas: ce sont les troupes mauritaniennes qui frappent les militants d’Aqmi, leur infligeant de lourdes pertes et en subissant autant.
Pourquoi "sous-traiter" ainsi sa sécurité à un pays voisin? D’abord parce que le "Nord Mali a été complètement démilitarisé", confiait un initié à L’Express en mai dernier. Une situation qui ne favorise pas l’action humanitaire dont aurait pourtant besoin la population. Au contraire, les trafics en tous genres (cigarettes, drogues, armes) se sont multipliés. L’Aqmi en tire d’ailleurs des avantages financiers… au point de valoir à l’un de ses leaders le surnom de "Mister Malboro".
Mais surtout parce que les frontières sont poreuses dans la région. "Nous avons permis à tous les pays riverains de faire des poursuites si éventuellement les assaillants rentraient en territoire malien", avait déclaré vendredi dernier le président malien Amadou Toumani Touré, partisan d’une collaboration plus étroite entre les armées de la région pour traquer les contrebandiers.
Tensions régionales
Cette "compréhension" et ce "soutien" de Bamako ont été salués par Nouachkott. Le ministère mauritanien de la Défense a appelé le Mali son "frère". Un qualificatifs qui n’a pas toujours été employé: la stratégie malienne à l’égard d’Aqmi a, à d’autres occasions, irrité la Mauritanie et un autre voisin, l’Algérie.
L’affaire Camatte, en février dernier, en est un exemple. La coopération de Bamako dans cette affaire de kidnapping avait permis la libération de l’otage français, Pierre Camatte, après plus trois mois de détention… au prix de la libération de quatre islamistes, exigée par les ravisseurs. Parmi eux, figuraient deux Algériens et un Mauritanien: en signe de protestation, Alger et Nouachkott ont rappelé leurs ambassadeurs au Mali, alors considéré comme un maillon faible dans la lutte contre Aqmi.
Les célébrations de ce mercredi devraient permettre aux responsables régionaux de discuter du sort du groupe d’otages actuellement aux mains d’Aqmi. Le ministre de l’Intérieur Brice Hortefeux qui représente la France lors des célébrations de ce mercredi devrait s’entretenir avec le président malien et pourrait également rencontrer d’autres chefs d’Etat africains présents à Bamako, en particulier le Mauritanien Mohamed Ould Abdel Aziz.
Par Marie Simon, publié le 22/09/2010
AFP